Olga et Max : première rencontre

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Max enfila sa tenue de cosmonaute, une blouse le recouvrant de la tête aux pieds. Dans les premiers temps, il avait eu du mal à respirer, mais désormais il s’y était habitué.

Aujourd’hui il entrerait dans la cellule d’Olga. Son défi consistait à la rassurer puis à l’apprivoiser et enfin de gagner sa confiance.

Il appréhendait la jeune femme, redoutait ses réactions ainsi que ses capacités. Rien n’indiquait que la combinaison résisterait excepté les paroles rassurantes de son ami à ce propos… Ce qui était maigre vu les précédents mensonges du personnage.

Cependant, il devait aller de l’avant, il ne pouvait sans cesse reculer le moment de la rencontre, d’autant plus qu’il commençait à s’ennuyer ferme dans cet endroit.

Max sortit de sa chambre et ses pas le menèrent jusqu’à sa destination où Amigo l’attendait.


« C’est le grand jour. Pas trop nerveux ? demanda le médecin, un large sourire aux lèvres

— Un peu quand même.

— Ne t’inquiète pas, tout va bien se passer. Olga est très gentille, tu verras.

— Je reste combien de temps là-dedans ?

— Autant que nécessaire. Le premier contact est primordial. Mais ça, tu le sais déjà. Ne perdons plus de temps. Ne t’en fais pas, nous t’observerons avec attention et au moindre souci, nous interviendrons. Tu peux compter sur nous. Il est temps de poser ta pierre à l’édifice, conclut le docteur en tapotant l’épaule de son collègue.

— Alors allons-y. »


Après avoir vérifié une dernière fois l’étanchéité de la blouse, Amigo scanna sa rétine et une voix métallique annonça « identification correcte » avant que la porte ne s’ouvre. Le médecin s’écarta et laissa Max entrer.

Olga fermait les yeux et se tenait dans un coin de la pièce, recroquevillée sur elle-même. Le jeune homme s’approcha doucement d’elle avant de s’arrêter à une distance de trois mètres et l’étudia ; elle semblait paisible malgré la position inconfortable dans laquelle elle s’était installée. De l’extérieur rien n’indiquait cette tranquillité, mais ici Max le ressentait. Pour l’instant, il n’avait pas envie de briser cette unité, il prendrait le temps pour nouer le premier contact.

Soudain, Olga dut sentir une présence, car elle ouvrit les yeux.


« Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? Pourquoi suis-je ici ?

— Je m’appelle Max. Je ne vous veux aucun mal.

— Et cette combinaison ?

— Simple mesure de précaution. Elle n’est d’ailleurs pas très impressionnante.

— Précaution ? Vous croyez que je vais me jeter sur votre gorge pour vous dévorer ?

— Je vous le déconseille. Le tissu ne doit pas être très agréable au goût, tentai-je de détendre l’atmosphère.

Ce qui réussit car la jeune femme esquissa un sourire, cependant le masque de la gravité recouvrit rapidement son visage.

— Et ensuite ? Vous allez rester planté là à papoter avec moi dans cet accoutrement ridicule ?

— J’aimerais savoir comment vous vous sentez. Physiquement tout autant que moralement.

— Vous vous payez ma tête ?

— Je suis on ne peut plus sérieux. Je viens de débarquer dans cet endroit et l’on m’a conseillé de venir vous rendre visite.

— Conseiller vous dîtes ?

— Vous êtes perspicaces, je n’ai pas vraiment eu le choix. Mais là n’est pas la question. Je suis piégé donc autant remplir du mieux possible ma mission.

— Qui est ?

— De voir comment vous allez. Vous voyez, je ne demande pas grand-chose », dis-je en esquissant un sourire.


La captive se détendit et scrutait l’homme qui se tenait devant elle. Elle percevait qu’il n’était pas comme les autres, ceux qui l’observaient dans le couloir et lui donnaient à manger et à boire par la trappe de la porte : gobelets, assiette et couvert en plastique, nourriture insipide et eau calcaire.

