2. Osmond

14 minutes de lecture

Constance

La joue écrasée contre le poing, Constance jeta un coup d’œil aux inconnus qui étaient entrés dans son appartement. Plongés dans l'incompréhension, ils étaient serrés les uns contre les autres dans le canapé sur lequel ils étaient assis. Elle retint un gloussement. Contrairement à eux, elle savait ce qui les attendait, et elle se félicitait de maîtriser ses émotions grâce à cet avantage.

Une jeune fille à la chevelure rousse fixait les oisillons mis en cage par le vieil Osmond. Elle jouait avec ses mèches d’un mouvement régulier de la main, trémoussant sa taille effacée au fond de son siège. Son long buste était assez frappant au premier abord. Elle possédait une mine gaie, signe d'une bonne humeur constante. Cela perturba Constance qui ne souriait que très rarement.

Elle arrêta son regard méfiant sur la nouvelle arrivée qui venait de s’installer, découvrant un visage très différent de celui qu’elle venait d’analyser. Ses cheveux blonds fins étaient ramenés en une longue natte, son visage rond affichait une expression sérieuse, et elle restait bien droite, bien que ses yeux bleu scrutaient les objets autour d’elle. Constance lui trouvait un air élégant malgré le bruit agaçant de l’élastique qu’elle claquait contre son poignet.

Elle soupira, se décidant à accorder plus d’attention aux trois garçons assis en retrait. L’un d’eux, dont la grande taille se démarquait du lot, avait les épaules larges et le front dégagé. Son visage dévoilait un teint clair et un air serein affiché en toute plénitude. Il avait des yeux sombres étirés, un nez camus et des lèvres plutôt étroites. Il patientait, immobile dans son polo bleu marine.

À côté de lui se trouvait un jeune garçon blond vêtu d’une large chemise, l'oeil attentif. Il paraissait faire quelques centimètres de moins ; Constance le trouva maigrelet. Sa peau pâle accentuait ses yeux perçants braqués sur la table basse.

- On peut y aller, maintenant que le pigeonnier a été reconstitué ?

Le troisième jeune garçon avait posé cette question sur un ton ironique. Constance sentit le rouge lui monter aux joues. Ses lèvres rieuses étaient la preuve d'un trait de caractère sarcastique. Son front était traversé d'une courte mèche brune. Ses joues retombèrent face au silence qui recueillit sa blague de mauvais goût. Tant mieux, cela l’avait remis à sa place comme Constance l’avait souhaité ; comparer un appartement haussmannien à un pigeonnier n’avait rien de pertinent. Elle ignora la beauté du jeune garçon et retint sa lourdeur d'esprit afin de ne pas succomber à son charme qu’elle trouvait, à contrecœur, très envoûtant.

Tous les autres furent embarrassés de voir le vieil Osmond froncer les sourcils. Ils fixèrent leurs chaussures au sol, ce qui aggrava d'autant plus la tension dans la pièce.

- Je crois que vous n’avez pas bien compris, déclara le vieil homme. Ces oisillons sont à vous.

- Pourquoi nous avoir fait venir, dans ce cas ? demanda précipitamment la rousse. Un oiseau ne choisit pas quelqu’un, c’est... juste un animal...

Le vieil Osmond serra les lèvres sous le regard goguenard de Constance. Elle avait accueilli ce vieil homme chez elle quelques jours auparavant, alors qu’il gisait dans la rue, abandonné dans un quartier malfamé auprès de six magnifiques oisillons inquiets. Ses parents étant partis en voyage d’affaires pendant une semaine et son grand frère trop occupé à réviser ses examens à Lille, la jeune fille s’était permis de venir en aide au pauvre homme qui, à son plus grand étonnement, l’avait émue. Constance n’avait pas un grand cœur, pourtant, ce jour-là avait été différent. Peut-être était-ce l’un des oisillons blanc tacheté de rouge à la longue queue emplumée qui l’avait intriguée en venant pousser de longs cris dans ses oreilles.

- Je suppose que chacun d’entre vous a été… quelque peu sonné par le comportement de son volatile ? répondit simplement Osmond.

Tous acquiescèrent sans hésiter.

- Cela a été sa façon à lui de vous dire qu’il ne vous quittera plus, continua-t-il.

- Vous êtes quoi, alors, un dresseur de rapaces ? supposa le garçon sarcastique.

- Ce ne sont pas des rapaces, murmura la blonde à la marinière. Ni des oiseaux ordinaires.

