Je suis ton corps #BDSM #Psychologique #Cyberpunk

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Tony appuya sur l'interrupteur. Un vrombissement de néon retentit, teintant son appartement d'une lumière blanche et froide.

— Pose tes affaires, je vais préparer ce qu'il faut, commanda Tony à Nix.

— Oui, mon prince, répondit la jeune femme qui l'accompagnait.

Nix s'exécuta docilement en lui volant un baiser au passage. Ses lèvres étaient d'une douceur incomparable : elle venait de se refaire la peau synthétique pour l'occasion. Sa bouche avait un goût sucré, chimique, de chewing-gum à la fraise, et son cou portait l'odeur d'un puissant aphrodisiaque.

Elle s'était donné du mal pour ce soir, songea Tony, sentant un début d'érection au fond de son pantalon.

Il était resté stoïque, pour sa plus grande déception. Elle espérait provoquer une réaction sur son visage ciselé — un sourire, ou à minima un compliment — mais rien.

La pièce ressemblait à un modèle d'exposition de magazine qu'on aurait oublié de nettoyer. Comme si elle était entretenue, mais dans un bordel organisé et calculé.

L'odeur, pourtant, était étrangement neutre, bien qu'épaisse.

Nix s'assit lourdement dans le canapé et posa ses pieds sur la table basse, recouverte de cadavres de bouteilles et d'un cendrier débordant de chaque côté.

— T'as pas quelque chose à manger ? Je meurs de faim, implora Nix en dézippant son manteau de cuir noir.

— Je t'ai déjà dit qu'il faut être à jeun pour ce genre de choses. D'ailleurs, passe aux toilettes avant qu'on commence, j'ai pas envie que tu te pisses dessus ou que tu dégueules sur mon tapis, rétorqua Tony en ouvrant son frigo.

— J'ai déjà pissé, merci bien.

Les plats étaient en état de décomposition avancée, tandis que des vers gigotaient lentement dans une assiette de viande à peine entamée.

L'odeur était fétide, bien que Tony ne sente rien.

L'homme à la barbe de trois jours sortit deux pots : l'un était un pot de glace caramel beurre salé, enrichie en glucose ultra-concentré, et l'autre une sorte de petit seau de vaseline noire et poisseuse.

— Je te redemande une dernière fois avant qu'on commence : tu es sûre que tu veux que ce soit moi, ton Gémeaux ?

— Qu'est-ce que tu racontes, bien sûr que oui. J'ai jamais autant pris de plaisir que quand tu me doigtes avec tes doigts de fée, s'amusa la jeune femme en retirant son t-shirt et en dégraffant son soutien-gorge.

— Pas besoin de l'enlever, stoppa Tony en allumant une cigarette.

— J'espérais qu'on ferait l'amour après. Puis bon, c'est pas juste si je suis la seule à prendre du plaisir. T'as bien le droit de prendre un peu ton pied, non ?

— Ça dépend dans quel état tu seras après. Baiser une poupée, ça n'a jamais été mon truc, coupa Tony.

Nix lui saisit l'entrejambe alors qu'il allait passer derrière elle, pressant légèrement son paquet — suffisamment pour lui faire mal à cause de ses ongles violets.

— On baisera après, d'accord ? affirma la jeune femme d'un regard plus sérieux que la situation ne le justifiait.

Un silence de plusieurs secondes s'installa, sans que rien ne se passe.

Tony prit une bouffée de fumée avant de lui répondre, les yeux dans les yeux :

— On verra. Maintenant lâche ça, et penche ta tête.

Nix s'exécuta et écarta ses cheveux au niveau de la raie de sa coupe blunt bob à frange droite.

Tony plaça ses doigts à la racine de ses fibres synthétiques et appliqua une pression de chaque côté pour ouvrir délicatement sa boîte crânienne en deux, tout en tenant toujours sa cigarette. La lobotomisée eut un frisson tout le long du corps, à la fois d'excitation et de surprise.

— Je t'ai pas fait mal ? demanda Tony en posant d'un geste tendre une mèche derrière l'oreille de sa compagne.

— Non, j'ai rien senti. Tu le fais toujours super bien, répondit-elle en posant une main sur son avant-bras.

— Bien. Ne bouge pas, détends-toi. Je vais bientôt éteindre la lumière.

— J'suis docile comme une morte, rétorqua Nix en ricanant.

