Harcèlement fatal

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Il y a des gens qui s’émeuvent des guerres, du péril « attentatiste-attentatoire », qui poussent des cris d’orfraie et même de goret… Car, en ces temps troublés, la France est inquiète !

Mais regardez autour de vous, oui, par ici, là, je suis là, il y a bien pire et vous vous en fichez bien. Si si, vous vous en fichez superbement, comme de votre première couche ou votre dernier pot de blédine. En fait vous n’aimez le drama que loin de vous, délocalisé. Ce qui vous est proche vous indiffère. Lamentable. Consternant.

Parce que moi, j’ai vécu le drame absolu. Convoqué chez la directrice et l’aréopage de « cadres dirigeants » pour attentat ! Et je ne vous parle pas de ce que m’a servi ma femme. Et tout ça alors que j’étais « full » innocent ! Cherchez l’innocence totale, l’innocence absolue, si, cherchez bien, par ici, oui, elle est là, sous vos yeux, bafouée, humiliée, piétinée…

Quoi ? Comment ça, il y en a marre ? Que je raconte ? Comme ça tu me parles ? On croirait entendre ma femme ! Et après tu vas dire que c’est pas possible, que c’est de la mytho totale…

OK, OK. T’es prêt ? Attache ta ceinture, parce que tu vas tomber de ta… Hein ? Tu me dis « ta gueule ! » À moi ? Mé nan… Je le crois pas !

J’étais sur le pot, peinard, en paix avec « myself ». Certains esprits supérieurs se demanderont ce qu’est le pot, où ce que j’y faisais. Le pot c’est ce qu’on nomme hypocritement le trône en Frankaoui, pays du non dit, du « cachez ce sein que je ne saurais voir ». Mais en Belgique, nous on est plus pragmatiques et moins cons et on parle de pot. Parce qu’en définitive, c’est bien ce que c’est. Quant à ce que j’y faisais, bah c’est simple, je me soulageais cousin ! La faute à un shop suey pourri, parce que les exploités de cette boite de m… sont obligés de becqueter au food-truck de Mamoudi ! Quoi, il est pas chinois Mamoudi ? Je vais pas m’enfiler le taboulet tous les jours, cousin !

Quoi ? Je vais pas te raconter ma vie aux chiottes? Mais attends, bordel ! T’es du genre à contrarier ton colon, toi frérot, tu dois tirer une constipation du feu de Dios… Je dis ça, je dis rien… En vrai t’es un sac à m… Je rigole ! Je taquine. Te vexe pas.

Enfin bref, plongé dans ma BD, le pantalon sur mes chaussures, je me donnai de mal. J’accouchais quoi, j’étais en nage, au bout de ma vie, ruiné, suffoqué, poussant d’affreux grognements que certains qualifieraient d’inapropriés. Mais enfin, faut que ça sorte, non ? J’avais un alien dans le bide qui faisait la nouba, c’était carnaval dans mon fondement. Je te passe le son et lumière et surtout les odeurs, je vois que tu es du genre délicat. Quand on pense à ce qu’on a dans le bide, enfin surtout les femmes… Quoi ? T’es choqué ? Sérieux ? Attends, c’est pas l’histoire ça.

Bon, il faut savoir que nous autres Belges, on ne met pas le loquet du closet. On ne comprend pas à quoi ça sert, parce que le mec qui vient là, il y vient de son plein gré, tu vois. Il va pas se tirer avant la fin, même s’il a vu le film plein de fois. Alors pourquoi fermer la lourde ? Bah maintenant, j’ai pigé. Parce que les toilettes de cette boite super huppée, sont MIXTES, bordel et dans le contexte actuel ou, si tu souris à une femme, il y a harcèlement, bah c’est un détail qui tue comme dirait Columbo !

Or donc, j’étais peinard quand j’entendis le clop-clop des talons d’une meuf qui se pointait tout en bavassant dans son phone avec sa voix de niaiseuse. C’était la Thérèse, la parfaite ménagère de moins de cinquante ans, tu vois, une grosse dinde. Enfin, j’ai rien contre les dindes en fait. Ce sont des oiseaux intelligents en général. J’en ai vu qui faisait leur grille de Loto au PMU comme tout le monde. Si, c’est vrai ! Mais dans le lot, c’est comme tout, il y en a qui ont vraiment une couche. Et la Thérèse, c’est la dinde abrutie de la dinderie ! Tu vois, si c’était un canard, elle ferait coin-coin.

Nan, je suis pas sexiste. Réaliste, c’est tout et surtout je dis la pure vérité, pas comme ces Français menteurs..

Et l’autre, toujours bavant, ne trouva rien de mieux que d’entrer dans MON closet ! Même pas, elle m’a vu, tu vois, toujours à dire « mais non, c’est pas possible ce mec, c’est un salaud, je te l’avais dit, tous les mecs sont des menteurs... » dans son phone vissé à son oreille et je la vois qui remonte sa robe à fleur pour se déculotter avec sa main droite, la seule restant, l’autre confinée à tenir un smartphone. Les femmes sont des handicapées en fait.

