Chapitre 18 : L’écho du doute
Evans se réveilla une fois de plus dans un état étrange, un peu comme si son esprit avait du mal à rassembler toutes ses pièces. Les rayons du soleil passaient à travers les rideaux de son appartement, mais la chaleur n’atteignait pas son cœur. Il avait hésité toute la nuit à écrire à Lena, à lui dire ce qu’il ressentait, mais l'angoisse d'une réponse incertaine l'avait paralysé. Il se leva en silence, se dirigea vers la fenêtre et contempla la rue en contrebas, comme si une réponse pouvait surgir de l’agitation du monde extérieur. Mais rien ne venait.
Il avait vu Zoé hier soir. Ils avaient partagé un moment tendre, elle avait parlé de son passé violent avec son ex, mais quelque chose dans son regard, dans sa voix, avait rappelé à Evans que tout n’était pas aussi simple qu’il le désirait. Zoé avait cette douceur, cette chaleur réconfortante qu’il avait toujours appréciée, mais la fragilité de son passé, ces ombres qui planaient encore sur elle, l’empêchaient de se libérer totalement. Et lui, il n’était pas prêt à assumer cela, tout en étant incapable de la repousser. Il voulait la protéger. Peut-être pas comme un amant… mais comme un frère ?
La pensée de Lena, avec ses yeux clairs, ses airs de défi et sa vulnérabilité secrète, occupait également une place importante dans ses réflexions. Il se sentait comme un homme partagé entre deux mondes qui ne pouvaient se rejoindre. Et chaque mouvement qu’il faisait semblait creuser davantage l’écart entre eux.
Un bruit de porte qui se ferme le fit sursauter. C’était Kyle, qui venait de rentrer de sa petite escapade, un grand sourire aux lèvres.
— Hey, Evans ! Tu sembles toujours aussi perdu dans tes pensées… Tu veux que je t’explique pourquoi la situation entre toi, Lena, et Zoé est comme un trou noir ?
Evans leva un sourcil, amusé malgré lui par l’humour un peu décalé de son ami. Kyle, avec ses théories farfelues et sa capacité à rendre les choses plus légères, réussissait toujours à détendre l’atmosphère.
— Un trou noir ? Evans répondit en souriant faiblement.
— Bien sûr ! Tu vois, un trou noir attire tout à lui, mais rien n'en ressort. Alors, voilà ce qui se passe, tu te laisses attirer par les deux filles, mais toi-même, tu ne sais même plus si tu veux t’échapper ou t’y enfouir. C’est la même chose, tu sais, avec les trous noirs. C’est une lutte entre l’évasion et l’attraction.
Evans éclata de rire, un rire un peu forcé, mais qui semblait alléger la lourdeur qui pesait sur lui. Kyle n’avait vraiment aucune honte à mélanger des métaphores cosmiques et des situations émotionnelles. Cela apportait un peu de clarté, mais il savait aussi que cette explication n’était qu’une échappatoire temporaire.
— Tu sais, Kyle, je pense que tu pourrais vendre tes métaphores pour un petit billet. Evans s’assit sur le canapé, essayant de se détendre, mais son esprit restait agité. « Je suis… perdu, en fait. J’ai l’impression que je dois choisir, mais j’ai peur de faire le mauvais choix. »
Kyle s’assit à côté de lui, son ton soudainement plus sérieux, plus posé.
— Écoute, Evans, personne ne peut vraiment te dire ce que tu dois faire. Mais ce que je sais, c’est que si tu n’avances pas, tu vas rester dans cet état pour toujours. Peut-être que tu devrais vraiment réfléchir à ce que tu veux, sans te laisser envahir par la peur ou les doutes.
Evans resta silencieux, regardant ses mains, le poids de la conversation pesant sur lui. Il savait que Kyle avait raison, mais les choix n’étaient pas si simples. Zoé l’apaisait, elle lui offrait quelque chose de stable, de rassurant. Lena, quant à elle, apportait une tension, une incertitude, mais aussi une forme d’excitation. Il avait l’impression de vivre deux vies différentes, et chaque moment passé avec l'une d'elles semblait effacer un peu plus le lien qu’il avait avec l’autre.
Dans un élan de désespoir, il attrapa son téléphone, hésitant encore une fois. Il scrutait l’écran, cherchant la force de contacter Lena. Mais au lieu de cela, il se leva brusquement, comme si un geste impulsif allait enfin éclaircir ses pensées.
— Je vais la voir. Dit-il, plus à lui-même qu’à Kyle.
Kyle haussa les épaules, un sourire espiègle sur le visage.
— Et ben, si c’est ça, fonce. Mais n’oublie pas, mec, rien n’échappe aux trous noir.
Evans sourit légèrement, replaçant son téléphone dans sa poche, et sans un mot de plus, sortit de l'appartement. La porte se referma derrière lui avec un léger claquement, le bruit semblant résonner dans le silence qui suivait.
