Nouvelle arrestation

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Toulouse, Quartier des Trois Cocus & Hôtel de Police

Juliette Delhuine conduisait doucement, soucieuse d’éviter tout incident en remontant la rue Ernest Renan. De tous côtés cyclistes et trottinettes électriques slalomaient pour éviter les femmes portant l’abaya qui accompagnaient les jeunes enfants à l’école voisine, leurs poussettes devant elles. La capitaine savait qu’à tout moment, l’un d’entre eux pouvait surgir entre les voitures en stationnement. D’un coup d’œil, elle s’assura que Lacaze et Diallo étaient bien derrière eux.

« Tu crois qu’on va le trouver chez lui, en train de boire son café ? demanda le brigadier Bertrane.

— Non, mais il faut tout de même s’en assurer, répondit Juliette.

— On arrive, prends à droite, le deuxième immeuble.

— On n’aurait pas été plus repérables avec les gyrophares, commenta la chef de groupe en se garant. »

Le lieutenant Lacaze stoppa derrière elle et la grande carcasse d’Ibrahim sortit péniblement du côté passager.

« Putain, Olivier, tu étais obligé de prendre la Clio ? plaisanta Diallo.

— Juliette était passée avant moi et avait déjà raflé les clés de la Megane. »

Les deux hommes rejoignirent la capitaine au pied de l’immeuble. Quatre paires d’yeux ne les lâchaient pas un instant.

« V’z’êtes des keufs ? demanda un gamin d’à peine treize ans.

— Oui, répondit Lacaze et toi tu devrais être au collège non ?

— Les profs sont trop nuls !

— Pas la peine de monter à quatre, déclara Juliette, Ibrahim, j’aime autant que tu restes en bas à faire la conversation avec les gamins, tu les éduqueras un peu.

— T’as peur qu’ils nous piquent les essuie-glaces ?

— Y a un peu de ça aussi… »

Bertrane trouva le nom de Soukhane sur une boîte à lettres miraculeusement épargnée. L’appartement était au troisième étage. Les policiers ignorèrent l’ascenseur et montèrent à pied. La cage d’escalier était plutôt bien tenue et les murs étaient propres. Juliette se demanda si c’était par respect pour l’hôte qui motivait leur visite. Juliette sonna et une femme jeune, habillée à l’occidentale vint leur ouvrir très vite.

« Bonjour Madame, je suis la capitaine Delhuine, police judiciaire. Je souhaiterais parler à Monsieur Kamel Soukhane. C’est votre mari ?

— Je suis sa fille. Il n’est pas là actuellement. Il est parti au travail depuis longtemps. Il travaille au marché.

— Pour l’entreprise Belkacem ?

— Oui, c’est cela. Qu’est-ce que vous lui voulez ? »

Juliette ne répondit pas et se hâta pour redescendre.

« On file chez Belkacem, c’est tout près. La fille va prévenir Kamel, on a peut être une chance de le coincer avant. Deux tons et gyro. »

Moins de cinq minutes plus tard, les voitures des policiers s’engageaient sur le parking de l’entreprise de primeurs au moment où une Dacia noire manœuvrait pour en sortir. Juliette arrêta son véhicule de façon à bloquer le fuyard et les quatre policiers se précipitèrent l’arme au poing. Soukhane n’opposa pas de résistance.

« Pourquoi est-ce que je suis à nouveau ici ? demanda Soukhane quand il fût installé dans une petite salle, en face de Juliette et Olivier. Vous m’avez déjà interrogé il y a deux jours.

— Oui, c’est vrai, mais il y a dans la pièce d’à côté un jeune homme qui nous a parlé de toi.

— Oui, et alors, j’aide beaucoup de jeunes qui ont du mal à s’en sortir. Je ne vois pas en quoi ça vous concerne.

— C’est vrai, tu donnes du travail à des étudiants qui ne peuvent pas financer leurs études ! ricana Lacaze.

— Un genre de petit Amazon de la dope, compléta Delhuine, je commande depuis mon portable et je me fais livrer dans un point relais.

— C’est n’importe quoi ! se défendit Soukhane.

— Il a confirmé ce qui s’est passé sur le parking et nous a précisé que c’était bien toi qui conduisait.

— Et il vous a donné mon nom et mon adresse ?

— Il a reconnu ta photo au premier regard ! répondit la capitaine.

— Et alors, on fait un peu de business, ça fait pas de moi un tueur.

— Je te rappelle qu’une femme a été poignardée et qu’un homme a été enlevé. La scientifique a déjà commencé à examiner ta voiture, elle risque de trouver des cheveux ou des empreintes, celles d’un Russe retrouvé devant l’église orthodoxe, après être passé par une certaine épicerie où il se pourrait bien qu’on retrouve aussi tes traces.

— Comment s’appelle la femme de ton commando ? demanda Lacaze. Celle qui donne le coup de poignard. C’est pas du travail d’amateur. La victime est sortie du coma, bluffa le lieutenant, elle pourra sûrement reconnaître ses agresseurs. On va lui montrer les photos du personnel de Belkacem.

— Je ne vois pas de qui vous parlez, répondit Soukhane calmement, mon patron n’emploie pas ce genre de personnes.

— Non, Aboubaker fait du négoce de fruits et légumes, on le sait, mais pourtant quelqu’un a égorgé son fils dans son camion. Pour prendre sa place sur le marché Cristal ? demanda Juliette.

— Peut-être, c’est un milieu qui n’est pas très raffiné !

— Pour le moment, tu vas rester avec nous le temps d’avoir le résultat des analyses techniques, pendant ce temps là, nous on va aller parler à ton collègue Zekkal, un autre de vos amis nous a donné son nom. J’espère que votre patron n’avait pas trop besoin de vous pour les jours à venir, vous risquez d’être indisponibles pour un moment. On va aussi éplucher le fichier du personnel, souhaitons qu’Aboubaker soit à jour de ses cotisations. En attendant le lieutenant va s’occuper de la procédure, à partir de maintenant, tu es officiellement en garde à vue. »

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