Pauvre éducation nationale
Non contente de subir pléthore de réformes, réformes imposées par les ministres de l’éducation nationale qui se succèdent : rénovation du collège unique, réforme pour l’avenir de l’école, réforme du lycée, refondation de l’école de la République, réforme des rythmes scolaires, réforme des programmes, réforme des retraites – ah ah je ne pouvais pas la louper celle-là -, réforme des examens du baccalauréat, politique d’éducation prioritaire, le bac « 2021 », réforme des universités …, l’éducation nationale génère, de l’intérieur, ses propres réformes dont celle de la langue française.
Je pose donc la question suivante : les réformes qui font généralement descendre dans la rue des enseignants furibards sont-elles en nombre insuffisant pour que l’éducation nationale éprouve le besoin de réformer la langue française et de sommer les enseignants d’utiliser la « novlangue » et les sigles diffusés à coup de notes académiques ?
Quand je pense que les impôts que nous paierons tous, sauf ceux qui se débrouillent pour ne rien payer, à notre grand désespoir, jusqu’à notre mort, servent à rémunérer des enseignants qui cogitent pour pondre des mots et des expressions carabinées, J’AI MAL ! JE SOUFFRE ! JE DEPRIME, vite vite, la cellule psychologique !
Et vous constaterez en poursuivant votre lecture qu’il y a des pépites langagières « pas à piquer des hérissons ».
Interrogation écrite et j’espère que vous avez bien étudié et révisé vos leçons jargonesques version éduc. nat. !
Accrochez-vous !
- Expliquer la phrase suivante – compte pour 7 points sur 20 :
« Les tiers lieux éducatifs servent à faire émerger un patrimoine informationnel commun : mutualiser des outils libres et open source et des dispositifs de documentation est la seule garantie d’une non enclosure et d’une circulation des savoirs »
Quand on lit cet extraordinaire concept la première fois, toute première fois#, toute toute première fois# , toute toute première fois# , on ne comprend rien.
Il faut décortiquer le bidule pour se faire une vague idée.
Comme je suis bien brave et dans mes bons jours, je décortique pour vous.
Dès le début de la phrase, se posait la question des « tiers lieux » ?
Pourquoi « tiers » et non « lieux » tout court.
J’en ai conclu qu’il était question de lieux non intégrés à l’éducation nationale, en d’autres termes, de lieux qui ne sont pas situés dans les écoles, les collèges, les lycées, les universités etc.. mais qui ont une relation avec l’éduc.
S’agissant du « patrimoine informationnel commun, des outils libres et open source et des dispositifs de documentation », j’en ai conclu que ce patrimoine était ouvert et accessible à tous les citoyens de ce merveilleux pays et que ce patrimoine comprenait les outils modernes et anciens : internet, livres, ...
Quant à « la seule garantie d’une non enclosure », j’avoue rester perplexe …. C’est presque hors sujet !
Ca vole haut, hein les « potos » ! Vous ne vous attendiez pas à cela, avouez !
Bref, je ne ferai pas durer le suspense insoutenable plus longtemps, il s’agit de ….
…. de …….
Tatatata !
UNE BLIBLIOTHEQUE !
- Qu’est que le « geste graphomoteur » ? – compte pour 1 point sur 20 :
C’est facile mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
L’ECRITURE !
Les « djeuns » ne sachant plus écrire, et n’utilisant plus que smartphones, tablettes et portables avec lesquels ils communiquent par l’intermédiaire de sigles et de gestes graphomoteurs très raccourcis de type :
KEN ON SVOI ?
TE OU ?
JTAIM
TA KOUR OJOURDUI ?
Couillon de djeun, la question à poser en jargon éduc. nat. est : "TA 1 FORMATION EN MOD PRESENTIEL OJOURDUI ?"
et autres borborygmes, nous ne devrions plus voir beaucoup de personnes graphomoter.
Je propose, et dans un souci de cohérence qui ne semble pas avoir frappé nos enseignants, ni le souci, ni la cohérence, d’adopter le verbe « graphomoter ». On se demande pourquoi l’éduc. ne pousse pas sa logique jusqu’au bout ?
M’enfin comme dirait un certain Gaston, il était bien inutile de se torturer les méninges pour cette expression, comment dire, ridicule ? grotesque ?
- Possédez-vous des « outils scripteurs » ? – compte pour 1 point sur 20 :
DES CRAYONS ! bon sang de bonsoir, rien à voir avec la sculpture au cas où certains s'emmèleraient les outils scripteurs ... elle est également facile celle-là et, plus généralement, tous les outils utilisés pour graphomoter : stylos, feutres, plumes – non mais je déconne, qui écrit encore avec une plume aujourd’hui ?
Allez et encore quelques exemples plus anciens du jargon cocasse du Mamouth.
- Qu’est-ce qu’un « référentiel bondissant » ou « référent bondissant » ? – compte pour 3 points sur 20 :
UN BALLON !
