La pluie
2008
La pluie tombe en abondance. J'entends le tonnerre au loin.
J'avance sous les trombes d'eau. Les cours se sont arrêtés vers 14h à cause de l'absence de plusieurs professeurs. La quasi totalité de la classe a préféré aller en salle d'étude en attendant les bus vers 15h30, pour pouvoir rentrer au sec. Pour moi, pas question de rester dans le collège. Plutôt l'orage que la compagnie de débiles qui me servent de "camarades de classe". Ils ne m'aiment pas et c'est réciproque. Du coup, même si j'ai 50 minutes de marche sous l'averse, je trouve ça plus agréable que leur présence.
S'il y a bien un cliché de vrai sur la Normandie, c'est bien qu'il flotte tout le temps. Même si c'est vrai qu'aujourd'hui, c'est particulièrement violent. Je suis totalement trempé. J'ai du enlever mes écouteurs MP3 pour éviter de les flinguer avec ce déluge.
Un éclair déchire le ciel au loin.Cela ne me fait rien .J'ai l'habitude. La pluie s'intensifie encore, alors que je pensais qu'elle était déjà au maximum. Le vent souffle plus fort et m'envoie des gouttes en pleine tronche. Et je continue d'avancer vers mon chez moi.
Des fois, je me dis que je suis comme ce temps de merde. Indésirable, effrayant et qui fait fuir les gens.
J'ai 14 ans... ! Quel âge pourri !
***
2018
Je fume à ma fenêtre en regardant le ballet incessant des voitures dont les propriètaires se pressent de retourner chez eux pour se mettre à l'abri du déluge.
Un éclair, suivit d'un coup de tonnerre. C'est proche. Enfin, je suis à l'abri et je ne risque rien. Je regarde la pluie, un vrai mur d'eau. Je repense aux nombres de fois où j'ai marché sous ce genre de temps dégueulasse. On est au printemps mais la météo est catastrophique.
"40 jours et 40 nuits de pluie. Dans la Bible, c'est le Déluge. En Normandie, c'est l'été."
Cette phrase de mon père me fera toujours autant rire.
Une tête passe par l'entrebaillement de la porte. Ma copine me dit qu'elle m'attend, on a une série en cours. Je lui dis que j'arrive après avoir fini ma roulée.
Je jette un nouveau regard sur le ciel orageux. Curieusement, ça m'est devenu complètement indifférent ce genre de temps. Je ne m'y identifie plus comme il y a des années.
J'écrase mon mégot dans le cendrier. Je vais la rejoindre.
J'ai 24 ans... Et je suis amoureux.
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