Chapitre 13.1 - LELYÂH - En fuite

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Sous la pleine lune d'un ciel sans nuage, les chevaux partent au galop jusqu'à l'orée de la forêt située au sud de la propriété, à la limite du domaine des Olmo. Diane connait parfaitement le chemin et souhaite mettre le plus de distance possible entre elles et ceux qui ne manqueront pas de partir à leur recherche. Puis les deux amies forcent leurs montures au trot, cela leur permet à la fois d'économiser la force de leurs bêtes et de se repérer dans les bois qui se sont épaissis. Lelyâh suit le rythme, emplie de doutes mêlés à l'euphorie de l'aventure. Le vent qui souffle dans ses cheveux, frôle son visage et son cou dénudés, lui procurent un sentiment d'exaltation qui viennent contre-balancer les ruminations incessantes. Ai-je fait le bon choix ? Diane a-t-elle la moindre idée de ce dans quoi elle s'engage ? Mon amie voudra-t-elle faire demi-tour et me laisser finalement continuer seule en quête de mon passé ? Maintenant que j'ai commencé, je suis consciente que je ne pourrai plus revenir en arrière. Il faut que je sache, quelque soit le prix de la vérité !

A-t-elle pensé à tout ? Elle a bien pris son arc et ses flèches, laissé quelques lignes à l'attention de lord Olmo et d'Hékos et Saëlle, pris sa gourde, un change et ses minerais à flammes. Et c'est tout. Dans la précipitation du départ, elle n'a pas pu préparer son voyage. Elle a revêtu sa tenue de monte, tout comme Diane : bottes en cuir, pantalon serré et confortable, tunique resserrée à la taille par une large ceinture finement ouvragée, une cape tenue par deux attaches en bois coloré.

Les deux jeunes femmes ne prononcent pas le moindre mot, jusqu'à ce que l'aube auréole le feuillage d'un mélange de rose et d'orange dont l'intensité croît au fur et à mesure que les minutes défilent. Diane s'arrête alors.

— Je pense que l'on peut poursuivre encore jusqu'à l'heure du déjeuner, si tu n'es pas trop fatiguée. Qu'en penses-tu ? Comment trouves-tu les chevaux ? J'aimerais que nous soyons sorties de la forêt d'ici un à deux solaris. Si nous pouvons passer aujourd'hui la partie la plus dense, cela nous permettra d'avancer plus vite demain.

Lelyâh prend le temps de s'approcher de chaque animal avant de répondre à son amie :

— Tu as pris de bonnes montures, et nous les avons gardées à une allure très raisonnable, ils peuvent continuer jusqu'à la fin de journée. Je suis d'accord pour avancer le plus possible avant de s'arrêter déjeuner. Un court repos nous permettra de ménager nos forces et d'avancer encore quelques heures avant la tombée de la nuit.

— Alors, allons-y !

Lorsque le soleil est au zénith, elles n'ont toujours fait aucune pause. Elles aimeraient continuer, mais il est préférable de trouver une source d'eau pour les chevaux. Diane s'approche d'un cykoï dont certaines racines affleurent le sol et pose ses mains contre son tronc majestueux. Elle ferme les yeux et peu de temps après se retourne vers Lelyâh :

— Si on remonte la pente au-dessus de nous, on devrait trouver un ruisseau en contre-bas.

— Je croyais que tu pouvais déformer les végétaux à ta guise, pas t'improviser sourcière.

— Je peux sentir où les plantes trouvent leurs besoins vitaux mais il faut de préférence un arbre et plutôt ancien, l'étendu de son réseau et de ses vibrations énergétiques m'aident à avoir des réponses plus claires.

— Au moins on ne mourra jamais de soif, s'enthousiasme Lelyâh.

Prenant un air grave, elle poursuit :

— Tu crois qu'ils sont déjà à notre recherche ?

— Connaissant mon père, je suis sûre que oui. Ce que je viens de faire est un lourd affront en présence de Lord Acerplatan. Mon père est de nature compréhensive mais peut se montrer très déterminé quand il est contrarié. J'espère qu'il pourra me pardonner... dit-elle, sa voix se réduisant à un murmure, au fur et à mesure que les mots sortent de sa bouche.

Lelyâh pose une main sur son épaule :

— Nous allons retrouver ma mémoire et je suis convaincue qu'il sera fier de toi.

— Merci, dit-elle les yeux brillants.

La pause est rapide, les hommes qui seront à leur poursuite n'ayant pas dans l'optique de faire un long voyage, lanceront certainement leurs montures à vive allure. Elles doivent donc trouver un équilibre entre le ménagement des chevaux et la distance à parcourir pour ne pas être rattrapées. Au moins, les bois forceront à avancer prudemment, leurs poursuivants ne pourront pas lâcher la bride à leurs bêtes.

Lorsque la luminosité diminue, les deux amies et leurs montures sont épuisées. Elles ne se sont octroyées qu'une brève pause pour laisser les chevaux s'abreuver. Le ciel étant couvert de nuages, il leur faut monter rapidement un abri sous peine de se retrouver trempées.

— Regarde, il y a un peu d'herbes plus bas, on va laisser les chevaux manger pendant que je prépare notre abri, annonce Diane en lui montrant la clairière en contrebas.

— Je vais voir si je peux chasser quelque chose, propose Lelyâh en retour.

À la nuit tombée, la soigneuse revient vers le camp pour y trouver une construction de racines et de branches basses entremêlées formant une cabane.

— Alors , tu penses quoi de mon manoir ? demande Diane avec un clin d'oeil.

— Chacune sa chambre et même une cuisine, parfait, répond Lelyâh en rigolant.

— Plus sérieusement, je fermerai l'entrée quand on sera couchées pour nous protéger du vent et de la pluie. Par contre, mieux vaut que tu n'aies pas une envie pressante en pleine nuit, ajoute Diane.

— Je te réveillerais avec des chatouilles pour que tu m'ouvres, dit Lelyâh avec humour.

— Ça, c'est une amie ! Tu as attrapé quelque chose ? demande-t-elle.

— Deux cavias, je suis tombée sur un terrier.

Diane pâlit d'un coup, se murant dans le silence.

— Qu'est-ce qu'il y a ? demande Lelyâh inquiète tout en se rapprochant de la fille du lord.

— Tu sais, euh... gérer ça ? demande Diane en pointant du doigt les cavias pendant à la ceinture de Lelyâh.

Le regard de Lelyâh suit le doigt de son amie. Puis elle lève la tête pour dévisager Diane.

— Ça quoi ? demande-t-elle confuse.

— Ben ça... Le préparer quoi ! répond Diane, avec une moue de dégoût et d'appréhension.

— Ah ça, d'accord je m'en occupe, je te laisse préparer le feu, ajoute la soigneuse soulagée de voir son amie reprendre des couleurs.

Après avoir mangé, attaché leurs bêtes, éteint le feu, les deux jeunes femmes, ne tardent pas à se coucher afin de pouvoir partir dès l'aube.

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