J’eus une vision d’effroi ! Son fessu dodu sur ma face, pour qu’elle fasse ce qu’elle fut venu faire… Quoi c’est pas Français ? Je suis Belge et je parle Français mieux que toi et je te merde !

Qu’une meuf me pissoit dessus ? Ou pire ! Alors, je suis pas le genre contrariant, même je me targue d’être assez conciliant comme mec, cool quoi, mais là, mais là, mon sang ne fit qu’un tour ! Je hurlai :

— Wo, WO, WOOOOO !

Si elle avait fait un bond plus haut, elle était dans le Guinness Book et elle faisait un trou dans le faux plafond.

Hein ? Toi aussi t’es scandalisé ! Moi pareil. Moi pire. Mais attends, parce que c’est pas le terrible de cette histoire. Parce que la Thérèse me baffa et me traita de tous les noms possible :

— Satyre ! Maniaque ! Grand malade ! Sadique ! Terroriste !

Je ne te raconte pas le barouf qui s’en est suivi. La totale. La gent féminine voulait me couper les glaouis avec un ciseau rouillé ! Tout le personnel se pointa aux chiottes, même les absents, même les télétravails, via Twitch ! Même ceux qui bossaient pas là ! Il y avait même des Suisses ! La honte !

Mais comment tu veux te justifier avec le pantalon sur les godasses aussi, mon sgeg caché par ma BD ? Comment ?

On me traîna comme un chien galeux aux étages directoriaux pour une punition exemplaire.

La directrice, madame Musquin, avec ses petits yeux myopes et suspicieux me toisa.

— Monsieur Lorenzo, encore vous ! Comment ce fait-ce ?

— Comment encore moi ?

— C’est toujours vous ! Voilà la triste vérité, confirma la DRH.

— J’ai rien fait !

— C’est un sadique, madame Musquin ! Un vicieux ! Mais regardez-le !

— Allons, madame Thérèse, laissez-le s’expliquer.

— C’est un menteur ! Il va encore vous enfumer ! Je connais l’animal ! C’est une queue ! C’est une queue !

— Madame Thérèse! Un peu de tenue.

— Vous voyez comment on me traite, madame Musquin, c’est une honte ! fis-je.

— Qu’est-ce que tu fichais aux chiottes ! fit Thérèse, pointant l’index accusateur de Dieu sur Caïn.

— Je me soulageais !

— Menteur ! Tu te branlais ! On a trouvé une BD… Regardez ! Il se planque aux chiottes au lieu de bosser, le cossard, pour faire des saloperies !

Madame Musquin s’empara de mon Journal de Mickey et haussa les sourcils de surprise et consternation.

—Vous lisez ça, monsieur Lorenzo ? Mes petits enfants…

— Je ne vous permets pas de juger mes goûts littéraires…

— Soit, fit-elle pincée.

— C’est un malade ! Il faut le virer ! Totalement immature et incontrôlable ! Il ne respecte rien !

— Non mais sérieux, je suis la victime, ici, m’insurgeai-je, avec dignité. On allait me pisser dessus, ou pire !

Madame Musquin fut bien obligée de prendre mon argument en considération.

— Pourquoi ne pas verrouiller la porte des toilettes, monsieur Lorenzo ?

— Je me croyais en pays civilisé ! On n’entre pas dans un closet sans regarder s’il y a quelqu’un, quand même… C'est la plus élementaire des politesses !

— Ce n’est pas faux, Thérèse…

— Vous n’allez pas prendre sa défense, madame Musquin… Songez qu’il a vu… Mon anatomie…

— Une vilaine culotte de coton de grand-mère… Pfff !

Je vous passe les insultes cinglantes de la Thérèse. Sachez que j’eus droit à un ignoble et raciste « sale Belge ».

Mais le calvaire ne devait pas s’arrêter là. Des langues bien pendues s’empressèrent de mettre ma femme au courant de « l’incident des toilettes ».

Rentré chez moi, au lieu du réconfort du foyer, ma moitié trépignait d’impatience de me vilipender. Et en plus sa meilleure amie, Louise était là pour lui filer un coup de main.

J’eus droit à un terrible :

— Mais comment ça se fait que tu sois toujours dans le cul d’une femme ? Comment c'est possible ?

J’eus beau faire, rien n’y fit que je pusse faire… Quoi, c’est pas Français ? Je t’…

Finalement, à bout de salive, la faim au ventre, je fus sauvé par le gong. Les femmes et la bouffe, c’est un truc sacré, la cause de leur gros cul. La raclette "diététique" n'attend pas, cousin !

Tandis que ma femme me jetai une dernière bordée, dans son dos, la Louise me fit grand sourire et me fit signe de l’appeler au téléphone, en douce. La salope ! Mais comment peut-on être d’une telle duplicité ? Comment ? Simplement c’est une femme, cherche pas.

Quoi ? Je lis le journal de Mickey et alors ? C’est tout ce que tu as retenu de cette histoire ? Sérieux ?

On y apprend des trucs super intéressants et ça détend le colon !

Bzzzz !

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