Ces quatre mots affublés d'une négation, je les entends cinquante fois par jour, quatre jours par semaine. Je suis une institutrice qui en reçoit des tonnes à la figure. Et moi, je ne comprends pas ce mot. Dans comprendre, il y a "prendre". Alors je me demande ce que mes élèves ne peuvent pas "prendre". C'est comme dans "apprendre". J'avoue que j'ai ma réponse toute faite, quand on me dit cela, je réponds : "il n'y a pas à comprendre, juste à faire". Après, je me demande s'ils ont envie de "prendre", s'ils ont envie d'apprendre, s'ils ont envie de se laisser "surprendre". Alors c'est vrai qu'ils se font "reprendre" quand la nécessité de recadrer se fait pressante. Mais j'aimerai qu'ils se prennent le droit de "prendre" les conseils, les idées et qu'ils se prennent le droit de "prendre" position et de "prendre le taureau par les cornes" pour surmonter et dépasser les difficultés. Je sais que c'est difficile et qu'on n'a pas toujours envie.

J'ai déjà travaillé avec eux pour qu'ils en viennent à m'expliquer ce qui se cache derrière ce "je ne comprends pas". Nous avons fait la liste des "Je n'ai pas envie", "je m'en fiche", "je ne sais pas", "je n'ose pas", "j'ai peur d'essayer et de me tromper". Quand ils arrivent à verbaliser, ils se rendent compte que le "je n'ai pas compris" n'est pas suffisant et qu'ils peuvent vraiment dire ce qui les dérange. Et là, je les vois oser, recommencer, refaire, sourire, prendre du plaisir à apprendre. Je ne vise que cela, leur montrer tous les rideaux qu'ils peuvent pousser pour aller voir toujours plus loin; explorer, découvrir, chercher, réfléchir.

On réfléchit ensemble à des "comment", au lieu de simplement poser la question du "pourquoi" qui amène toujours un "parce que" appauvri. On partage des connaissances, on essaie de répondre à des questions en imaginant des solutions, en se prenant le droit d'imaginer.

Alors les "je ne comprends pas" disparaissent.