Je replie la feuille et la pose sur la table. Je marche ensuite en direction de la fenêtre et contemple d'un air pensif le bâtiment des cuisines, où le messager royal est en train de prendre du repos devant un bon repas.

Linaë, qui est assise sur notre lit, me demande :

- Que dit cette lettre ?

- Le roi de Forestisle nous invite à venir célébrer le Renouveau dans la capitale, en sa compagnie, l'informé-je en me tournant vers elle.

- Cette nouvelle devrait vous remplir de joie, alors pourquoi ne la lis-je pas sur votre visage ?

Je prends une grande inspiration pour me donner du courage, puis commence à marcher dans sa direction, en lui expliquant :

- Notre relation n'a jamais été simple. J'avais beau chercher tous les moyens possibles et imaginables d'attirer son attention, passer du temps avec moi ne l'intéressait pas. C'est pourquoi son invitation m'étonne et me perturbe : pourquoi s'intéresse-t-il soudainement à moi ?

- Je ne le connais pas, alors je ne peux rien affirmer avec certitude, mais peut-être a-t-il changé d'avis et qu'il a trouvé en cette fête importante dans ce pays l'occasion idéale de renouer les liens.

- Il n'a même pas assisté à mon mariage ! rétorqué-je.

- En parlant de cela, il y a une question que j'aimerai vous poser. . .

- Je vous en prie, faîtes, dis-je en m'installant à côté d'elle.

- Le jour de notre union, justement, j'ai remarqué qu'hormis vos serviteurs, personne n'est venu à la cérémonie. C'est étonnant, car même si le roi ne s'est pas présenté, les grands nobles du royaume étaient certainement conviés au mariage de leur prince, alors pourquoi est-ce qu'ils n'étaient pas là ?

- C'est moi qui leur ai demandé de ne pas venir, lui avoué-je.

Ses beaux yeux bleus s'écarquillent de surprise et elle me questionne :

- Pourquoi cela ?

- En apprenant que mon aîné ne viendrait pas à mon propre mariage, je me suis senti si frustré que j'ai refusé que de simples inconnus assistent à cette cérémonie.

- Je comprends, m'assure-t-elle en posant sa main sur la mienne.

- Merci, lui dis-je simplement avec un petit sourire.

- Va-t-on se rendre à la capitale ?

- On ne refuse pas l'invitation du roi de Forestisle et puis, cela va sans doute vous paraître stupide et puéril de ma part, mais. . . J'aimerai lui laisser une autre chance.

- Je prie pour qu'il la saisisse.

Touché par son immense compréhensivité, je l'attire à moi pour la serrer dans mes bras. Elle me rend mon étreinte en silence et je caresse sa chevelure blonde en lui avouant :

- Je suis encore plus triste maintenant qu'autrefois qu'il n'ait pas assisté à notre mariage, car plus le temps passe, plus je réalise que c'était le plus beau jour de ma vie.

- Nous ressentons encore une fois la même chose, déclare-t-elle en plongeant son regard dans le mien.

Je me penche sur son visage levé vers le mien pour lui offrir un baiser, qu'elle me rend aussitôt.