Plan d'action

5 minutes de lecture

Vieille-Toulouse

Igor avait été surpris par le contrôle subi la veille au soir, mais après coup, il s’était félicité d’avoir replacé les plaques d’immatriculation originales sur le véhicule. Après tout, il avait une situation régulière en France et il n’était pas vraiment nécessaire de prendre des risques de ce genre. Il avait eu des nouvelles de Grishka qui, depuis le chalet de Courchevel, se plaignait de la vie que lui faisait mener Olga.

« Je n’en peux plus. Depuis que nous sommes arrivés, elle est sortie tous les soirs et nous sommes rentrés à des heures pas possibles. Elle dort jusqu’au début de l’après-midi et ensuite, je dois l’accompagner dans les boutiques et porter les paquets.

— Je vais en parler au patron, mais je suis à peu près certain de sa réponse, répondit Igor.

— Peut-être qu’il vaut mieux ne pas le remonter à Alexander, mais j’ai aussi dû éloigner quelques hommes qui tournaient un peu trop près d’elle.

— Mais tu n’as fait que ton travail ! Essaie juste que ça ne laisse pas de séquelles fâcheuses. On a assez de soucis comme ça à Toulouse.

— Et ça va durer encore longtemps ?

— Je n’en ai aucune idée, quelques jours, quelques semaines… Quand la neige aura fondu, vous pourrez aller à Cannes ou à Ibiza. »

Le garde sur le chemin menant à la résidence des Leonorov lui fit signe de s’arrêter et ne s’écarta du chemin qu’après l’avoir reconnu. Une bonne chose, pensa Igor, la sécurité est renforcée.

« Salut Orlov, est-ce que tu as eu des visites non prévues ces derniers temps ?

— Non, à part les fournisseurs habituels, mais je connais leurs véhicules. Ah, si, hier après midi, deux jeunes femmes qui avaient l’air un peu égarées. Elles ont fait demi-tour sans insister.

— Quel genre ces femmes ?

— Plutôt mignonnes, bien habillées, la trentaine, elles roulaient dans une Mini récente.

— Genre arabe ?

— Je ne peux pas dire, elles pourraient tout aussi bien être d’ici ou Espagnoles…

— OK, merci. Préviens-moi si d’autres véhicules se présentent comme ça à l’improviste. »

La Range Rover continua sur le chemin. Igor se présenta dans l’interphone et le portail s’ouvrit. Un homme armé lui fit signe de s’arrêter. Igor reconnut l’un des gardes du corps arrivé de la Côte d’Azur la veille.

« Je suis Igor, le chef de la sécurité. Ton patron en quelque sorte.

— Désolé, Igor, j’ai des consignes strictes. Je ne connaissais pas encore votre voiture.

— Pas de problème, je préfère que tu fasses ton travail correctement. »

Igor trouva Alexander dans sa pièce de travail.

« Sdorówo, Alexander. J’ai pu tester le nouveau dispositif de sécurité, ça me parait rassurant. Même moi, j’ai du m’arrêter à deux reprises.

— Oui, je sais, répondis Alexander agacé, mon chauffeur a dû stopper quand nous sommes revenus du golf !

— C’est pour ton bien. J’espère que ça ne durera pas trop longtemps. As-tu des nouvelles d’Olga ?

— Ne m’en parle pas ! Elle m’appelle quatre fois par jour. Il n’y a que le matin que je suis tranquille. Elle me dit qu’elle s’ennuie à mourir.

— Regarde ton relevé de carte bancaire, tu verras comment elle trompe son ennui ! J’ai eu Grishka tout à l’heure, il est à deux doigts de démissionner, à moins qu'il ne fasse un burn-out !

— Je suppose que tu sais que la police a retrouvé Youri.

— Non, je n’ai pas été averti. Où ?

— C’est le père Andreï qui m’a prévenu. On a déposé le corps de Youri devant l’entrée de son église.

— Comment a-t-il fait le lien avec toi ?

— Je vais à la messe de temps en temps, et je donne beaucoup pour ses œuvres. Youri aussi était assez religieux, malgré ses activités. Il nous a déjà vu parler ensemble lors des cérémonies.

— Heureusement que les flics, eux, ne fréquent pas cette église. Ce n’est qu’une question de temps, ils finiront par l’identifier. J’ai réussi à avoir des nouvelles de Tania. Elle ne va pas très fort. Pour le moment elle est dans le coma et sa chambre est surveillée par la police.

— Tu es allé à l’hôpital ?

— Pas en personne, non. J’ai envoyé une fille que je connais et qui s’est fait passer pour une amie de Tania. Elle a pu parler rapidement à une infirmière du service et elle a vu le planton en uniforme au bout du couloir. Elle n’en a pas demandé davantage et elle est repartie. Sinon, as-tu eu des nouvelles de ton cousin de Madrid ?

— Oui, Maxim m’a téléphoné ce matin. Il n’a pas encore obtenu tous les détails, mais il m’a expliqué comment se passaient les transports en général. Les marchandises qui arrivent du Maroc transitent par Tanger et Algesiras. Celles qui viennent d’Algérie arrivent généralement à Almeria. Les véhicules qui livrent Belkacem passent ensuite par Alicante où les cargaisons sont regroupées. Les camions remontent le long de la côte vers Barcelone et Perpignan. Quelques chargements transitent par le centre de l’Espagne, mais c’est assez rare, sauf s'ils doivent aller vers Bordeaux. Les camions ordinaires roulent à leur rythme, sans organisation particulière. Pour les cargaisons qui nous intéressent, ils forment une sorte de convoi avec un chargement banalisé en éclaireur. En cas d’imprévu, le second camion a le temps de se dérouter avant d’être intercepté.

— Il faut donc repérer des expéditions groupées à Alicante ?

— Sans doute, et ce n’est pas évident. On ne peut pas infiltrer des hommes à nous dans ce milieu. Il faut au minimum des Espagnols.

— Qu’en pense Maxim ?

— Il dit que ce n’est pas facile, mais faisable si on y met le prix.

— Les chauffeurs sont dans la combine ?

— Forcément, s’ils doivent quitter l’autoroute à l’improviste, ils savent bien que ce n’est pas pour éviter un bouchon.

— Tous les hommes ont une faiblesse, l’argent, les femmes ou autre chose. Ça vaut le coup d’essayer. Il suffirait de mettre un traceur sur la remorque. On ne pourra pas les arrêter sur l’autoroute, mais les routiers sont bien obligés de faire des pauses. Ils ne font pas Alicante-Toulouse d’une seule traite. Même s’ils sont deux au volant, ils doivent bien aller pisser et refaire le plein de carburant.

— Et si on y arrive, demanda Alexander, qu’est-ce qu’on fait du camion ?

— Si tu es intéressé par la marchandise, on la récupère pour notre compte, sinon, on se contente d’y mettre le feu. Le but est bien de montrer à Belkacem qu’on peut frapper ses lignes d’approvisionnement ?

— Oui, c’est l’idée !

— Alors il faut y aller et le plus tôt sera le mieux. Tu veux laisser Maxim s’en occuper ?

— Non, je pense qu’il vaut mieux que tu supervises l’opération, Maxim n’est pas un homme de terrain.

— Dans ce cas, préviens-le. Je peux être chez lui lundi midi, même avant si nécessaire. »

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Eros Walker ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0