Enfin, la guerre est finie, les balles ne pleuvent plus, l'ennemi n'est plus là, enfin. Les souffrances de ces dernières années vont pouvoir se transformer en joie de retrouver ceux qu'on aime ou en tristesse d'apprendre leur disparition. J'avais été envoyé loin, trop loin de ceux que j'aime. Tout ça pour tuer des gens avec qui j'aurais pu être amis, qui sait ? Des personnes qui avaient aussi des familles des amis des collègues qui attendaient leur retour, priant toutes les divinités de ce monde afin de les revoir un jour. Mais je n'avais pas eu le choix, ils m'avaient envoyé en enfer. Heureusement tout ça est fini, me voilà de retour à mon village. Du haut de la colline qui le surplombent, je peux admirer : Des familles qui se prennent dans les bras avec un immense sourire, d'autres les larmes aux yeux à s'apitoyer sur leur sort dans un recoin d'une rue. J'y vois tellement de maisons détruites et pas que ! Les vies de toutes les personnes que j'ai connues dans mon petit hameau sont bouleversées. C'est le genre de blessure qui ne guérit jamais. Du haut de ma colline, je vois, je pense à tous les dégâts causés par cette guerre, mais qui l'a voulue ? Qui aurait pu souhaiter un tel désastre ? Qui aurait pu engendrer la mort, la destruction, l'anéantissement ? Je remarque la boulangerie où j'allais tout le temps étant plus jeune, criblée de balles, les vitres cassées. Le petit terrain vague à l'arrière de l'école élémentaire où les obus ont élu domicile.Et je vois aussi, mes parents. Alors les larmes se mettent à couler sur mon visage, enfin presque, car plus jamais je ne pourrais leur parler, les prendre dans mes bras, les enlacer, embrasser. Je voudrais qu'ils puissent me réconforter après toutes les atrocités que j'ai vues. Ils s'approchent de moi un bouquet à la main, et lisent à voix haute la pierre sur laquelle j'étais installé : "Armand Thierry 1895-1918 mort pour la France".