Écrire et publier
Écrire un livre ça fait mal.
Écrire un livre ça fait peur.
Écrire un livre fait du bien.
Écrire un livre rend léger.
Publier son livre crée de l’ambivalence.
Publier son livre fait vibrer.
Oui, en écrivant mon livre j'ai eu mal.
J'ai eu mal à force de repenser à des situations douloureuses, souvent bouleversantes, toujours émouvantes. J'ai eu mal au dos, aux doigts, aux yeux, a la tête, à force de composer sur mon clavier déchainé, à faire glisser la mine de mon crayon use, à épuiser mes yeux devant ces mots posés. J’ai eu mal à chaque fois que je baissais les bras, que je voulais abandonner, que je m’infliger des tortures internes pour légitimer mon arrêt de projet. J’ai eu mal en me confrontant à ce moi écrivain que je ne connaissais pas, qui me ressemblait mais échappait à mon contrôle.
Oui, en écrivant mon livre j'ai eu peur.
Peur d'affronter a nouveau mes histoires du passé. Peur de les voir exposées à ces autres inconnus. J'ai eu peur de vous. De votre regard, de vos pensées, de vos retours. J'ai eu peur de voir échapper cette part de moi, que cette vie là ne m’appartienne plus, qu’elle soit utilisée, exposée, détournée, jugée ou bien trop saccagée. J’ai eu peur de transformer la réalité, de déformer des ressentis, de m’éloigner du réel au profit de l’histoire. J’ai eu peur de moi, que mes biais cognitifs s’immiscent dans ce projet, que mes limites s’imposent dans ce livre, que mes angoisses me poussent à arrêter.
Oui, écrire mon livre m’a fait du bien.
En écrivant j'ai eu plaisir à poser ces mots sur ce papier vide. Ils ont défilé sans contraintes, sans prévenir, sans retenues, s’alignant pour fournir un contexte a des vies parfois trop chaotiques. Tous ces mots tournoyaient gravés là a jamais ces histoires tourmentées pour ne pas oublier. J'ai pris plaisir à ressentir à nouveaux ces émotions du passé, intactes et précieuses qui au travers des mots se réinventées. J’ai pris plaisir à observer ce moi écrivain qui s’exprimait, cette partie inconnue est venue me compléter.
Oui, écrire ce livre m’a allégé.
Tout ce poids de mémoire est posé pour toujours en ces pages partagées. Je ne suis plus seule à porter le souvenir de ces vies mouvementées. Allégée, gratifiée, j'en ai fait un challenge, relevé, achevé, glorifié, il est à vous, à votre portée.
Aujourd’hui ce livre ne m’appartient plus, faites le vôtre, faites-le vivre.
Ingrid Romane.
Annotations
Versions