Dans un texte datant de 2002 de l’académie de Grenoble (idem dans un texte de l’académie de Rouen) figure, à la place du mot «ballon» le « référentiel bondissant » pour expliquer les règles du jeu de diverses activités sportives, tenez-vous bien, à des élèves de primaire !
La totale ! à des élèves qui ne maîtrisent pas encore les subtilités de la langue de Diderot et si tant est qu’ils maîtrisent quoi que ce soit un jour …
Ainsi le texte propose, à propos du base-ball, de changer la « nature du référentiel bondissant en fonction de l’âge des enfants ».
Oh secours, les sous-titres !
Comprendre qu’on peut changer la taille de la baballe en fonction de l’âge des enfants.
Tout ça pour ça ? Et nous confions nos enfants à un tel système éducatif.
Par la suite et pour adapter cette formidable notion au rugby, l’éduc. a pondu, le « référentiel bondissant aléatoire » à cause de la forme particulière du ballon de rugby qui génère un bondissement à la trajectoire irrégulière donc aléatoire.
On reste concentré, l’interrogation n’est pas terminée.
- Où les élèves apprennent-ils à nager ? compte pour 3 points sur 20 :
Vous pensiez qu'au collège, hérétiques que vous êtes, nos enfants apprennent à nager dans une piscine.
Détrompez-vous.
Le mot piscine n'existe dans aucun document de cette vénérable institution éducative et le verbe nager n'est employé qu'une petite fois, dans un coin perdu d’une note administrative absconse. Le verbe nager est remplacé par « apprentissage de la natation ». Pourquoi pas ? jusque-là, cela peut encore passer.
Oyez Oyez braves gens, sachez que nos enfants n’apprennent pas à nager mais à :
"Se déplacer de façon autonome, plus longtemps et plus vite, dans un milieu aquatique profond standardisé".
Le milieu aquatique profond standardisé à la place de la piscine, J’ADORE !!
Une autre ! Une autre !
Patience les « potos » ça vient.
Expliquez les E3C - compte pour 3 points sur 20 :
Il s’agit des épreuves communes de contrôle continu.
AH BON ! Z’avez toujours pas pigé ? M’enfin, E pour épreuve, jusque-là tout va bien, ensuite cela se complique, il faut cogiter un peu, allez courage, le chiffre 3 en référence à Communes, Contrôle et Continu, sous-entendu les épreuves communes de contrôle continu donc 3 fois la lettre C.
Pigé les « potos » ? Ouf, j’en ai des sueurs tant c’est difficile …
- Qu’est-ce qu’un ou une AED ? compte pour 2 points sur 20 :
Un-e assistant-e d’éducation autrement dit un-e surveillant-e que, de mon temps, on nommait un pion-ne.
Encore une petite louche pour la route :
- Les élèves n’existent plus, les élèves sont devenus des « apprenants »
- La classe est en réalité un « espace d’apprentissage pédagogique », trop beau !
- Une rédaction est une « production écrite »
- Apprendre à écrire est devenu « automatiser progressivement le tracé normé des lettres » autant dire que si votre tracé n’est pas normé parce que par exemple, votre outil scripteur bave, ou bien parce que vous avez décidé d’adopter un geste graphomoteur selon votre goût, cela se passera très mal pour votre matricule !
- Courir dans la cour de récré = "créer de la vitesse"
- Un mot est « une suite de signes phonétiques graphiques avec un contenu sémantique »
Lorsque votre bambin a donné une réponse à une question posée par le prof, il n’a pas répondu, que nenni, il a :
« Apporté une conceptualisation cognitive intuitive » et si le même bambin aime aller à l’école il a : « une vision proactive » de l’école.
Le prof de bambino aurait-il un accent d’une de nos belles régions françaises, du sud de la France par exemple ? Si oui « son matériau sonore trahit extemporanément ses origines phocéennes ». Traduction : Le prof est Marseillais mais il est censé perdre son « assang ».
Après bambino, c’est le tour de bambina.
J’ai une petite histoire à vous raconter et vous devez trouver, dans le texte, quels sont les signes phonétiques graphiques avec un contenu sémantique issus du jargon éduc. nat.
Prêt ? Partez !
« Bambina ne sait pas quelle langue étrangère choisir à son entrée en classe de 6ème c’est-à-dire en première langue. Son géniteur, historien émérite, l'a judicieusement incité à s'approprier comme langue cible celle de Goethe, arguant du fait que l'entente franco-germanique pourrait ne pas être éternelle ».
Traduction : Son père lui a conseillé de choisir LV1 allemand, car : « Ca peut toujours servir en cas de guerre ».
En plus de la novlangue et des sigles, il faut également maîtriser l’écriture inclusive, sinon le prof tapera sur les doigts avec une règle, QUOI ? mais ce n’est plus autorisé de faire cela …
Quelqu’un-e, a-t-il/elle obtenu 20 sur 20 ?
Si oui, se faire connaître, récompense à la clé !
Annotations
Versions