La fille du dieu Oegma

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Le conteur prend la parole.

« Ouvrez vos oreilles et écoutez le récit de Balù, celle dont personne n'ose murmurer le nom.

Au commencement, Hondol n’existait pas. Ombres et vapeurs se mouvaient entre les cieux. Trois dieux-frères y régnaient : Oegma, Bôm et Likam. Un jour, Oegma se proclama chef de ses frères et, pour taire leurs protestations, les avala.

Épuisé de sa solitude, il s’endormit pour la première fois. À son réveil, des diamants noirs tournoyaient auprès de lui. Intrigué, il souffla sur l’étrange apparition et inconsciemment, cracha des verlanes, les particules appartenant aux esprits de Bôm et Likam.

Les diamants noirs prirent vie et devinrent Hâma, La Mère de Tous.

Oegma alla vers Hâma.

De leur union naquirent sept enfants.

Chacun des enfants possédait un don et s'évertuait chaque jour à impressionner Oegma.

Agacé par leurs rivalités, le dieu-père créa deux êtres qui leur ressemblaient et qu’il appela Abari — Humain.

« Montrez-moi alors la puissance de vos dons et je vous récompenserai » leur offrit-il.

Ini, la Sage, offrit aux Abari la réflexion et la capacité d’exprimer leurs pensées en madiri, la langue des dieux.

Manuk, l’Audacieux, créa la lumière afin que les Abari puissent voir et être vus.

Okwa, l’Artiste, s’empressa d’établir une végétation verdoyante et des animaux de toute espèce afin que les Abari cultivent la terre et s'en nourrissent.

Ebewa, le Discret, construisit une hutte et déroba la lumière de son frère, Manuk, pour faire naitre du feu au bout des pierres.

Egun, le Tumultueux, changea les diamants noirs en lances aiguisées et enseigna la chasse aux Abari.

Enfin, Olawa, La Belle, ordonna aux Abari d'user de leurs corps pour peupler le monde.

Impressionné par les dons de ses enfants, Oegma en oublia la dernière, Balù, qui ne put démontrer l’étendue de ses pouvoirs. Elle grandit taciturne et rancunière, maltraitée par ses ainés, finit par se retirer dans une grotte souterraine abandonnée par Ebewa.

Ce ne fut que longtemps après que son don fut révélé : dans un excès de rage et d'impatience, Balù sortit de sa grotte, fit pourrir les corps des Abari, des plantes et des animaux et changea la Lumière en Ténèbres.

Effrayés par le terrible pouvoir de leur soeur oubliée, les dieux se vautrèrent en supplications.

Parce que son dieu-père lui avait autrefois offert un masque de hyène pour cacher son apparence repoussante, Balù décréta ses conditions.

A Manuk, elle s’adressa ainsi : Toi, mon frère, malgré la brutalité de ton cœur, témoignera de la magnitude du mien. Les premiers Abari je destine à devenir Soleil et Lune. Mes ténèbres étant mon seul réconfort, tout comme ta lumière est le tien, ces partages, symbole de mon indulgence, seront appelés Jour et Nuit. Voici mon fils bien-aimé, Temps, celui qui avalera Lune chaque matin et Soleil chaque soir.

A Olawa, elle s’adressa ainsi : Tu es sans nul doute le plus beau des enfants de mon père. Pourtant, ton charme, qui rappelle la malveillance de ton cœur, ne peut fleurir dans les ombres de mon royaume. Les Abari vieilliront, leur peau fanera et leur beauté s’épuisera pour nourrir mes enfants. Car si la lumière miroite ton coeur, les ténèbres reflètent le mien : belle tu seras dans la lumière, répulsive tu seras dans les ténèbres. Belle je serais dans l’obscurité, répulsive je serais dans la lumière.

A Ini, elle s’adressa ainsi : Ta sagesse est sans limite, survole les astres dont tu décèles les moindres secrets. La parole sur ta langue raconte la puissance des dieux qui trahirent mon cœur. C’est dans leur vieillesse que les Abari s’oublieront, que leurs pensées se feront fugaces et que leurs souvenirs s’envoleront dans le Royaume sans Portes. Que la langue divine se disperse sur les eaux et par delà les terres, que Lune et Soleil les séparent pour l’éternité, jusqu’au dernier sommeil.

A Okwa, elle s’adressa ainsi : Le soleil brûlera les fleurs des champs, la lune assoiffera les plantes près des ruisseaux et la pluie — les larmes que toi et tes frères firent couler sur mes joues —ravagera les récoltes, tuera les bêtes, brisera les reins du batteur de terre et du mangeur de grains.

A Ebewa, elle s’adressa ainsi : Je refroidirai les plaines et Pauvreté, mon enfant adoré, viendra tourmenter les esprits de ceux-là qui ne vivent que de tes richesses. Le pauvre se lèvera contre le riche dans une guerre sans issue, le malade dévorera le saint et la faible anéantira le fort. Voici la récompense de tes moqueries. Voici la récompense de tes méfaits.

Enfin, à Egun, elle s’adressa ainsi : Tu es celui que je préfère malgré ton front plissé et ta bouche froissée. La mort planera au-dessus des Abari et dans leur cœur, j’attiserai la jalousie et l’amour de l’épée. Ils se feront la guerre pour le gain, se détruiront pour leurs idées et jamais ne connaîtront la paix qui autrefois, régnait dans le monde des Anciens.


Voici mon châtiment.

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