Chapitre 35 (deuxième partie)

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Après le repas, tout le groupe des Gardiens, des appelés, ainsi que Kaïra et sa petite escorte gagnent la grande cour du palais. Là, un autel a été dressé, qui supporte la dépouille du prince Galiané. Même si elle ne le portait pas dans son cœur, la jeune reine est attristée par cette mort : le prince a péri au cours de la bataille de Rankir, en ses propres terres, alors qu'il était venu chercher auprès d'elle une alliance et une caution pour son règne. Il était l'héritier, celui auquel revenait de facto la couronne royale. Mais la jalousie de son frère et la soif de pouvoir des deux princes ont conduit à cette mort.

Dans la cour se trouvent aussi de nombreux dignitaires du régime, des personnalités importantes de la ville. Au-delà, chacun le perçoit, se rassemble la foule des petites gens de Sala et même des environs. Tous veulent rendre hommage au prince.

Enfin, la famille royale apparaît, entourée de quelques proches. La princesse Jébora est là, très autoritaire et royale. Kaïra ne peut s'empêcher de penser que, malgré le masque de tristesse qu'elle affiche, la princesse n'est pas sans se réjouir de ce décès : un des prétendants est maintenant tombé, ne restent plus que Bramé, Jarbek et elle-même. Kaïra frissonne en regardant le tout jeune prince aux côtés de sa sœur : ne va-t-il pas, à son tour, être menacé ? Elle aimerait qu'il puisse bénéficier de la protection des Gardiens et ignore encore que le Grand Maître y veille.

La cérémonie commence par une longue litanie, un rappel des hauts faits du prince. Puis viennent des prières et un moment de recueillement. Jébora a demandé au Grand Maître de marquer la cérémonie par un hommage spécifique des Gardiens, ce que ce dernier a volontiers accepté. Alors que chacun s'avance enfin pour se recueillir un dernier instant devant la dépouille, on entend soudain de grands bruits provenir de la ville. Aussitôt, les gardes se rassemblent autour de la cour et les Gardiens se mettent eux aussi sur la défensive. Owen est proche de Kaïra et lui dit :

- Restez près de moi, ma reine. Restez au milieu des Gardiens.

Olaf s'est porté aux côtés d'Owen, de même qu'Adena. Alana quant à elle s'est rapprochée du prince Jarbek et deux autres Gardiens entourent la princesse Jébora. Le Grand Maître se tient également près d'elle. Le galop de plusieurs chevaux se fait entendre sur les pavés et, bientôt, on voit entrer une petite troupe dans la cour. A sa tête, le prince Bramé, accompagné de quelques-uns de ses fidèles, nobles de haut rang pour la plupart, et de son âme damnée, Messiar.

A peine son cheval est-il arrêté que Bramé en descend et s'approche de Jébora et de Jarbek.

- Ma chère sœur, mon cher frère, je suis venu aussi vite que j'ai pu, dès que j'ai appris la terrible nouvelle. Mais j'arrive trop tard pour suivre la cérémonie. Permettez cependant que je m'incline à mon tour devant la dépouille de notre frère bien aimé.

- Vous le pouvez, mon frère, dit Jébora avec condescendance. Mais peut-être l'avez-vous revu bien avant nous...

- Comment cela ?

- Il est tombé devant Rankir. Vous y étiez vous aussi...

Une lueur mauvaise s'allume dans le regard de Bramé et le Grand Maître se demande si ce dernier ne va pas se mettre en colère. Jébora le soupçonne très clairement d'être mêlé à la mort de Galiané.

- Ce fut une terrible bataille, mais j'ai pu rejoindre Salarin sain et sauf, dit simplement Bramé. Ignorant encore la mort de notre frère, je me suis rendu dans mes terres, à Ménaru. Jusqu'à ce que j'apprenne son décès et décide de faire grand chemin jusqu'ici. Nous avons besoin d'être réunis, je crois.

