Chapitre 4.2: Voir double

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— Bon, si tu me disais à quoi rimait le cirque d'hier ?

— Mec, je ne peux pas...

— Crache le morceau ou c'est l'autre jambe qu'on va devoir t'opérer.

Je n'étais vraiment pas tendre.

— T'oserais pas...

— Tu veux parier ? le menaçais-je.

Je détestais en arriver là mais il était temps que je comprenne ce qui se jouait. J'en avais marre d'être un pion sur un échiquier dont j'ignorai les règles.

— C'est à propos de cette fille ? L'acheteuse ?

Il hocha la tête, et pris sa respiration.

— Alors, elle s'appelle Julia, de son vrai prénom.

Aie ça commençait très mal. Il ignora ma tête désapprobatrice et continua :

— Je l'ai rencontrée pour la première fois au gala des partenaires organisé chaque année par Grégoire. C'est un évènement où seuls les membres à part entière peuvent participer.

Encore des secrets.

— Elle était magnifique dans sa robe bleue, si douce, une fleur qui ne demandait qu'à s'épanouir. Elle discutait art contemporain avec le barman, lorsque je me suis approché. Je l'ai aimé au premier battement de ses cils. Avec une brève inspection sur wikipédia, j'ai fait une remarque sur le partenariat entre Perrier et Takashi Murakami. Je lui ai dit que j'avais deux places pour l'exposition à la Galerie Perrotin en juin et que je pouvais lui en vendre une. Elle a accepté et nous avons discuté toute la soirée. Le lendemain, j'achetais les places au marché noir. Elle avait rejoint le réseau il y a peu, et hésitait à rester. Grégoire tenait énormément à son carnet d'adresses alors je l'ai rassuré lui promettant que je serai son intermédiaire. Le boss a évidemment accepté. Tout pour les clients, tu le sais très bien. Pendant un mois, nos contacts sont restés strictement professionnels. J'amenais la marchandise le lundi, et ramenais l'argent à Grégoire le mercredi. Puis, nous avons commencé à nous fréquenter en dehors, tu sais ce que c'est. Tu lui parles, et tu l'écoutes. Tu as l'impression qu'elle seule te comprend. On est tombé amoureux. Je lui ai avoué mes sentiments un lundi 1er mai lors de la fête du Travail. Nous sommes partis en vacances, personne ne l'apprit. Je lui ai dit la vérité sur ma vie le jour de l'exposition, mon vrai prénom, nos missions. Oui je sais, j'ai tout risqué juste pour une fille. Tu dois me trouver stupide.

— Tu n'es pas stupide, tu es inconscient. Elle aurait pu se faire descendre. Personne ne doit savoir, c'est le code ! le réprimandai-je, choqué de sa naïveté.

— Mais je me voyais déjà faire ma vie avec. Elle m' a demandé de m'enfuir, de partir avec elle loin de cette vie. On s'est pris la tête, j'ai tenté de lui expliquer que je ne pourrai jamais partir, laisser ma vie derrière. Les fins heureuses n'existent que chez Disney. Néanmoins, je suis allé voir Grégoire début septembre. Je lui ai posé des questions sur les collègues que nous avions perdu de vue, je lui ai demandé si on pouvait partir.

Je voyais la suite arriver, grosse comme un camion.

— Il est devenu soupçonneux et j'imagine qu'il m'a fait suivre. Il a découvert ma relation avec Julia. Je n'étais au courant de rien, il m'a tout raconté.

— Et Tim dans l'histoire ?

— Grégoire a envoyé Val se faire passer pour un camarade de Julia. Il a informé Tim, son demi-frère, que celle-ci sortait avec un mec de gang. Tu peux imaginer sa réaction au garçon. Sans en parler à Julia, il a décidé de s'en occuper. Son but était clair, me faire disparaître.

— Disons plutôt que tu t'es occupé de lui. Mais Tim et Julia demi-frère et sœur ? Je ne l'avais pas vu venir, ajoutai-je surpris. Ils ne vivent même pas dans la même ville !

— Une histoire de remariage, leur père aime changer de femmes comme de chemise. Mais les enfants sont restés proches.

— Etrange, commentai-je.

— Bref, j'étais venu te voir pour te montrer ma nouvelle voiture. D'ailleurs elle va bien ? Non, me dis rien, je crains trop que tu ne l'ai abimée.

