5.1

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Quatre heures du matin. Je ne dors toujours pas. Est-ce qu'on dort pendant la fin du monde ? Mes deux piliers s'effondrent en même temps. Je n'ai personne à appeler au secours. Je n'ose pas déranger Manon pour mes histoires de cœur, pas au milieu de la nuit. Les autres, les « copains », les « amis », il est inutile de les appeler, aucun ne comprendrait. Finalement, je suis seul ! Hormis mes deux amants et Manon ! Je ne savais pas.

J'ai honte. Honte de ce qui m’arrive, honte de ne pas pouvoir réagir.

La télé défile des images sans sens, mon esprit me fait mal, mon corps me fait mal.

Je ne vais pas en tartiner des pages, vous connaissez cet état, ou vous avez connu, ou vous êtes trop jeunes.

Quatre solutions tournent en boucle.

La première est d'épouser Manon et d'oublier le reste. Je suis trop bien affectivement avec elle. On se donnerait de la liberté sexuelle, on partagera Charlotte, on adoptera Alex, on fera des enfants et mes parents seront heureux ! Il faut juste qu'elle largue Roxane et qu'elle accepte. Probabilité nulle, et ce n’est pas vraiment mon envie de jouer au mec normal.

La seconde est de tout plaquer pour Pierri. Vivre en permanence dans le soleil est tellement tentant, quitte à me cramer. Mais c’est perdre ma vie, perdre Doron. C’est avec lui que j’ai grandi dans mon âme. Je ne peux pas me passer de lui. Le malheur dans le bonheur ! Pourtant, planer au paradis jusqu’à la chute…

La troisième est d’abandonner ce rêve, de quitter le navire merveilleux. Je me remets avec Doron, je change de boulot et Pierri devient un doux souvenir. Aussi possible que me couper la tête.

La quatrième est de fuir ces dilemmes. Il est impossible de trancher, de choisir. Il reste le saut dans l’inconnu. Si vivre à moitié est impossible, ne plus vivre devient la meilleure solution. Il parait que la mort par asphyxie, monoxyde ou dioxyde de carbone est une mort douce. Les médocs ou le métro qui vous laisse légume pour savourer votre malheur éternel, très peu pour moi. J'ignore tout des armes à feu et je ne sais même pas comment m'en procréer une ! Ou partir faire de l’humanitaire dans une zone à risques, se perdre pour aider… mais je ne suis bon à rien ! Finalement, c’est le plus facile. Puisque le bonheur est impossible, cela ne sert plus à rien d’attendre. Comment s'asphyxier ?

J’entends Doron se réveiller, se doucher. Il a l’air heureux, car il sifflote. Quand il va me voir, il va repartir sur sa dernière phrase. Tout va s’effondrer. Je meurs dans 2 minutes, 1 minute, trente secondes…

— Qu’est-ce qui se passe, Usem, tu as l’air complètement défait !

Il s’approche pour m’entourer de ses bras, me câliner. Il semble tellement touché par mon état que je pleure. Quand va-t-il me dire…

— Dis-moi ce qui ne va pas…

— J’ai mal dormi, c’est tout ! fuis-je

— À cause de cette salope de Clarisse qui t’a jeté ? Mais, je te dis, attends ! Ça va passer ! Fais le dos rond ! Tu n’as pas encore perdu ton Pierri ! ET j’espère bien encore me le faire !

Je ne comprends plus ! Je n’ai pas rêvé ! cette nuit, il a bien dit ces mots horribles ! Je ne vais pas lui poser la question ! Ou est-ce mon esprit qui a projeté ces horreurs, tellement je crains de les lui entendre prononcer ?

— Usem, ça va ? Tu m’inquiètes sérieux, là !

— Oui, oui ! Donne-moi du café !

— Mais ta tasse est pleine !

Je n'arrive pas à aligner deux neurones. Dans une heure, j’ai une visio avec Pierri. J’en suis malade. Je m’habille comme un automate. Pierri apparait sur l’écran. Sa tête défaite me ravage le cœur. Je dois le consoler.

— Pierri, ça va ?

Je retiens mes paroles, car je distingue Clarisse en petite culotte derrière lui. La salope ! Elle le surveille !

— Oui, oui, ça va ! On fait le tour des problèmes ?

— Oui, puis il faut que nous préparions le copil de la semaine prochaine !

— Ah oui, le comité de pilotage ! Il tombe bien !

— Pourquoi ?

— Parce que je pense que c’est mieux que je quitte ce projet…

— QUOI ?

Non seulement nous ne serons plus ensemble, mais nous ne nous verrons plus ! NON ! Je suis certain que c’est cette connasse de Clarisse qui le pilote.

— Clarisse ? Je te vois ! Pourquoi fais-tu ça ? Qu’est-ce qui s’est passé ?

— Toi, le pervers, je ne veux plus te voir ! Pour salir les gens et les couples, tu es parfait ! Tu salis tout, tu ne penses qu’à tes saletés…

— Dis donc, tu t’es laissée faire, tu appréciais quand je te…

— Tais-toi ! C’est bien ça ! Tu salis, tu pervertis tout, tu entraines tout le monde dans tes orgies et ta boue ! Je t’interdis de me parler, de revoir Pierri. Il est d’accord pour aller sur une autre mission.

Je me tais. Ce soir, je vais appeler Manon. Je ne comprends pas ! Elle était au septième ciel et maintenant, elle trouve cela dégueulasse…

Elle se tient campée derrière Pierri. Sous sa surveillance, nous listons les problèmes, c’est fastidieux à hurler de désespoir. Puis nous travaillons sur les premières conclusions pour le copil. Je vois la silhouette de Clarisse partir. Je tape dans le tchat : « Elle est partie ? ».

— Oui, mais elle va revenir ! Usem, je ne sais pas quoi faire ! Je ne veux pas te perdre ! Elle est en furie ! Qu’est-ce qu’on fait ?

— Rien pour l’instant. Je te promets que nous allons continuer, malgré elle.

— Mais je ne peux pas la quitter, je ne peux pas divorcer ! Ce serait terrible !

— Non, ce n’est pas cela ! On va trouver une solution. Soit tranquille. File doux. Je m’occupe de tout !

Je veux tellement le rassurer ! S’il s’effondre, c’est fini ! Je vais me battre contre ce démon.

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