Sans mots

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Sans mots, voilà. Aridité de la pensée. Qui patine. Faire et se taire, et ne pas moufter. Il n'y a pas de meilleures polices de la pensée que le travail dit-on, car un homme harassé ne peut plus penser à sa condition et faire en sorte que celle-ci s'améliore. Mais, et ça me dépasse, et c'est d'autant plus étrange que je n'aie pas été formé à cela, mais il est des œuvres, comme Killers of the flower moon - réalisé par Martin Scorsese en 2023 - qui parviennent à m'arracher à cette fatigue et me permettent de voir un peu plus. Un peu mieux. En-dehors de moi, me rendant ainsi accessible l'universel et de comprendre alors que je ne suis aucunement un quelconque centre du monde, que je n'ai donc pas à me donner une importance de mauvais goût et qui serait de toute façon sanctionnée, que le monde en dehors de moi est juste d'une grande brutalité et n'a aucune pitié et écrasera, aveuglément et sans remords, ce qui le gêne. Je pourrais citer au hasard À l'est d'Éden de John Steinbeck, Le Mahābhārata, L'Illiade et l'Odyssée d'Homère, Le Zéro et l'Infini d'Arthur Koestler et cetera. Il en est même qui justifie cette violence quasi-institutionnelle par le principe de darwinisme social, ce qui reste tout de même une sacrée escroquerie intellectuelle pour justifier des comportements qui écartent sciemment toutes bienveillances, spécificités humaines qui permettent la constitution de sociétés et d'entraide. Juste. Au contraire, d'autres "œuvres", Les Batman de Christopher Nolan par exemple, réactionnaires et masculinistes au possible, prônent et justifient la violence et la revanche, les justices expéditives comme une vertu cardinale, et alors nous ne sommes pas très loin des programmes de la droite extrême. Revoir avec acuité M, le maudit - réalisé par Fritz Lang en 1931 - et sa critique acerbe de ce que serait dans la pratique policière et judiciaire, et ce que fut, tragiquement, un état totalitaire constitué de truands. Mais il ne s'agit que d'entertainement, de blockbusters, tout le monde sait que c'est du chiqué, et on oublie qu'on façonne aussi ainsi des masses. C'est effrayant. Seule Rachel reste une voix de tolérance, pas entendue. Je préfère la posture de retrait du flic à la fin de La loi de Téhéran - réalisé par Saeed Roustaee en 2019 -, ô combien subversive et qui me rappelle tant le Bartleby de Herman Melville. Et me passer de mots moi aussi et refuser. Le petit voleur - réalisé par Erick Zonca en 1999 - finit aussi par une absence de mots, parce que le personnage a fini d'être complètement brisé, condition sine qua none à son insertion. Ligne de crête difficile qui m'attend...

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