La seule

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11 mars, Sainte-Clotilde-de-Beauce, Québec, Canada.

À l'autre bout du monde, enfouies sous des couvertures, deux femmes de notre connaissance savouraient leurs retrouvailles. Sun Mei, serait entre ses doigts la main potelée de son épousée. Leurs deux poings ne formaient plus qu'un au-dessus de leurs corps enlacés.

Un rayon de soleil matinal s'échappa d'un interstice entre les volets pour se déposer dans les cheveux de Maisie. Sun Mei y glissa la main pour tenter de l'attraper. Peine perdue, la lumière ne se laissait pas faire.

La jeune femme joua quelques temps avec les cheveux roux de sa femme tandis que cette dernière savourait cet instant.

— Je pourrais passer ma vie comme ça, murmura-t-elle dans le creux de l'oreille de Sun Mei.

Celle-ci arrêta de toucher ses cheveux pour se relever sur un coude.

— On pourrait... Viens avec moi.

— Où ça ?

— À Reppe. Dans la maison.

— Non.

— Pourquoi non ? Tu ne veux même pas y réfléchir ?

Maisie se releva et elles se retrouvèrent l'une en face de l'autre, leurs regards parfaitement aimantés.

— Parce que je ne veux pas me retrouver dans une maison avec cinq autres filles et toi. Parce que je te veux seulement toi.

Elle s'assit sur le rebord du lit, tournant à moitié le dos à Sun Mei.

— Tu repars dans une quinzaine pour préparer votre nouvel album. Si je viens avec toi, quand est-ce que je pourrais te voir ? Quels moments on aura seules toutes les deux ? Le soir, tu rentreras fatiguée. Qu'est-ce que ça aura changé que je sois venue maintenant ou trois semaines plus tard pour les répétitions de danse et le tournage d'un clip ? Rien. Parce qu'on n'aura même pas eu le temps de se voir autrement qu'au détour d'une porte.

Elle se tut et Sun Mei se releva complètement pour enlacer de ses bras minces la taille de la canadienne. Son souffle chatouilla délicieusement la nuque de la jeune femme quand la chinoise murmura :

— Si c'est vraiment ce que tu ressens, je pourrais arrêter le groupe...

Elle laissa sa phrase en supsens et Maisie régit au quart de tour.

— Tu ne peux pas lâcher KOBSE ! Ça fait sept ans que tu vis de musique, tu n'y survivrais même pas.

— Je n'ai pas dit que je devais arrêter la musique.

— Et les filles ? Blake, Honor, Felicia et Ekaterina, tu vas les abandonner ?

Sun Mei soupira.

— Tout n'est pas encore au point. Mais tu sais, pour moi, il n'y a qu'une femme que je ne voudrais jamais laisser tomber.

Sur ce, elle déposa un léger baiser sur le menton de Maisie.

— On devrait se lever, répondit celle-ci sans pourtant bouger. Je n'ai pas envie que Cerise ou Marius débarquent ici en criant que Tata Suny doit absolument venir voir leur dessin.

Mais aucune ne bougea, si ce n'était leurs sourires qui s'élargissaient au fur et à mesure que leur étreinte paisible se prolongeait.

À quelques pièces de là, des gargouillis de joie enfantins leur parvinrent. Elles se détachèrent l'une de l'autre avec regret.

— Qu'est-ce que c'est que ces gamins qui se lèvent tôt le matin ? souffla Sun Mei en fouillant dans son placard pour trouver sa tenue. Ils ne peuvent pas dormir jusqu'à dix heures comme tous les enfants et laisser les grandes personnes entre elles ?

— C'est ça d'avoir un père boulanger. Se lever aux aurores c'est la coutume dans la famille.

Maisie finit de lacer ses chaussures, embrassa sa femme sur le front puis sortit dans la chambre en veillant bien à fermer la porte. Déjà, des « Tata Mézi ! » plein d'entrain résonnaient dans le couloir.

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