Acte 2, chapitre 6 - Summerhill

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"Le train s'apprête à entrer en gare de la ville d'Alderton. Nous espérons que vous avez fait bon voyage en notre compagnie. Avant de partir, vérifiez de n'avoir oublié dans le wagon. Faites attention à la bordure du quai en descendant du train. US Railways vous remercie de votre confiance. Nous vous souhaitons une agréable journée. À très bientôt !"

Elle pensait se débarrasser de la pluie en quittant Southfall, mais le mauvais temps l'a suivi jusqu'à Alderton. Est-ce un signe ? L'arrêt à la gare est imminent. Alison se lève de sa place, rassemble ses affaires, se dirige vers la porte de sortie. Il fait encore que quelques mètres de plus, avant de se stabiliser pour de bon. Ça y est, il ouvre ses portes. Alison descend du train, submergée par une pointe d'émotion, de nostalgie. Chaque pas qu'elle fait sur le sol d'Alderton réveille en elle une myriade de souvenirs d'enfance.

La familiarité des lieux lui procure à la fois une sensation de sécurité et d'excitation. Elle constate que la gare n'a pas changé d'un poil vingt ans plus tard. Elle a gardé son vieux revêtement d'origine qui fait d'elle l'une des plus belles stations de l'Ohio. Elle se souvient de ce jour où elle a décidée de prendre le train pour mener une nouvelle vie dans la ville de Southfall... cela lui semble bien loin maintenant qu'elle est de retour au bercail.

Elle continue de marcher vers la sortie, lorsqu'elle remarque un journal posé négligemment sur un banc de la gare. Curieuse, elle s'approche et le ramasse : il s'agit du Alderton Register, le journal local de la ville. Elle le parcourt rapidement du regard et tombe sur un article intrigant qui attire son attention...



The Alderton Register - Le nombre de disparitions alarmantes dans la forêt de Death Pines entraîne la fermeture de l'accès par les autorités d'Alderton

Article publiée le 22 septembre 2019 par Harry Sunderland

Les autorités d'Alderton ont pris une décision radicale en fermant l'accès à la mystérieuse forêt de Death Pines, suite à un nombre croissant de disparitions inexpliquées dans la région. Les habitants sont désormais avertis de ne pas s'aventurer dans cette forêt dangereuse, où de nombreux individus ont été portés disparus ces derniers mois.

La forêt de Death Pines, réputée pour son aura de mystère et d'intrigue, a récemment fait l'objet d'une série d'incidents troublants. Des personnes de tous âges et de tous horizons ont été signalées comme disparues après s'être aventurées dans cette dense forêt. Les recherches entreprises par les autorités locales n'ont pas encore permis de résoudre ces mystères, ce qui a conduit à la décision de fermer l'accès à la forêt jusqu'à nouvel ordre.

Le maire d'Alderton, M. John Peterson, a tenu une conférence de presse pour annoncer la fermeture de la forêt de Death Pines.

Il a déclaré :

"La sécurité de nos concitoyens est notre priorité absolue. En raison du nombre croissant de disparitions dans la forêt de Death Pines, nous avons pris la décision de fermer l'accès à cette zone. Nous demandons à tous les résidents de respecter cette interdiction et de ne pas mettre leur vie en danger en pénétrant dans cette forêt dangereuse."

Les autorités locales ont installé des panneaux d'avertissement et des barrières aux entrées de la forêt pour informer les visiteurs de la fermeture. Des patrouilles de police supplémentaires seront déployées dans la région pour veiller à l'application de cette interdiction et dissuader toute violation.

Les enquêtes sur les disparitions en cours se poursuivent avec le soutien d'équipes spécialisées dans les opérations de recherche et de sauvetage. Les autorités encouragent également les résidents à signaler tout indice ou comportement suspect lié à la forêt de Death Pines.

Il est conseillé à la population de respecter cette interdiction et de ne pas tenter de s'aventurer dans la forêt de Death Pines par mesure de sécurité. Les autorités travaillent activement pour résoudre ces affaires de disparitions et garantir la sûreté de la communauté.

Restez informés des développements de cette situation en évolution et veillez à votre sécurité en évitant toute visite dans la forêt de Death Pines jusqu'à nouvel ordre.

Alderton Register continuera à suivre de près cette affaire et fournira des mises à jour régulières pour tenir la communauté informée.

— Vous ne m'empêcherez pas d'entrer dans la forêt, dit-elle en jettant le journal par terre.

En sortant de la gare, un sentiment de nervosité l'envahit lorsqu'elle aperçoit le car qu'elle prenait au quotidien pour aller au domicile familial, où elle habitait autrefois.

— Maman... vas-tu accepter de me voir ? se demande-t-elle en hésitant d'embarquer dans le véhicule.

Alison jette un oeil au tableau des horaires du car et se rend compte qu'il part dans une minute.

— Et puis merde ! Il est temps de faire face, n'est-ce pas docteur Daniels ?

La jeune femme n'a plus le temps de réfléchir et entre dans le car qui s'apprête à démarrer. Le car est à l'image de la ville d'Alderton, empreint d'une atmosphère sombre et pesante. Les vitres sont légèrement ternies et les sièges en cuir usés par le temps, témoignant des nombreuses histoires qui se sont déroulées à l'intérieur de ce véhicule.

La sombre ville est affectée par la présence sinistre de Death Pines et se dresse comme un reflet trouble de la nature déchue qui l'entoure. Les rues pavées, autrefois animées et accueillantes, sont maintenant parcourues d'une ambiance lourde, imprégnée de mystère et de malaise.