De plus, pour la première fois depuis de longues semaines, quelqu’un lui adressait la parole. Alors même s’il était l’un des leurs, elle ne désirait pas le menacer, encore moins le blesser, d’autant plus qu’elle percevait chez cet homme une blessure profonde et ce malgré son apparence sereine. Ce qui la rendait curieuse. Elle souhaitait découvrir son secret, l’aider dans la mesure du possible ou s’en servir pour sortir d’ici. Elle jouerait le jeu et répondrait à ses questions banales, tout en le questionnant également. Elle était forte à ce jeu là d’après ses souvenirs.


« Commençons donc, décréta la jeune femme. Que désirez-vous savoir ?

— On vous traite bien ici ?

— On me donne à boire et à manger si c’est ce que vous voulez savoir. J’ai aussi droit à une salle de bain spartiate. Et j’ai un lit, pas de première jeunesse certes, mais ça va, dit-elle en me désignant un sommier métallique bancal auquel on avait jeté dessus un matelas miteux.

— Depuis combien de temps êtes-vous ici ?

— Quelques semaines sans doute. J’ai perdu mes repères temporels, je reste continuellement dans cette cellule où rien ne se passe. C’est long à force. Vous êtes ma première visite depuis mon arrivée ici.

— À votre avis, pourquoi êtes-vous ici ?

— Je n’en sais rien. Je ne sais pas pourquoi ils m’ont jeté ici. Vos collègues ne sont guère bavards.

— Ce ne… commença Max après avoir crispé ses poings avant de se reprendre. Passons à autre chose. Physiquement, vous vous sentez en forme ?

— Je ne m’inscrirais pas à un marathon, mais ça peut aller. Et vous ? Je ne vois pas trop vos traits, mais vous me semblez fatigué.

— C’est lié à la combinaison. Elle me fait transpirer.

— Vous pouvez l’enlever. Je ne vais pas vous mordre.

— Je suis sûr que non, mais il semble qu’on vous ait trouvé près d’une centrale nucléaire qui a eu un léger incident si j’ai bien compris.

— On vous a bien renseigné. Je ne m’en souviens plus.

— Vous comprendrez donc que je reste prudent, quitte à passez pour un clown à vos yeux.

— Je comprends, par contre sans vous vexer, je préfère ceux qui ont le nez rouge, lança Olga avec un clin d’œil.

— Moi aussi, répondit Max avec un autre clin d’œil. Et le moral ?

— Des hauts et des bas. J’aimerais avoir des réponses.

— Que vous a-t-on dit ?

— Ils m’ont trouvé, chez moi, en Sibérie, pratiquement congelé et au lieu de m’emmener à l’hôpital, ils m’ont conduit ici. Ils m’ont parlé de l’accident nucléaire et des radiations accumulées dans mon corps. Cependant, comme vous pouvez le constater, je me porte à merveille, du moins pour l’instant. Si on continue ce régime, je vais finir par vous ressembler ! »

Olga marquait un point, j’avais également perdu du poids depuis mon arrivée ici. Des rides creusaient mon front et mes veines se dessinaient sur mes avant-bras. Je devais me reprendre et regagner quelques kilogrammes, d’autant plus que les prochaines semaines risquaient d’être intenses. En attendant, cette première approche se passait bien, ce qui était plutôt bon signe. Je repris l’interrogatoire.

« Les hôpitaux de votre région ne possédaient pas le matériel pour vous décontaminer ?

— Sans doute, vu que j’ai été emmenée ici. Je n’en sais pas beaucoup plus. Je ne me souviens même plus de la décontamination, c’est vous dire.

— Vous blaguez là ?

— Vous pensez que je trouve ça drôle, se renfrogna Olga.

— Veuillez excusez mon indélicatesse. Je pense que je me souviendrais d’avoir passé le sas de décontamination, mais c’est logique que vu votre état, vous ne vous en rappelez plus.

