La Bouteille
La bouteille, cet élément façonné par l’homme en quantité astronomique n’avait pas un grand interêt, garde-t’on par exemple l’emballage du gâteau, même lorsqu’il s’agit de son anniversaire ? C’est une bonne comparaison... J’avais sauvegardé le message bien précieusement dans une poche intérieure de ma veste et après avoir effectué un voyage express en ma compagnie et dans l’avion qui me ramenait en France, je le rangeait à un endroit adéquat dans mon bureau.
Je fût trop fatigué les deux premières nuits à mon retour à la maison, bien que la première fût assez mouvementée d’après Shooka... Donc je ne fit aucun rêve, autant que je puisse m’en souvenir. Mais cette troisième nuit Shooka était partie à la soirée d’Ana, notre correspondante espagnole, qui semble t’il a un mode de vie plus tardif, plutôt nocturne que diurne, bref, quelle différence ? Vous me suivez... Ce qui ne me déplaisait guère car j’avais une plage de temps libre pour replonger dans mon étude sur les tablettes de l’île de Pâques avec plus de concentration. En effet aujourd’hui il semble que je fasse partie des premiers à avoir partiellement déchiffré une infime fraction du voile qui recouvre ces signes, la population avait été totalement massacrée en 1862 par des équipages péruviens. N’empêche qu’au bout de 20 ans de recherches... En fait la fatigue avait eu raison de moi cette troisième nuit, mais je m’endormais seul sur ma chaise et... Barou ce loup bleu réapparu soudain.
Soit je fût drogué, soit je devenais fou, soit quelqu’un me faisait une grosse blague, soit :
Barou était dans notre maison, ces yeux jaunes et sa fourrure bleue le rendait encore plus surréaliste que jamais, mais profita de mon sommeil pour me tirer jusqu’à la chambre, sa mâchoire, s’était resserrée sur mon gilet noir, et l'avait certainement déchiré.
Et le coup de projecteur au sens propre me fit écarquiller les yeux : sur notre écran de la chambre que j’avais installé à la demande de Shooka pour nos soirées cinéma servi de support à ce voyage sous l’océan, le parcours de la bouteille depuis le phare de la Hague, ayant réussi à joindre la plage d’Isabella, au Brésil jusqu’à ce que j’en fusse le destinataire :
Une vague heurta le rocher, l’écume se dissipa...Un temps soit peu entre deux coll... Aux lueurs du crépuscule, la bête prodigieuse leva la tête vers le haut du phare Etc. Ainsi donc tout commença avec le voyage de cette bouteille... Barou jeta la Bouteille du haut du phare.
Splash, gloup,gloups, glo...Glo...Gl...
La marée et ses courants m’entraîne, poc...poc... Je gagne les profondeurs, bien que le fond soit rocheux je continue mon avancée vers les profondeurs. Comment se fait-il que je ne flotte pas ? La lumière disparaît brutalement de l’intérieur, le message est toujours au sec, mais la lumière a disparu. Puis la lumière reviens doucement, les tentacules d’un poulpe lâchent prise et à grande vitesse la lumière fait son retour et moi regagne la surface, me voici maintenant à presque trois mille nautique de la côte normande, ballotée entre quelques vagues, je suis le message et la mer le messager:
«Alex, la mer transporte une bouteille, cette bouteille façonnée par l’homme contient un message écrit par l’homme : toi le receveur de ce message sache que la mer est notre messager, le messager de tous les êtres sur la Terre, la mer c’est la Terre, si tu lui transmets un message d’amour il ira jusqu’à toutes les femmes et tous les hommes, mais il en sera de même si tu lui transmets un message de haine ou destructeur. La mer est notre messager, transmettons un message d’amour universel aussi pour elle, de paix et respectons notre mer à tous, elle est le messager de tous les êtres vivants, qu’ils soient terrestres ou marins ou amphibiens. Notre messager universel depuis toujours ce n’est ni internet ni le satellite, c’est la mer, le messager qui communique tous les messages entre tous les êtres vivants. Respectons la mer comme elle nous respecte depuis toujours, car sans elle nous ne saurions communiquer et cela marquerait la fin de toute vie. »
Ton ami,
Barou
Ainsi j'allais voir le film du voyage de la bouteille, sur l'écran de notre chambre en présence d'un loup bleu qui me parle...
Huit-heures du matin, Shooka dort à poing fermé, je ne me suis aperçu de rien, elle a due rentrer tardivement de sa soirée avec Ana. Mais pas de loup, il fait jour, l'écran est resté déroulé, mon gilet...
Mon GILET !!! Il est déchiré !!! Je ne peux réveiller Shooka, elle a besoin de récupérer.
Maintenant des images reviennent comme des vagues géantes, j'ai une migraine, un tsunami d'images, ce film j'ai l'impression qu'il a duré des heures, voir des jours et des mois, comme si désormais je savais tout du parcours de cette bouteille, comme si la bouteille c'était moi. J'ai rencontré un poulpe, puis des vagues et encore de vagues, j'ai vu le visage d'une femme puis une queue de poisson était la continuité de ses hanches. J'ai été aidé par des créatures mythologiques. J'ai rencontré Poséidon, le Dieu de la mer en personne...Tout se bouscule dans mon esprit avec une clarté effrayante.
Annotations
Versions