Ses épaules se détendirent légèrement tandis qu'elle commençait à poser l'une de ses mains sur son entrejambe pour penser à autre chose.

— Ça sera quoi ton safeword cette fois ? demanda Tony en enfonçant légèrement son pouce sur les circonvolutions de son cerveau.

Nix gémit en se mordant les lèvres, sentant une légère décharge de plaisir.

— Pourquoi pas "bad trip", tout simplement ?

— Si tu veux. Je te le redis : je n'arrêterai pas tant que tu ne me dis pas ces mots, d'accord ? réclama Tony en enfonçant maintenant une partie de sa main dans son lobe occipital.

— Oui, oui, bégaya Nix dans un nouveau spasme, en le sentant pénétrer dans sa tête.

— Chut. Ne bouge plus. J'éteins.

Tony débrancha un petit câble tandis que les yeux de Nix, d'un bleu clair, devenaient d'un blanc laiteux.

— Voilà, c'est fini. Maintenant, ouvre la bouche.

Nix l'ouvrit grand en tirant la langue, comme si elle attendait quelque chose.

— Tiens-moi ça, tu veux ? demanda Tony en lui déposant sa cigarette de façon maladroite, ne s'attendant pas à ce qu'elle lui lèche la main avec sa langue pleine de bave.

Ses deux mains maintenant libres, il les recouvrit de vaseline noire, avant d'enduire délicatement son cerveau.

— Je t'ai jamais autant vu concentré que quand tu trifouilles mon cerveau. Tu veux pas qu'on échange un jour ?

— Sans façon merci, je préfère que tu prennes du plaisir.

— Je peux t'en donner aussi, c'est pas comme ça que ça marche ? J'ai l'impression que t'aimes pas ce que je fais. Ça te plaît pas ?

— Voilà, j'ai fini. Je me branche à toi dans deux minutes, le temps de me laver les mains et je t'envoie un orbite.

— T'as pas répondu à ma question, grogna Nix.

Tony essuya sa main dans sa chemise pour ne pas recouvrir son visage, lui reprit la cigarette de la bouche et déposa un baiser langoureux.

— On voit ça après, d'accord ?

Nix abandonna la conversation à contrecœur, ce n'était peut-être pas le moment...

— Prête ?

— Prête.

Tony brancha les câbles de sa moelle épinière aux câbles à nu de sa boîte crânienne. Il sentit un léger picotement dans ses doigts : il venait de prendre contrôle de son cerveau, non pas physiquement, mais au niveau de ses implants. Il pouvait sentir l'augmentation de son rythme cardiaque et l'injection d'adrénaline dans son corps.

Elle trépignait d'impatience.

— Comment tu te sens ?

— Ça va, ça va.

Tony s'assit en face d'elle et prit délicatement son menton pour qu'elle le regarde dans les yeux, bien que ces derniers soient déconnectés de ses nerfs.

— Je te l'injecte et on y va progressivement, d'accord ?

— Vas-y, j'en peux plus d'attendre, supplia Nix.

L'homme s'exécuta et enfonça avec douceur son doigt dans son orbite, y déposant une clé chiffrée.

Nix tressaillit, sentant qu'elle n'était plus maîtresse de son corps. Elle était complètement soumise à son contrôle.

Tony installa un fauteuil en face d'elle, le temps qu'elle s'habitue à cette nouvelle sensation. Ils l'avaient déjà vécue plusieurs fois, mais cette fois, elle avait décidé de repousser les limites, d'explorer ses plaisirs — plus violents, plus viscéraux.

— On peut faire machine arrière si tu veux... redemanda Tony une dernière fois.

— Par pitié, dégomme-moi le cerveau ! gémit Nix.

Tony soupira et prit quelques instants. Il ne la faisait pas attendre par plaisir malsain, mais parce qu'au fond de lui, il espérait qu'elle change d'avis. Il lui donna une cuillère de glace, qui dégoulina le long de sa bouche, puis désactiva son premier pare-feu mental : la sensation de chaleur, les implants musculaires conscients.

Le corps de Nix se mit à trembler d'un seul coup. Elle ne savait plus distinguer la douleur du plaisir. Elle se sentait gelée mais brûlante de désir. Son corps transpirait à grosses gouttes, entre peur et excitation. Son corps s'affaissa doucement, privé d'informations cohérentes à transmettre.