Jébora le regarde d'un air hautain. Mais après tout... Bramé est ici dans une ville qui lui est hostile. Elle, elle saura la tenir et peut-être plus. Sans compter qu'elle bénéficie, plus ou moins, de l'appui des Gardiens : elle sait le Grand Maître attaché à maintenir la paix, même si les armes sont sorties, et les hommes prêts au combat.

**

Jarbek est resté en arrière, mais n'a rien perdu de ce qui s'est déroulé devant ses yeux. Alors que sa sœur et son frère gagnent la salle du trône, accompagnés par plusieurs Gardiens dont le Grand Maître, il s'avance vers Kaïra, restée dans la cour avec Owen et Olaf.

- Majesté, je suis heureux de vous revoir, même si les circonstances sont graves et tristes, dit-il.

- Je suis heureuse de vous revoir aussi, Prince Jarbek, et je m'inquiétais pour vous. Comment allez-vous ?

- Je vais bien, mais venez, rentrons, nous serons mieux au palais pour parler un moment.

Et Jarbek conduit Kaïra jusqu'à un des salons de ses propres appartements. D'un accord tacite, Owen et Olaf l'ont accompagnée. Une fois qu'ils ont pris place dans de confortables fauteuils, le prince commence :

- J'ai entendu dire de graves choses sur ce qui s'était passé dans votre royaume, Majesté, et j'en suis profondément attristé. Nous sommes voisins et j'aimerais tant que nous puissions vivre en paix !

- Je le souhaite aussi, Prince Jarbek, mais je crains que d'autres gens n'aient pas ce souci en tête et ne préfèrent la guerre à la construction de la paix.

- Qu'est-il arrivé de si terrible ?

Kaïra soupire et se tourne vers les deux Gardiens. Son regard empli de tristesse les émeut et Owen prend alors la parole. Succinctement, il raconte à Jarbek ce qui est survenu. Ce récit est plus conforme à l'idée que Kaïra s'en faisait et bien différent de ce qu'il a livré aux Gardiens le matin-même. Car il n'est en effet pas question de parler des ondes, des auras, des Esprits, de prémonition et de magie. Au fil des mots, le visage de Jarbek se creuse et quand Owen termine, il dit :

- C'est encore pire que ce que je pensais. Si je peux vous être d'une aide quelconque pour reconstruire et panser ce qui pourra l'être... Vous pouvez compter sur moi ! dit-il avec force et conviction.

- Je vous remercie, Prince Jarbek, je suis très touchée par ce que vous me dites et par la marque d'amitié que vous offrez à mon peuple. Je ne l'oublierai pas, dit Kaïra avec sincérité.

Olaf demande alors :

- Prince Jarbek, l'un des nôtres se trouvait près de vous, il y a encore peu et il est décédé ici. Le Grand Maître nous l'a appris. Comment cela est-il survenu ?

Intérieurement, Owen acquiesce à la question d'Olaf : cela va leur permettre de connaître certains détails des circonstances de la mort d'Onev, que le Grand Maître n'a pas encore eu le temps de leur transmettre. Ils savent l'un comme l'autre que le temps leur est précieux, d'autant que Bramé se trouve désormais dans Sala. Le Seigneur des Ténèbres peut à nouveau surgir, à tout moment.

Jarbek raconte sensiblement le même récit aux deux Gardiens et à la reine que ce qu'il a livré au Grand Maître. Mais il tait le fait d'avoir gardé les affaires d'Onev, pensant que cela n'a pas d'importance. Ce sera le Grand Maître qui, quelques heures plus tard, leur dira avoir récupéré le disque du Gardien.

Alors que Kaïra s'enquiert des circonstances de la mort de Galiané, on frappe à la porte. Un serviteur vient annoncer que la princesse Jébora a fait préparer une chambre pour Kaïra et ses suivantes, à côté des appartements dévolus aux Gardiens, et que la reine peut s'y rendre dès qu'elle le souhaitera. Ils ne tardent pas à prendre congé du prince, d'autant que le soir arrive et qu'un repas est prévu pour tous, dans la grande salle de réception du palais. Il sera cependant très simple, compte tenu du deuil. L'enterrement de Galiané est prévu pour le lendemain.

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