- Bien vu, sourit Osmond. Je suis enchanté que vous vous soyez tous déplacés et que vous soyez arrivés dans la même matinée. Vous venez tous de loin, j’imagine. Mais j'oubliais les bonnes manières... comment vous appelez-vous, chers enfants ?

Comme personne ne répondait, le garçon au polo se dévoua gentiment :

- Je m'appelle Philéas.

- Moi, c'est Ariane ! répondit la rousse après avoir compris qu’elle était obligée de répondre.

- Endrick, à votre service, ricana l’adolescent qui avait comparé l’appartement de Constance à un pigeonnier.

- Et moi Justine, fit la blonde, mal à l’aise.

Le dernier adolescent aux yeux perçants retroussa ses lèvres, puis marmonna :

- Colin.

Il n’est pas très bavard, celui-là, se dit-elle, les yeux plissés.

- Je ne vais pas tourner autour du pot plus longtemps, dit Osmond. Vous avez constaté que ces oisillons sont étranges. C’est parce qu'ils ne viennent pas d'ici.

Constance s’était préparée à leur réaction. Tout d'abord, Endirck éclata de rire, suivi par Justine qui eut un sourire nerveux. Ariane regardait longuement la porte avec envie, tandis que Philéas baissait la tête en se grattant la nuque. Colin se contenta de hausser un sourcil.

- Je sais, c’est difficile à croire. Moi-même, je doutais de l’existence de votre contrée, mais j’ai fini par la trouver à l’aide du Passeur.

- Vous sortez d'un livre fantastique ? lança Endrick.

Osmond grimaça.

- J’ignore de quoi vous parlez. Cependant, je peux vous raconter une histoire qui vous permettrait de mieux comprendre votre situation. Voulez-vous toujours rester ici et m’écouter ?

- On n’a pas vraiment le choix, mais b…

Constance fit signe à Endrick de se taire, agacée. Celui-ci ouvrit la bouche, décidant de ne pas se laisser faire ; Osmond réussit cependant à parler avant lui.

- Sachez-le, ces oiseaux là, vous ne les verrez qu’une seule fois dans votre vie. Très bien, ajouta-t-il après avoir réussi à intéresser le groupe. L’arclef est un oiseau insaisissable, aussi rapide et invisible que le vent, d'ailleurs, rares sont ceux qui ont réussi à l'apercevoir. C'est lui qui décide quand ouvrir la grande grille en or qui sépare ma vallée de votre... pays.

Il regarda Constance pour s'assurer qu'il avait prononcé le bon mot.

- Constance ne m’a pas cru, mais cet animal est éternel, il est irremplaçable. La légende raconte que, un jour de mauvais temps, des personnes fuyaient la guerre dans leur pays et se seraient perdues au fin fond de la campagne. Elles se seraient arrêtées face à cette grille grande ouverte, et l’arclef les aurait fait entrer dans sa vallée, vallée regorgeant entièrement de volatiles, des plus grandioses aux plus intrigants.

Personne n'avait l'air de prendre cette histoire au sérieux. Endrick croisa les bras derrière sa tête.

- Sérieusement ?

- Pourquoi ? Pourquoi cet oiseau aurait-il soudainement laissé passer ces gens ? demanda Ariane, qui s'était laissée prendre au jeu.

- Cette légende est un mystère. Certains disent que les oiseaux avaient besoin d’êtres humains à leurs côtés afin que l’on s’occupe d’eux, et vice-versa pour les hommes, qui vivraient en paix et en sécurité auprès de leurs oiseaux. Malheureusement, certains oiseaux n’auraient pas apprécié la présence de l’homme sur leur territoire... ils seraient ainsi devenus des oiseaux ténébreux rôdant dans de dangereuses forêts, contrairement aux oiseaux protecteurs qui, eux, auraient choisi de servir fidèlement leurs compagnons.

- On se croirait dans un conte pour enfants… souffla Justine.

Constance était, malgré son affection pour le vieil homme, également envahie par le doute. Elle voulait y croire, elle voulait qu’un monde empli d’oiseaux merveilleux existât, mais son rapport au monde se restreignait à une logique bien précise, celle de ne jamais laisser son imagination empiéter sur la réalité. Osmond ignora la remarque de la jeune fille et continua :

- On dit que, pour se venger, l'echezac aurait maudit la vallée avant de disparaître. Cet oiseau aurait laissé une couronne abîmée par six trous sur son passage. Nous n’avons compris que bien plus tard à quoi elle servait...