— Alors oui, ta caisse se porte comme un charme mais d'où connais-tu mon lycée ?

— Oui je sais, on n'est pas censé se fréquenter en dehors des missions mais j'ai si peu de respect pour les règles ! Je t'ai suivi un jour, je l'avoue. Je t'attendais sur le parking lorsque Tim m'a reconnu à partir de la photo que Val lui avait montrée. Il m'a menacé et à lever le bras le premier, la suite tu la connais.

— D'accord, ça fait beaucoup à digérer, déglutis-je. C'est tout ce que t'as dit Grégoire ? Qu'il s'en était pris à toi car tu demandais à partir ?

— Non. Il m'a fait comprendre que chacun d'entre nous lui appartient. Clients, partenaires, membres, il est le seul à connaître nos identités. Un pas de côté, et c'est la taule ou la tombe.

Intérieurement, je fulminais. Alex ajouta :

— Si je reprends contact avec Julia, dit-il les larmes aux yeux, il la tuera pour me donner une leçon.

Alex tripotait la carte que j'avais donnée à l'infirmier. Grégoire avait réussi, en battant Alex presque à mort, il venait de s'acheter sa loyauté. Il me débectait. Un jour, Grégoire, c'est moi qui te tuerais, et ce jour-là tu sauras que je t'ai traqué. Alex sentit ma colère car il enchaîna :

— Ne sois pas aussi bête que moi. Obéis et ça ira.

Pour l'instant, il fallait que je change de sujet, mon calme ne durerait pas.

— T'as parlé à tes parents ?

Il me regarda surpris par ma question.

— Ils sont aux Bahamas pour affaires. Je leur ai assuré que tout allait bien. Ils reviendront dans une semaine. D'ici là, mes frères et sœurs s'occuperont de moi.

— Aux Bahamas ?

— Pose pas de questions.

— J'ai l'impression que j'en sais si peu de toi.

— Qu'est-ce que je dois dire ?s'empourpra-t-il. On est des camarades, on risque notre vie les uns pour les autres mais on ne se connait pas. Je ne sais rien de toi, de ta vie à part que tu te bats comme un chien enragé, que j'ai l'impression que tu es toujours énervé, et que tu te renfermes quand on t'approche de trop près.

Cet Alex était si loin du garçon de la piscine, sûr de lui, entouré d'étudiantes. Celui-ci en voulait au monde entier et cherchait à se raccrocher à un semblant de vérité, que je ne pouvais lui donner. Je baissai la tête.

— C'est bien assez.

— J'en ai marre de cet anonymat, s'énerva-t-il. Je sais pourquoi on l'applique, pour éviter de se balancer en taule mais c'est trop. Je n'en peux plus. Je ne vais pas risquer ma vie pour des inconnus.

— Et comment tu veux faire ?

— Approche toi et écoute. Je m'appelle Adrien, me murmura-t-il.

Je reculai, choqué. Il venait de briser notre règle à la plus respectée après avoir vu la mort de près. La faucheuse, en repartant, avait abattu les murs de défense de mon ami. Il ne restait qu'un enfant meurtri en quête de réponse. Je le regardai et choisis mon camp :

— Je suis désolé, je ne peux pas faire ça.

Je l'ai planté là, profondément retourné. Deux adolescents richement habillés entrèrent dans la chambre d'Alex dès que j'en sortis. Je les entendis crier son prénom, son vrai prénom avec un mélange de tristesse et de soulagement. Pourquoi est-ce que tout ce qu'on avait mis des années à construire était en train de s'effondrer ?

Avant de partir, je passai par la chambre de François, le trouvant en pleine conversation avec sa sœur. Une petite brune aux boucles amples, aux yeux noirs avec des formes généreuses. Il ignorait encore qu'à son anniversaire, j'avais fait sauvagement l'amour à celle-ci. Le souvenir de son corps nu sous moi manqua de peu de m'exciter. J'étais trop bouleversé. Elle se retourna vers moi pile à ce moment-là, comme si elle avait perçu que je pensais à elle. Elle me sourit. Elle était divine. Si je ne voulais pas la plaquer contre un mur dans l'hôpital, j'avais intérêt à me détendre. Cependant, passer ma frustration lors d'une partie de jambes en l'air était le plus doux des remèdes.

— Alors comment se porte notre grand guerrier ?