— Putain, c'est bon ! Plus fort !

Tony accéda à sa demande sans se faire prier. Il désactiva son deuxième pare-feu mental. Tous ses sens furent alors bombardés d'informations contradictoires, impossibles à traiter. Elle était complètement désorientée, incapable de parler, pourtant Tony pouvait sentir ses pensées dans sa tête. Bien qu'elles soient parasitées par un flux de données constant, elle en demandait encore. Physiquement, rien n'avait changé mais son cerveau vivait une décharge d'énergie inconcevable.

Il désactiva alors le troisième pare-feu : les fonctions non volontaires. Son corps était en pleine tachycardie, tandis que ses implants hormonaux relâchaient un cocktail explosif et contradictoire dans son crâne pour supporter une telle décharge. La vaseline noire commençait à s'évaporer de son cerveau.

Son corps était pris dans un orgasme continu, à la limite de l'insupportable, tandis que son entrejambe s'humidifiait de plus en plus.

Tony, bien qu'inquiet pour elle, ressentait un plaisir à la voir dépendre de lui. À ce moment précis, il la dominait froidement, sans la toucher physiquement.

Nix bavait abondamment, gémissant en permanence, mais elle tenait encore bon et semblait capable d'encaisser encore davantage.

Sans qu'il ne s'en rende compte, il désactiva le dernier pare-feu : la régulation de la pensée, de l'identité, de la mémoire.

La vaseline s'évaporait à une vitesse folle ; ses neurones étaient littéralement en train de fondre. Il était en train de la transformer en légume.

Tony, qui avait gardé son sang-froid jusqu'à présent, commença à ne plus aimer ce spectacle. Elle avait dépassé le cap du plaisir. Regarder cela ne le faisait plus jouir : cela l'inquiétait.

C'était la mort de l'ego.

Il lui envoya un message micro-suppresseur pour qu'elle puisse entendre son signal.

— Tu veux que j'arrête ?

Pas de réponse, mis à part un bruit incessant dans son cerveau.

— Nix ? Tu m'entends ?

Toujours rien.

Il était impossible de déchiffrer ce que cette coquille voulait lui communiquer.

— Crie deux fois si tu m'entends...

Rien. Petit à petit, son corps devenait silencieux.

L'un de ses yeux commençait à clignoter.

Tony ne pouvait plus supporter de la voir dans cet état et réactiva, sans son accord, tous ses pare-feux.

Nix reprit conscience comme si elle revenait d'une noyade et vomit de la bile sur les genoux de Tony. Son nez faisait couler de la morve mêlée à du sang, tandis que ses vêtements du bas étaient complètement couverts de différents fluides.

Il la regarda longuement, le souffle court. Ses yeux fixaient cette boîte crânienne entrouverte qui fumait encore, pulsan comme une masse gorgée de sang.

Nix, haletante, l'attrapa soudain par le col et l'embrassa avec rage. Ses lèvres étaient acides, sucrées, poisseuses de bave et de sang.
Tony la repoussa par réflexe, ses doigts serrant sa gorge juste assez fort pour lui rappeler qu'il contrôlait encore la situation.

Elle éclata de rire, un ricanement ébréché, hystérique.

— Mmmmmhhh... que c'était bon... J'adore quand tu me déboîtes comme ça...

Il inspira profondément, basculant la tête en arrière. Son corps tout entier se relâcha, comme s'il venait d'échapper à un naufrage.

Nix, toujours assise sur ses genoux, plongea deux doigts tremblants dans le pot de glace. Elle en étala une poignée directement sur sa masse nerveuse à vif, comme pour se recoiffé. Les poils de ses bras se dressaient, parcourus d'une chair de poule électrique, sentant le picotement synaptique autour de ses doigts à la touché de sa matière grise.

— Rassis-toi. Je vais te nettoyer. Tu t'en es foutu partout, grogna Tony.

Elle leva vers lui son visage blafard, ses yeux encore aveugles, et ricana.
— Tu m'as pris pour une gamine, Tony ?

Le silence pesa. L'odeur métallique, sucrée, brûlée, saturait l'air.
La main de Nix glissa entre les jambes de son docteur, cherchant avidement ce qu'elle convoitait. Ses yeux, à la fois vides et perçants, ne quittaient pas ceux de Tony.