- A quoi ? demanda Philéas.

Osmond prit un temps de pause pour se rasseoir confortablement dans le fauteuil. Il joignit ses mains et déclara :

- Chaque trou correspond à un... comment dirais-je ? A un endroit d'insertion. Un peu comme une serrure dans une porte, si vous voulez. Pour l'ouvrir, il faut bien une clef, n'est-ce pas ? C'est pareil pour chaque trou. Ils ont tous la spécificité de pouvoir recueillir six plumes qui, une fois déposées, éveillent les pouvoirs de cette couronne. Quiconque la porte devient invincible.

- Eh bien c'est super ! s'exclama Endrick en se levant. Je ne vois pas où est le problème.

- Rassieds-toi, siffla Constance. Il n'a pas fini !

- Je fais ce que je veux.

- Tu as quelque chose de mieux à faire, peut-être ?

Justine fit signe à Endrick de se taire.

- Fais ce que tu veux, mais moi, je veux la suite de l'histoire. Alors silence ! Quel est le rapport entre cette couronne et ces oiseaux ?

- Regardez chacun vos oiseaux. Une plume scintille sur leur aile droite ! Vous savez, quelques siècles après que l'echezac ait abandonné cette couronne, six amis ont été choisis par six espèces rares, dont une plume se démarquait de leur plumage. C’est ça ? demanda Constance.

Elle avait espéré retenir l'attention d'Endrick. Celui-ci se rassit. Osmond la remercia du regard.

- Ces six espèces ne sont jamais du même siècle, elles ne naissent pas en même temps, c’est presque impossible. Cela n’est arrivé qu’une fois, jusqu’à aujourd’hui. Vous avez tous dû voir sur votre oisillon une plume qui se distingue de toutes les autres.

Les adolescents acquiescèrent.

- Ces six amis là ont longuement réfléchi ; ces plumes leur paraissaient importantes. En entendant parler de la légende, ils se sont mis en quête de trouver la couronne à six trous. Ce serait le laurellac qui leur en aurait donné l’idée, ajouta-t-il en fixant Justine.

- Mon oiseau ? répondit-elle.

- C’est cela, dit Osmond. Ta rencontre avec lui a certainement dû être la plus douloureuse.

Les joues de Justine se tintèrent de rose.

- Bref… où en étais-je ? Ah, oui. Donc, ces six amis ont compris que cette couronne pouvait rendre le maître de la couronne plus puissant que jamais. Pourtant, ils savaient que cet objet était corrompu, l'echezac n'était pas animé par de bonnes intentions lorsqu'il l'a abandonné ! Il n’y a rien de plus dangereux que de posséder la vallée grâce à une relique au charme maléfique, la paix de la vallée en subirait les conséquences. Lorsqu'ils ont trouvé la couronne, le garçon qui possédait le fenghuang a réalisé qu'ils devaient tous abandonner leur quête, précisa-t-il en fixant Philéas. Fenghuang qui est le tien.

- Pourquoi pas, dit-il en haussant les épaules.

- Il s’est rendu compte de la bêtise qu’ils commettaient tous en voulant donner de l’importance à cette malédiction. Mais c'était trop tard, un de ses amis était déjà obsédé par la couronne rien qu'en la touchant. Il a tenté de l'avertir, sans succès. Il s’est alors jeté sur lui avec un couteau pour le tuer.

- De sang-froid ? murmura Colin.

- Oui, son ami ne voulait plus entendre raison, car le pouvoir lui était monté à la tête au point de l'aveugler. Malgré le courage du possesseur du fenghuang, le garçon obsédé par la couronne, lui, a réussi à la placer sur son front juste avant de succomber au coup de poignard. Les pouvoirs de la couronne ont été emportés avec lui.

- Les pouvoirs... donc on la porte, et paf, on devient invincible ? N'importe quoi, souffla Philéas.

- Avec les six plumes, elle assure connaissance, protection, guérison, force, volonté et justice à son maître, précisa Constance. C'est uniquement grâce aux plumes qu'elle devient si importante.

- Que s’est-il passé ? Où se trouve la couronne, désormais ? lança la rousse.

- Et bien, étant donné que l’unique maître qui l'a portée est mort, il a fallu attendre que les siècles passent et que les six oiseaux rares renaissent en même temps pour détruire une bonne fois pour toutes la couronne. Malheureusement, personne n’y a cru ; c’est arrivé une fois, pourquoi les habitants seraient assez chanceux pour que cela se reproduise ? Cependant, c’est arrivé. Et vous êtes les élus, chers enfants. C’est à vous de retrouver cette couronne.