Lena, de son côté, était en proie à des pensées similaires. Depuis la rencontre dans l’ascenseur, une partie d’elle semblait se perdre dans une attente silencieuse. Les heures se succédaient, marquées par le désir que quelque chose se passe, que le message d'Evans arrive, que tout devienne enfin clair. Mais ce silence pesait sur elle, rendant l’incertitude plus présente que jamais.
Elle se leva finalement de son canapé et alla chercher sa guitare. Elle se força à jouer, à laisser ses doigts se déplacer sur les cordes, sans penser, juste pour libérer un peu la tension qui la paralysait. La mélodie s’échappa doucement, calme, presque mélancolique, mais pleine d’émotion. Elle sentait une vague de tristesse monter en elle. Pourquoi fallait-il que tout soit si compliqué ?
Le bruit de son téléphone la fit sursauter. Un message. Elle s’approcha du téléphone avec appréhension et, en voyant le nom d’Evans apparaître à l’écran, son cœur s’emballa.
Elle ouvrit le message, le lisant en silence, avant de soupirer profondément.
« Je dois te voir. On peut se retrouver ? »
Lena se figea, son esprit envahi par mille pensées. C'était tout ce qu’elle avait voulu entendre, mais à la fois, elle savait que ce moment allait changer beaucoup de choses.
Elle répondit en quelques mots, sa décision prise, mais ses émotions partagées entre l'excitation et la peur.
« Oui, je veux te voir aussi. »
Evans se rendit finalement chez Lena, chaque pas qu’il faisait l’éloignant un peu plus de ses doutes et l’approchant d’un moment de vérité. Il avait quitté son appartement dans un état de confusion totale, mais l'idée de la voir, de mettre fin à cette attente, de confronter enfin ses sentiments, lui donnait une étrange sensation de clarté. Le trajet pourtant court, lui sembla interminable, les pensées se bousculant dans sa tête, mais il savait une chose, il n’avait plus envie de tourner en rond.
Lena, de son côté, était plongée dans une étrange tension. La décision qu’elle avait prise en envoyant ce message semblait, en un instant, peser tout le poids de l’avenir. Elle avait toujours cherché à éviter les situations qui la mettaient face à ses peurs, mais là, elle ne pouvait plus reculer. Elle sentait que quelque chose se nouait en elle, que ce moment allait changer le cours des choses, quoi qu'il arrive.
Quand la sonnette de son appartement retentit, elle se leva d’un bond, son cœur battant la chamade. Elle hésita une fraction de seconde avant d’aller ouvrir la porte. Et là, il était devant elle. Evans. Ses yeux gris, ses cheveux légèrement éparpillés, et ce petit sourire, presque timide, qu’il lui offrait comme une porte vers quelque chose d'inconnu.
Elle l’invita à entrer sans dire un mot, l’air légèrement incertain, mais heureuse de le voir en même temps. Leur regard se croisa un instant, comme si chacun d'eux mesurait le poids de cet instant.
— Tu veux… tu veux qu’on parle ? demanda Evans, une nervosité perceptible dans sa voix.
Lena hocha la tête, fermant doucement la porte derrière lui. Elle lui désigna le canapé. Elle n’avait pas besoin de grandes paroles, juste d'un moment à deux, à essayer de comprendre ce qui se passait entre eux. Peut-être que les mots viendraient plus tard.
Ils s'assirent, le silence pesant d'abord lourd entre eux, mais étrangement confortable, comme une tempête prête à se dissiper.
— Je sais pas par où commencer, dit Evans, les mains légèrement tremblantes. Il se mordit la lèvre inférieure, comme s’il cherchait les mots qu'il n'arrivait pas à formuler. "J’ai… je pense qu’il y a des choses que je dois te dire, mais je suis pas sûr d’être prêt."
Lena le regarda avec douceur, mais aussi avec une forme de défi dans les yeux. Elle n'avait pas l'intention de se laisser entraîner dans des mots non-dits encore une fois. Ses doigts se fendirent un instant dans ses cheveux, cherchant un peu de calme avant de répondre.
— Je comprends, Dit-elle, sa voix plus calme qu’elle ne l’aurait cru. "Je sais qu'on a tous les deux nos doutes. Mais tu sais… je pense qu’il faut parfois accepter de se jeter dans l’inconnu. Si on continue à réfléchir trop, à analyser chaque geste, on finira par se perdre dans nos têtes."
Evans soupira, se sentant plus léger. Elle avait raison, après tout. Il se leva brusquement, comme une impulsion irréfléchie, et se dirigea vers la fenêtre. Ses yeux se perdirent dans la rue en contrebas, cherchant une réponse qu’il savait qu’il n’avait pas. Puis il se tourna vers elle, un peu hésitant, avant de revenir s’asseoir à ses côtés.
