Chapitre 9

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Je reconnais la voix, avant de comprendre le sens des paroles. Mue, par un instinct de panique, je me lève et tente d’agripper l’arme que m’a donnée Soa. Je m’entaille la paume. Peu importe, j’ai de quoi tenter de me défendre.

Une main se pose sur mon épaule.

— Vite, cache-toi ! me jette Soa.

Je recule d’un pas, mon cœur tambourine dans ma poitrine. Un frottement de métal sur du cuir grinça juste après. Soa se précipita plus loin en hurlant des ordres.

Autours de moi, les caravaniers cris et cours. Je reste figée au milieu de ce chaos.

Vers où aller ?

La sueur dévale mon dos. Une main finit par s’abattre sur mon épaule, je glapis de frayeurs.

— Suis-moi ! me lance Siora, presser.

Elle m’agrippe le bras et me guide dans la cohue. Je manque de m’étaler plusieurs fois sur le sol.

— Monte ! m’ordonne-t-elle.

Je reste figée sur place. Elle ne perd pas de temps, ses bras entourent mon corps et me pose sur une grosse branche d’arbres.

— Merci, mais…, je réussis à balbutier.

Elle m’effleure le bras, le souffle court.

— Je te laisse, manieuse de mots, mon devoir m’appelle…

Sur ce, elle tourne les talons, me laissant seul sur la branche.

Elle m’a appelée manieuse de mots…

Des hurlements s’élèvent bientôt à l’autre bout du camp. Ma respiration s’accélère. En alerte, dans la nuit, j’attends. En tentant de me replacer, je m’écorche. La goutte dégouline le long de ma main. Mais il y a pire.

L’odeur de sang qui règne sur la prairie est écœurante.

Le silence finit par s’abattre, pesant. Je tends l’oreille.

Rien.

Cette absence m’inquiète encore plus. Au bout d’un temps qui semble durer une éternité, une voix inquiète trancha le silence.

— Ina ?

Je pose ma main sur le tronc, et glisse doucement au sol.

— Soa ! je murmure un sourire sur les lèvres.

— T’est pas morte, cool ! Si tu veux tout savoir, on les a repoussées.

Je hoche la tête, soulagée et il me prend le bras. Ensemble, on traverse le camp. À peine arrivée au point de rassemblement, Elyrian nous saute dessus.

— Ina ! Tu vas bien ?

— Euh, oui…

Il soupire avant de remettre à marmonner dans sa barbe.

— Votre attention, s’il vous plaît ! s’exclame la lanterne, elle attendit le silence total avant de continuer. Je vous remercie tous pour votre réactivité. Oui ! Je sais, lance-t-elle en élevant la voix au-dessus des murmures furieux. Cette route est censée être une lune morte. Mais depuis que le royaume à la soupe trop chaude, rien n’est sûre. Par contre, j’ai moi aussi besoin d’explication. Nyméris ?

Mon cœur accélère. À tous les coups, Elyrian a dû utiliser sa magie. Ou alors, c’est quand Nym a demandé à Siora de me mettre en sécurité… Dans les tous les cas, notre couverture est complètement grillée.

— Mhyrra… Ce n’est pas la première fois que je voyage avec toi. Comme vous tous, vous connaissez mon statut. En tant que général des armées, je prends part à mainte mission. Je suis peu souvent à la capitale, simplement parce que l’empereur et moi pensons que je suis plus utile ailleurs. Mes missions sont souvent sous le signe de la discrétion. Si nous nous sommes fondus dans la masse, c’est simplement parce que la situation l’exigeait. Nous escortons Ina à la capitale et nous devions le faire sans attirer l’attention. D’après l’attaque, c’est ratée. Par ailleurs, je vous déconseille de poser des questions, vous n’aurez pas de réponses…

Un silence respectueux flotte durant une seconde. Je serre les poings, en imaginant les regards curieux s’attarder sur moi. Les murmures se turent. La lanterne finit par reprendre la parole.