Un long silence suivit son récit. Tous, même Constance, avaient pris conscience de la lourde responsabilité qu’ils avaient sur les épaules, si toutefois cette histoire s’avérait vraie.

- C’est impossible ! contesta alors Endrick. Nous ne venons pas de votre « vallée », comme vous le dites si bien.

- Cela nous a fait un coup, à nous aussi Nous nous attendions à ce que les oiseaux choisissent des êtres humains nés sur nos terres. Mais cela n’est pas le cas.

- Pourquoi ? lança Constance.

- Je pense... que ces volatiles sont plus intelligents que nous le croyons. Ils ne voulaient pas commettre la même erreur en choisissant des personnes désireuses de régner sur la vallée. Vous êtes hors de toutes ces histoires, n’est-ce pas ? Peut-être aurez-vous un avis plus neutre sur la situation, ce qui facilitera votre quête.

- Oh, deux petites secondes, le coupa Ariane. Qui vous dit que nous accepterons de mener une quête ?

Cette question étonna Osmond. Il posa les mains sur ses genoux et, embêté, tenta de défendre sa cause :

- Parce-que ces oiseaux se sont dirigés vers vous, et qu’ils ne se sont pas trompés cette fois-ci...

- Vous êtes bien naïf si vous pensez que l'on va croire un inconnu qui nous raconte des histoires à dormir debout, le coupa Endrick.

- Mais... vous ne comprenez pas ? Ils perçoivent en chacun de vous de grandes capacités et... et votre caractère, enfin, votre âme correspond forcément aux attentes de vos oiseaux... bafouilla Osmond.

- Au fait, pourquoi vous retrouvez-vous dans cet appartement là, avec elle ? demanda Justine en regardant Constance.

L’intéressée se leva, jugeant que la suite de l’histoire ne l’intéressait plus. Elle se dirigea vers sa cuisine pendant qu’Osmond expliquait :

- Quand je suis arrivé sur vos terres, j’étais perdu. Personne ne s’y était rendu avant moi, nous n’avons aucune connaissance de votre mode de vie. J’ai dormi dans le froid pendant plusieurs jours, réchauffé par mes oisillons et la conviction que je finirai par vous trouver. Constance a fini par me croiser ; j’ai cru qu’elle serait une passante comme une autre, mais mon caladrius s’est précipité vers elle en volant.

- Un… caladrius ? demanda Philéas.

- Mon oiseau, répondit Constance en revenant avec un paquet de chips dans les mains.

Elle s’installa confortablement et entama son en-cas, croquant ses chips avec délice.

- En effet, chacun de vos oiseaux a un nom spécifique. Constance, tu pourrais partager, je suis sûr que nos invités meurent de faim, sourit Osmond.

Constance haussa les épaules. Osmond reprit :

- Je ne peux vous expliquer en détails les capacités de vos oisillons, mais… il faut prendre le risque de venir avec moi. Je dois vous former, je dois vous apprendre à vous rapprocher de votre oiseau et à comprendre comment nous vivons…

- Vous plaisantez ? souffla Colin.

- Nous avons pris la peine de nous déplacer pour venir vous voir, monsieur, tous les adolescents n’agiraient pas ainsi, vous êtes déjà très chanceux, fit remarquer Philéas.

- Pensez-vous que nous suivrons un inconnu ? hoqueta Ariane.

- Avec, en plus de ça, une histoire idiote concernant un endroit qui n'existe pas ? Qui voudrait vous croire ? maugréa Endrick.

- La ferme, moi, j’y crois, dit froidement Constance pour défendre Osmond.

- Lâche-moi un peu, tu veux ? rétorqua Endrick.

- Je suis désolée, j’ai besoin d’une preuve, conclut Justine, curieuse.

Osmond passa une main sous sa barbe. Son regard creux s’éteignit un instant, puis les traits doux de son visage se contractèrent.

- Je ne peux rien pour vous si vous ne croyez que ce vous voyez, murmura-t-il. Vous avez sous vos yeux de splendides oiseaux qui vous sont inconnus et qui pourraient changer votre vie, pourtant vous préférez les négliger. J’avais cru pouvoir recevoir un peu de soutien en arrivant ici, mais je me suis trompé ; vous êtes très différents de nous.

