14

3 minutes de lecture

- Je voulais juste te faire envisager l'avenir, te faire voir le monde à travers mes yeux. Effacer ne serait-ce qu'un temps le mépris que tu as envers ce monde si imparfait. Voilà, c'est chose faite. Prends ça comme un cadeau d’adieu.

Elle lâcha un petit rire nerveux. On avait retrouvé le chemin du pont. Je m'y aventurai tandis qu'elle restait en retrait. Le moment était arrivé pour elle de partir.

- Je t'ai promis de m'en aller et je tiens toujours mes promesses. Bon, je t’ai accaparé un peu plus que ce que j’avais dit au départ. Donc, je pars. Je dirais bien que je vais dormir, mais voilà, fin, bref.

Elle balaya la fin de sa remarque d’un geste de la main. Elle commença à reculer. J’avais encore avancé. Un pas après l'autre, je revenais là où tout avait commencé. Vers cette chute qu’elle avait empêché. Encore un pas. Mes pieds semblaient collés au sol. Je n’arrivais pas à faire ce pas définitif. Plus maintenant. Je serrai et desserrai les poings convulsivement.

- Attends. Attends, dis-je avant d’avoir eu le temps de m’en empêcher.

Je me retournai vers elle et elle vers moi. Je levai une main dans sa direction tandis que de l’autre je me pinçai l’arête du nez. Elle arrêta tout mouvement.

- Tu t’es battue pour moi quand je n’en avais plus la force. Je crois n’avoir jamais croisé de personne plus courageuse. Tu as gardé une âme d’enfant, insouciante, émerveillée, et profondément innocente. Je ne sais pas vraiment qui tu es. Je ne connais même pas ton prénom, mais si tu pars, je vais sauter.

- Je sais, souffla-t-elle, résignée.

- Alors, reste. Ou plutôt, reviens.

La confusion se lisait sur son visage. Et je me demandais si on la lisait également sur le mien. Les mots m’avaient échappés avant même que j’ai eu le temps d’y penser ou de les retenir. Ce qui était peut-être une bonne chose, étant donné que sans cette impulsivité, c’étaient des mots que je n’aurais jamais prononcé.

- Je ne comprends pas, murmura-t-elle.

Je secouai la tête et fis un pas dans sa direction.

- Je veux te connaître. Plus que tout, c’est la raison pour laquelle je ne veux plus… sauter. Je veux te revoir. Je ne sais pas si je veux vraiment vivre, mais en tout cas, là-dessus, je te dirais que je ne veux pas mourir. Pas tout de suite. La mort est une porte définitive. Si je l’emprunte, je ne pourrais jamais savoir. Je ne pourrais jamais savoir si finalement la vie vaut la peine d'être vécue. J’allais vraiment sauter, mais tu m'as sauvé à temps. Tu avais raison, j'avais besoin d'aide. Je n'y croyais plus, et à présent je ne rêve que d'une chose c'est d'y croire. Je crois en toi. Tu m'as sauvé.

C'est tout ce que je réussis à prononcer. Nos regards se croisèrent. Le sien était rempli d’espoir.

- Je crois en toi, répétai-je.

- Je m'appelle Liv, lâcha-t-elle finalement comme toute réponse.

- Gabriel.

- Un ange tombé du ciel, souffla-t-elle.

- Reviens demain, suppliai-je. Les constellations te délivreront peut-être leur secret.

- Je te le promets.

Cette promesse était tout ce dont j’avais besoin pour le moment. Peut-être que ça ne suffirait pas, mais ça n’avait pas d’importance. Ce qui comptait c’était de faire un premier pas. De m’éloigner du gouffre. Les autres suivraient.

***

Ce texte s'achève ici, sur cette petite note d'espoir.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Vagabonde ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0