Les résidences autrefois majestueuses et colorés semblent maintenant délavés, leurs façades ternies par le poids des années et des secrets enfouis. Les volets des maisons sont souvent fermés, donnant une impression d'abandon et de retrait. Les rares passants qui osent s'aventurer dans les rues semblent être marqués par une certaine résignation, leur regard évitant les coins sombres et les allées désertes.

Elle arrive bientôt à "Summerhill", la résidence où elle a grandi. Sa gorge se noue, ses mains deviennent moites et devient nerveuse à la simple vue de l'arrêt de bus qui lui remémore à nouveau sa fuite vers Southfall. Les portes du bus s'ouvrent. La jeune femme prend son temps pour descendre et pose enfin les pieds sur la terre, laissant l'autocar continuer son trajet. Elle a oublié que l'arrêt juste en face de la maison famillial. Ses yeux se posent sur pavillon où elle a vécue enfant. Elle n'ose pas bouger, tant la jeune femme est paralysée par la peur et l'appréhension.

— Allez, un peu de courage ma belle, se dit-elle pour elle-même avant de marcher vers le domicile.

La grisaille persiste et donne un aspect lugubre au pavillon, transformant la maison autrefois accueillante en une vision horrifique. Les murs décrépis et les volets en lambeaux accentuent cette atmosphère sinistre. Des fissures et des dégradations sont visibles partout,

Le jardin, autrefois soigné et fleuri, est maintenant envahi par les mauvaises herbes. Les plates-bandes jadis colorées sont désormais envahies par des plantes sauvages et des ronces. Les jouets de Joshua, laissés à l'abandon, sont éparpillés ici et là. Ça lui rappelle les joyeux souvenirs d'enfance désormais enfouis sous l'abandon et la négligence.

Les fenêtres, couvertes d'une épaisse couche de poussière, donnent l'impression que personne n'a songé à ouvrir les volets depuis des années. Les rideaux défraîchis sont suspendus tristement, semblant emprisonner les souvenirs passés à l'intérieur de la maison, sans laisser filtrer la lumière ni l'espoir.

Les larmes lui montent aux yeux alors qu'elle réalise à quel point la disparition de Joshua a pu affecter la vie de sa mère. Elle ressent une profonde culpabilité, et se demande si elle avait pu empêcher cet état de délabrement en restant auprès d'eux. En arrivant devant la porte, elle n'entend rien d'autre que la pluie, le souffle du vent et le crissements des feuilles.

— Bon... c'est parti.

La jeune femme rassemble son courage et sonne à la porte de la maison familiale. Quelques secondes plus tard, une vieille dame, aux traits ridés et aux cheveux grisonnants, se présente devant le porche. Cependant, ce n'est pas sa mère qui se tient là. Alison commence à se poser des questions. Est-ce sa mère ?

— Maman ? C'est toi ?

— Ça ne risque pas, Alison. Je n'ai jamais eu d'enfants.

— Vous me connaissez ? Mais qui êtes-vous ? Et que faites-vous dans la maison de ma mère ?

— Tu dois sûrement parler de l'ancienne propriétaire.

— L'ancienne... propriétaire ? Ma mère vous a céder la maison ? C'est impossible ! Elle y tenait plus que tout !

— Jeune femme... j'ai le regret de vous annoncer que votre mère nous a quitté il y a déjà dix-neuf ans maintenant.

— Hein... qu'est-ce que vous racontez ? Non...

Les mots résonnent dans l'air, frappant Alison de plein fouet. Un mélange d'incrédulité et de douleur envahit son être. Elle s'effondre sur le seuil de la porte, submergée par une vague d'émotions déchirantes. La vieille femme, compatissante, s'agenouille près d'elle et pose une main réconfortante sur son épaule.

— Qu'est-ce qui s'est passé... comment est-elle morte ?

— J'ai été sa meilleure amie pendant de nombreuses années. J'étais là pour elle lorsque tu es partie. Peu de temps après ton départ, elle a appris l'existence d'un cancer du poumon en phase terminale et elle en est morte un mois plus tard. Toutes mes condoléances, jeune femme.

Le poids du deuil s'abat sur les épaules d'Alison, comme une lourde charge qu'elle doit porter seule. Chaque battement de son cœur est empreint de nostalgie et de regrets, tandis que les souvenirs de sa mère s'entremêlent avec le vide de son absence.

Alison reste immobile, dans un état de choc et de désarroi, incapable de saisir pleinement la réalité de cette perte déchirante. Les mots "ma mère est morte" résonnent dans son esprit comme un écho déchirant, rappelant la fin brutale d'une relation mère-fille et laissant un vide béant dans son être.

Les larmes continuent de couler, témoins silencieux de la douleur qu'Alison ressent au plus profond d'elle-même.

— Je... je devrais y aller. Au revoir..., dit-elle en quittant la résidence en larmes.

— Jeune fille, attendez ! crie la vieille femme en voulant retenir Alison.

Mais Alison n'entend désormais plus que ses pas, s'enchaînant avec frénésie, ses poumons brûlants sous l'effort. Peu importe, elle continue de courir. Elle cherche un échappatoire à cette réalité insupportable.

Ses larmes, mêlées à la pluie qui tombe du ciel, brouillent sa vision, mais elle s'en moque. Son corps tout entier est en proie à une douleur indescriptible, et seule la fuite lui semble possible pour échapper à cette souffrance.

Elle ne sait pas où elle va, ni où elle veut aller, mais elle sait qu'elle ne peut pas rester immobile. Les rues défilent sous ses pieds, les passants la regardent avec curiosité ou empathie, mais elle ne les voit pas. N'est visible que sa douleur et son amertume.

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