Il retint un souffle quand il sentit la chaleur humide l'envelopper.
Nix ondulait sur lui, son bassin d'abord vif, puis ralenti, comme une vague hypnotique. Ses hanches frottaient, accéléraient, jusqu'à arracher de ses lèvres un gémissement à moitié étouffé.

La nuque de Tony se mit à frissonner. La montée, inexorable, était là.
Et soudain, elle se retira. Juste au bord.
Ses muscles se contractèrent dans une douleur frustrée. Il grogna, la mâchoire serrée, les lèvres mordues de colère.

Nix lui sourit, narquoise, amusée par sa propre transgression.

— Tu veux jouer à ça ? souffla Tony.

Il se redressa légèrement , la faisant basculer en arrière dans le canapé.
Le câble dans sa nuque pulsa, envoyant une requête dans son cortex.

Le corps de Nix se raidit légèrement comme alourdit pas une gravité surnaturel. Son cœur s'emballa, mais ses membres semblaient plus lents. Elle était prisonnière d'elle-même, sa peau semblant se resserrer comme une camisole invisible. Entre surprise et excitation.

Tony se releva lentement, réajustant sa ceinture. Il la laissa là, inerte et pantelante, comme une poupée de chiffon.
Il soupira, sa voix tombant comme un verdict.

— Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi ? Commenta Tony séduite par sa beauté

Ses doigts accrochèrent son soutien-gorge et l'arrachèrent d'un geste sec. Sa peau apparut, pâle, translucide, parcourue de motifs hexagonaux qui pulsaient d'une faible lueur bleutée, comme si un circuit interne battait sous sa chair.

Il passa ses doigts au niveau de son sternum, sentant la chaleur réconfortante d'un cœur en fusion.

Ses paupières palpitaient, ses lèvres entrouvertes. Les mains de Tony glissèrent vers son duvet — non pas d'un geste pressé, mais mesuré, comme s'il jaugeait, comme s'il pesait la texture de sa peau synthétique.

Sa langue effleura l'encéphale découvert, goûtant le mélange improbable de caramel glacé et de métal oxydé. Il lécha une première circonvolution, lentement, puis une autre, plus longuement, presque avec une tendresse chirurgicale. À chaque sillon parcouru, de minuscules décharges crépitaient sur sa langue — et nul n'aurait su dire si c'était l'électricité de ses implants ou le frisson d'un amant.

Nix frémit, surprise, puis soupira d'aise. Tony s'interrompit un instant, ses yeux fixés sur une fissure, ses doigts palpant délicatement comme pour en sonder la solidité. Un souffle passa entre eux, lourd, suspendu. Puis il reprit, plus doux encore, d'un mouvement égal, apaisant, comme s'il effaçait la douleur qu'il avait réveillée.

Ses yeux, penchés sur elle, brillaient d'un éclat indéchiffrable : de désir, mais aussi de soin, d'inquiétude peut-être.

La respiration de Nix se ralentit. Elle s'abandonna, comme dans un demi-sommeil, son corps confié sans résistance. Tony posa alors ses mains sur ses côtes. Ses doigts s'enfoncèrent dans les creux, puis décollèrent lentement la peau magnétisée. Une déchirure silencieuse. L'épiderme se souleva, laissant apparaître les circuits, la chair vive, sensible.

Elle gémit, non pas de douleur mais de vertige. La pompe de son sang battait sous le verre protecteur, lente, régulière.

— Comment tu te sens ? demanda Tony en posant le morceau de peau sur la table, comme on dépose un linge fragile.
— Ne t'arrête pas... murmura Nix, déjà ailleurs, engloutie dans un coton voluptueux.

Il l'embrassa furtivement, puis décrocha sa mâchoire d'un mouvement calme. Plus de mots. Elle n'était plus qu'un esprit en suspens, flottant, capable de sentir sans agir. Elle savait que Tony était là, qu'elle pouvait arrêter si elle le voulait. Mais elle n'en avait aucune envie.

Elle se sentit se dissoudre. Comme si son corps n'était plus qu'une somme de nerfs à nu, offerts à ses caresses. Comme si Tony pensait à sa place, respirait à sa place. Elle aurait voulu qu'il continue ainsi, membre après membre, qu'il la réduise à l'essentiel.

N'être qu'un cerveau dans une cuve.
N'être qu'une odeur de café, le goût sucré d'un bonbon, une brise anonyme dans les rues.
N'être que l'absence — et s'y reposer enfin.

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