Pas ma meilleure entrée, mais ça fera l'affaire.

— Je suis sûr que j'en ai abimé une ou deux de ces brutes épaisses ! ria-t-il.

Sa bonne humeur me détendit instantanément, oubliant quelques minutes les tourments d'Alex.

— Tu te rappelles de ma petite sœur Julia ?

J'avais totalement oublié son prénom. Pourquoi tout le monde portait le même prénom en France ? Que faisaient les parents ?

— Oui je crois l'avoir croisée à ton anniversaire.

« Très crédible, continue de t'enfoncer mon gars », ricana ma conscience.

— Sinon, t'as l'air bien pour un mec qui a joué le premier match de rubgy de sa vie, le moquai-je.

Julia ricana. De mieux en mieux.

— Ecoute, j'ai connu pire. Mais je ne suis pas près de recommencer. Sinon ton pote Alex ça va ?

— Il va s'en sortir. Les médecins ne sont pas venus à bout de son humour, c'est bon...

— Il faut que je vous laisse les garçons, nous interrompit Julia.

Elle remit sa veste en cuir qui allait parfaitement avec son jean et ses hautes bottes. J'étais en train de me demander en combien de temps je pouvais la déshabiller lorsqu'elle me fit la bise, me chuchotant de la rejoindre dans 10 minutes aux toilettes des dames. Ma journée était en train de s'améliorer drastiquement.

J'écoutai François se plaindre de mon absentéisme en cours puis de sa gratitude envers moi dans une demi-conscience. J'étais déjà dans l'après. J'inventai une réunion avec ma mère pour m'éclipser et fonçai aux toilettes, impatient.

Elle m'attendait, magnifique, et verrouilla la porte derrière moi. Elle ne s'embarrassa pas de mot, se contentant de plaquer ses lèvres contre les miennes. Elles étaient si douces. Mes mains s'aventurèrent le long de son corps, ouvrirent sa veste. J'embrassai son cou, sa poitrine moulée dans un body blanc. Je défis sa braguette.

— Attend, me murmura-t-elle.

Elle me poussa contre le mur, m'enlevant mon blouson, mon tee-shirt. Elle se mit à balader sa langue sur mon torse, puis tourmentait mes tétons. Je lui arrachai son jean, et introduisait mes doigts dans sa chaleur. Elle sentait si bon. J'ouvrai son body avec mes dents, pour constater avec plaisir de l'absence de sous-vêtements puis léchai avidement son sexe. Elle gémissait de plaisir, appuyant ma tête contre son corps. Je remontai pour attraper ses lèvres. Nous nous embrassâmes, l'excitation nous parcourant par ondes successives. Je la retournai, elle s'agrippa au lavabo, me regardant à travers le miroir. Je vérifiai qu'elle était assez mouillée, puis me plongeai en elle pendant ce qui sembla durer une éternité. Sa respiration rythmait la mienne, mes coups de bassin rythmant la sienne. Je lui fis l'amour à l'hôpital, puis chez moi, ma mère s'étant absentée. Je lui fis l'amour pour me prouver que j'étais encore capable de tendresse. Puis, quand elle en eut marre d'être ménagée, j'accélérai. Puisant force dans les émotions de la journée, je durcis mes coups. A travers la vitesse, je m'oubliais. Ni Victor, ni Nicolas, j'étais juste un garçon faisant l'amour avec une fille superbe. Le reste était illusion. Je sentais son corps me recevoir, ses doigts griffant mon dos. Je jouis, elle aussi. Et nous recommençâmes jusqu'à ce que nos esprits soient aussi vidés que nos corps. Les pensées parasites de la journée ayant disparu, je m'endormis nu, elle dans mes bras.

Je me réveillai en sursaut du meilleur sommeil que j'avais eu depuis un moment. Je repoussai gentiment le corps de Julia endormie pour prendre mon téléphone. Deux messages m'attendaient.

Grégoire: « Victor, demain sera le jour où tu feras tes preuves. Rendez-vous à la sortie de ta salle de sport demain 19h45. Avec ta moto »

Le dernier message était d'Amina. « Es-tu disponible ? Il faut qu'on se voie. »

Voilà pour aujourd'hui ! J'espère que l'histoire vous envoûte ! La suite est prête ! N'hésitez pas à me laisser vos commentaires !

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