— C’est bien dommage. J’aimerais me souvenir de plus de choses. Cela m’aiderait à savoir ce que je suis censé faire ici.

— Nous allons le découvrir ensemble mademoiselle.

— Mademoiselle ? C’est un peu désuet !

— Peut-être, en tout cas c’est affectueux pour moi.

— Si vous le dîtes. Et vous que venez-vous faire dans cette galère.

— Vous êtes assez directe. J’aime bien. Comprenez cependant que je ne peux répondre à cette question. Pour l’instant du moins, sourit le jeune homme.

— Quelle est la prochaine étape ?

— J’ai appris que l’on ne vous donnait que des compléments alimentaires. Après cette première entrevue, qui s’est bien passée, je pense réussir à convaincre les autres de vous donner un repas plus consistant.

— C’est vrai ? demanda la prisonnière, les prunelles remplies d’espoir.

— Je ne vous mentirais pas sur ce point. D’ici ce soir, vous aurez autre chose à vous mettre sous la dent. Je repasserais vous voir plus tard. D’ici là, portez-vous bien. »

Max se dirigea vers la sortie, mais la porte était bloquée. Olga se rapprochait de lui, il pouvait le sentir, et c’était sans doute pour cette raison que les autres ne déverrouillaient pas l’entrée.

« Au fait, quel est votre nom, moi c’est Olga.

— Max, je m’appelle Max, murmura le coordinateur. Que voulez-vous Olga ?

— Jouez avec vous voyons, ôtez cette combinaison qui masque votre visage.

— Vous n’y pensez pas, vous êtes peut-être encore contagieuse.

— La seule façon de le savoir, c’est de retirer cette combinaison », souffla Olga.

La jeune femme commença à remonter le zip de la fermeture lorsque l’obscurité s’abattit dans la pièce. La captive émit un feulement rageur et Max en profita pour s’échapper.

« Max, n’ayez pas peur. Je ne vous veux aucun mal. C’est plus pratique de se parler sans artifice, n’est-ce pas ?


Le jeune homme ne répondit pas, cherchant à occuper un coin le plus discrètement possible. Si Amigo avait dit vrai, il existait une issue de secours, une porte dissimulée qui lui permettrait de quitter cette cellule. S’il avait dit vrai… Mais le doute l’envahit, ce serait trop facile pour la prisonnière de s’échapper si c’était si simple. En vérité, il s’était jeté dans la gueule du loup. Olga ne connaissait rien de ses dons, et elle aspirerait son énergie sans le moindre problème. Il devait se tenir le plus éloigné d’elle, le temps de trouver une solution, si celle-ci existait !

Olga minaudait toujours, tout en écoutant le moindre bruit. La cellule n’était pas si grande et il lui serait facile de débusquer l’ennemi pour lui sauter dessus, lui retirer sa combinaison. Mais après ? Même si les radiations qu’elles portaient en elle le tueraient, comment pourrait-elle s’en servir pour s’échapper ? Cependant, elle trouverait au moins une réponse, elle saurait si ce que l’on avait raconté était vrai, si elle était réellement radioactive ou si ce n’était qu’une excuse pour la garder prisonnière. Et dans ce cas, qu’attendait-on d’elle ?

Elle éprouva cependant un malaise, des vertiges la gagnèrent subitement, sa gorge s’assécha. Elle hurla en s’écroulant par terre. Du gaz ! Ces salauds avaient profité de l’obscurité pour l’asphyxier et elle n’en était même pas rendu compte, absorbé dans ses pensées et sa chasse à l’homme. Elle rampa désespérément à la recherche de celui qu’elle tenait responsable. Elle désirait savoir si on lui avait menti, mais elle ne put arriver jusqu’à lui : les émanations la firent sombrer avant.

Puis les lumières se rallumèrent et la porte s’ouvrit. Amigo entra dans la pièce suivi par deux costauds et emmenèrent de force Max.

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