Agacée, Constance reposa brusquement son paquet de chips sur son fauteuil, se leva et se dirigea vers les cages à oiseaux sous les yeux ronds des adolescents.

- Osmond est trop modeste, déclara-t-elle sèchement. Et vous, trop incrédules.

Elle ouvrit une cage et laissa son oiseau, le caladrius, se poser sur son bras avec légèreté. Seule sa crête rouge en forme de pointe et ses petites taches se distinguaient de son plumage dénué de couleurs, et sa longue queue enroulée entour du poignet de Constance témoignait déjà d'une certaine complicité. Le volatile battit des ailes et, sur un coup de tête, il tira sa maîtresse par le poignet. D’un pas leste, Constance le suivit, puis se planta face à la petite blonde.

- Justine, je me trompe ? marmonna l’hôtesse de l’appartement.

- Mh… oui, c’est moi, mais ça dépend pour quoi ?

Constance leva les yeux au ciel.

- Mon caladrius est assez intéressé par ta tête. Tu peux nous dire ce que tu as ?

Justine restait imperturbable malgré le volatile agité qui faisait glisser son bec sur ses cheveux blonds décoiffés. Pas une seule lueur d’admiration ou d’inquiétude ne faisait briller son regard.

- J’ai un bleu enflé, finit-elle par répondre en frottant ses genoux. Pourquoi cette question ?

Constance attendit que son oisillon croisât son regard pour lui donner son approbation. Il se détacha de son bras et, d’un battement ferme d’aile, s’envola par la fenêtre.

- Tu es folle… il ne reviendra pas, dit Ariane, qui regardait tout de même la vitre.

Confiante, Constance déposa ses mains sur sa taille, un sourire hautain aux lèvres. Et elle eut raison ; son oisillon revint cinq minutes après, l’une de ses pattes renfermant un bouquet de persil. Il le lâcha par terre, s’engouffra dans la cuisine et revint avec une cloche à beurre qu’il déposa délicatement dans les mains de Constance.

- Je n’ai aucune expérience, je n’ai pas encore appris tous les traitements, déclara-t-elle. Le caladrius décèle une blessure et apporte un remède nécessaire à la guérison d’un blessé ou d’un malade.

- Et moi, je ne suis pas guérisseur, mais ce cataplasme est fréquent chez nous, dit Osmond. On mélange du persil à du gras, ce qui nous donne une pommade très efficace.

- Si vous avez déjà vu un oiseau aussi intelligent, alors on ne vous retient pas plus longtemps, lâcha Constance en se rasseyant.

- Cet oisillon a du flair, compléta Osmond en souriant faiblement. Merci, Constance, tu es adorable, mais je ne pense pas que cette démonstration les fasse changer d’avis.

À la fois hésitants et bouleversés, les adolescents restèrent coi.

- Donc… nos oiseaux aussi ont leur propre don ? finit par articuler Endrick, ce qui étonna Constance.

Osmond hocha la tête.

- Je pense que cette journée a été éprouvante pour vous, c’est normal que vous soyez aussi méfiants. Je ne peux vous en dire plus pour le moment… en tout cas, si cette quête vous intéresse, Constance vous donnera son… son…

- Numéro de téléphone, lui glissa-t-elle à l’oreille.

- Oui, son numéro de téléphone, c’est cela. Vous pourrez l’appeler pour lui demander quand nous partirons.

- Partir dans votre vallée ? s’enquit Ariane.

- Non, je veux vous former avant. L'arclef m’a mené chez une habitante qui possède une volière assez grande pour s'entraîner. Si vous êtes partants et que vous avez confiance en votre oiseau, et non en moi car je n’ai aucune liaison avec vous, dans ce cas, appelez Constance. Elle organisera un voyage en train pour que vous puissiez y aller tous ensemble.

- Est-ce vraiment nécessaire ? demanda Colin.

- Vous accomplirez tout ensemble. Apprendre à vous connaître serait la moindre des choses.

Peu convaincus, les adolescents finirent par se lever et adresser leur respect au vieil Osmond.

Au moins, ils sont polis, pensa Constance.

À sa plus grande surprise, tous lui demandèrent son numéro de téléphone. Ils semblaient nager en plein délire, les mains tremblantes d’hésitation en attrapant le bout de papier que Constance leur tendait. Ils avaient certainement du mal à y croire, pourtant, tout comme elle, quelque chose au fond d’eux devait les persuader de tenter cette aventure surréaliste.

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