I

Une minute de lecture

Sur l’ubac d’une montagne enneigée se trouvait Tellas, un établissement pénitentiaire de l’ombre.

De massifs agrégats incolores s’amoncelaient de part et d’autre formant une barrière inexpugnable. Les rafales de vent charriaient un froid rigoureux comme si Aquilon lui-même soufflait sur cette cime éclipsée. L’immense structure noire charbonnée semblait tutoyer les nuages. De fragiles particules poudreuses voletaient autour des séracs irréguliers et venaient l’habiller par endroit. Faite d’onyx ténébreux et veinée d’un rouge carmin, elle était constamment dissimulée par une brume opaque. De fins étendards gélifs se dressaient fièrement et déployaient leurs clairs-obscurs menaçants. En leur centre se trouvait une tête de mort dont la mâchoire serrait un bouquet d’arums, les fleurs symbolisant les âmes des défunts.

Aux alentours siégeaient de grands saules pleureurs, leurs branches-lianes pendantes recouvertes d’un givre permanent et luisant. En contrebas, la neige s’effritait continuellement. Les flocons glissaient comme si la montagne elle-même pleurait la présence de cette architecture sépulcrale.

Depuis des siècles, les pires criminels étaient jetés à l’intérieur et croupissaient jusqu’à la fin. Morts pour la société ou enfermés dans une prison dite « normale », la vérité était toute autre. Les serials killers ayant terrorisé les populations du monde entier se voyaient encagés dans cette prison mortifère. Un Purgatoire antithétique où les âmes corrompues ne pouvaient ni expier ni purifier leurs péchés.

Les tueurs de masse les plus prolifiques étaient réunis. « Le Docteur la Mort », le fou qui injectait des doses mortelles de morphine et était responsable de plus de trois cents meurtres. « Le Monstre de Genova », l’aliéné ayant massacré près de deux cents enfants, liste encore non exhaustive actuellement. « L’Ogre de Rostov », docteur en philosophie aux mœurs écœurantes qui violait enfants et adolescents avant de les tuer. « Le Cannibale de Milwaukee », alcoolique notoire adepte de nécrophilie qui découpait et se délectait de ses victimes. Tant de détraqués de la même trempe.

La fange de l’humanité entre quatre murs.

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