— Je suis… désolé. Je ne voulais pas te faire attendre. C’est juste que je… je suis dans une sorte de tourmente.
Evans se perdit un instant dans le décor de l’appartement de Lena, ses yeux parcourant l’espace avant de se poser sur un objet qui semblait presque en harmonie avec l’atmosphère qui flottait autour d’eux : une guitare, posée contre le canapé. L’instrument semblait presque vivant, une extension de la personne qui l'avait choisie. Ses doigts glissèrent inconsciemment vers le bord du canapé, avant que sa voix n’échappe timidement :
— Tu… tu joues de la guitare ?
Lena tourna son regard vers lui, une lueur d'hésitation dans ses yeux, comme si elle se demandait si elle devait répondre. Puis, un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Elle prit la guitare avec une grâce déconcertante, ses doigts effleurant les cordes avec délicatesse. Elle n’avait pas besoin de dire quoi que ce soit. La musique suffisait.
Les premières notes, douces et lentes, s’élevèrent dans l’air, presque comme un souffle, puis elles se fondirent en un morceau sans paroles, simplement un enchaînement de sonorités qui parlaient d’amour, de tendresse et de larmes retenues. Chaque note semblait emplie de toute l’émotion qu’elle portait en elle. Le rythme était calme, fluide, comme une déclaration silencieuse.
Evans, captivé, se laissa emporter par la musique. Ses yeux ne quittaient pas Lena, observant chaque mouvement de ses doigts sur les cordes, chaque vibration de l'instrument. Il sentait une chaleur monter en lui, une chaleur qui n’était pas simplement physique, mais qui était liée à la beauté de ce moment, à l’intensité du regard qu’ils échangeaient sans mot. La mélodie, comme une invitation muette, le touchait profondément, et quelque chose en lui s’éveillait avec une force insoupçonnée.
Alors qu’elle finissait de jouer, un silence lourd et rempli de promesses s’installa entre eux. Le cœur d'Evans battait plus fort, et il n’avait plus de place pour ses doutes. C’est elle qui voulait. Zoé était juste une amie. Il se leva lentement, ses gestes presque irréfléchis, comme s'il suivait une impulsion qu’il ne contrôlait pas. Ses mains se posèrent sur les siennes, fermement, et, dans un élan d’émotion brute, il l’attira vers lui.
Les lèvres de Lena frôlèrent les siennes, d’abord timidement, avant qu’Evans ne l'embrasse langoureusement, un baiser empreint de tout ce qu’il avait du mal à exprimer. C’était un baiser de délivrance, une fusion entre ses pensées et ses désirs, un geste spontané et intense.
Lena répondit sans hésitation, ses bras se glissant autour de lui, s’accrochant à ce moment où le temps semblait se suspendre, où il n’y avait plus de doutes, seulement l’intensité de leur connexion. Leurs corps se rapprochèrent encore, comme si chaque mouvement, chaque frôlement, était une déclaration silencieuse de ce qu’ils ressentaient l’un pour l’autre.
Il n’y avait plus de place pour l'incertitude maintenant. Leurs lèvres se mêlaient dans une danse amoureuse, une danse qu’ils ne comprenaient peut-être pas entièrement, mais qui leur semblait essentielle, presque nécessaire. Les battements de leurs cœurs se synchronisaient, et pendant un instant, tout semblait clair.
Le monde extérieur, avec ses questions et ses doutes, disparut. Il n’y avait plus qu’eux deux, ici et maintenant, dans l’instant qui les unissait.
Puis, lentement, Evans l’attira un peu plus près de lui, sa main glissant dans le dos de Lena. Leur contact devint plus profond, plus intime, mais sans jamais forcer. Il voulait sentir chaque réponse de son corps, chaque battement de son cœur, chaque frisson qu'il pouvait lui offrir.
Leurs mains se cherchaient maintenant, se frôlant, se découvrant, mais toujours dans ce respect silencieux de l'autre. Lena se laissa aller à ce moment, oubliant tout le reste, ne se concentrant que sur lui, sur leur connexion. Chaque frémissement de sa peau semblait répondre à l'appel de son âme, chaque souffle qu'ils échangeaient était comme une musique qu'ils jouaient à deux, sans besoin de guitare cette fois, juste avec leurs corps et leurs émotions.
Lena s’éloigna légèrement, son regard plongé dans celui d’Evans, cherchant à lire ce qu'il ressentait, à savoir si lui aussi, tout comme elle, se sentait emporté par cette vague d'émotions.
Ils étaient là, ensemble, dans cette bulle silencieuse où tout semblait à la fois suspendu et infini. Les mots n’étaient plus nécessaires. Ce qu’ils partageaient à cet instant, c’était bien plus que de simples gestes. C'était une rencontre, une compréhension sans besoin de s'expliquer.
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