— Je te reconnais bien là, Nyméris, murmura-t-elle doucement. Reprenons, je pense que vous aviez remarqué que les ombres n’étaient pas revenus. Je suis vraiment désolée de vous apprendre que Ylva a rejoint la grande caravane.

Le silence retombe, lourd de douleur et un sanglot brisée finit par résonner près de moi. Je me retourne.

Ylva, une des deux ombres de la caravane, est morte… La phrase tourne et retourne dans ma tête. Je ne la connais pas pourtant l’annonce me touche.

— Et Keldric ? finit par murmurer Siora.

— Blesser, mais vivant… Maintenant que ça, c’est dit, reposez-vous, nous partons à l’aube. Nyméris ? J’ai encore besoin de te parler.

Elyrian nous prend l’épaule et nous retournons traîne nous coucher. Ni Soa, ni moi, nous résistons.

Allonger, je réfléchis au dernier évènement. L’attaque, Siora, Nym… Tout se mélange dans ma tête à cause de la fatigue. Soa ne cesse de se retourner. Lui, non plus, ne trouve pas le sommeille.

— Nym, c’est qui réellement ? finis-je par demander, incapable de patiente jusqu’à demain.

— Quoi, Nym ?

J’opine en silence.

— Eh bien, que te dire… Nym est une manieuse de plante réputée pour être une fine stratagème et une grande combattante. Elle est entrée très jeune au service de l’empereur et n’a cessé d’être utile depuis. Très vite, l’empereur comme récompense à ses nombreux services la nommée général des armées. Elle est très appréciée autant pour ce qu’elle fait que pour le lien qu’elle crée. De ce que j’ai entendu, elle est souvent sur les routes et s’entretient avec la population. Elle est proche du pouvoir et proche du peuple, ce qui est rare.

— Elle est hyper haut gradée en fait ! lance-je, surprise.

— Mmmph, oui, clairement.

Je ferme les yeux un instant. De mieux en mieux, je suis accompagnée d’un grand magicien et de la générale des armées. On ne peut pas faire plus discret.

Pourtant, comprendre tout ça, calme ma tempête intérieur et me permet de finir ma nuit.

Le reste du voyage se déroule sans problème notable. Nymeris et Siora sont très occupés à compenser le manque d’ombre qu’à créer la mort de Keldric.

Elyrian continue à tenter de m’entraîner, sauf que cette fois-ci, avec notre couverture qui a sauté. Je n’ai plus aucune excuse pour m’échapper.

Ces exercices sont de plus en plus complexes, je n’ai réussi à réutiliser qu’une seule fois ma magie. De façon, encore une fois, totalement pas contrôlée et non désirée.

Elyrian et moi venions de passer toutes l’après-midi, à tenter de créer une vague magique. À bout et épuiser, j’avais fini par exploser et lui balancer ma colère à la figure.

Ce qui avait contre toute attente en cinq mots à peine, faits ce que je m’escrimais à tenter depuis trois jours…

Il s’était littéralement retrouvé, propulsé à l’autre bout du chariot.

Je ne me souviens même plus de ce que j’avais dit, car à peine prononcée, je m’étais vidée de toute ma force et endormi.

Le cinquième jour, la caravane s’ébranle très tôt et rapidement la capitale est en vue.

Enfin, d’après Soa et les autres, parce que moi évidemment, je n’en sais rien.

Assise sur le chariot dans un équilibre précaire, j’écoute le monologue joyeux de Bryn, qui raconte ce qu’il compte faire en ville.

L’idée de quitter ces gens qui ont fait un bon de chemin avec moi, me remplit de chagrin. Mhyrra, Siorra, Bryn et les autres ont, durant ces cinq jours été, à eux seuls, un monde à part.

— Tu penses à quoi ? me chuchote soudainement Soa.

— Je suis en train de m’imaginer comment je vais tuer Bryn, s’il ne se tait pas…, je raye, amusée.

— Génial ! Je t’aide quand tu veux, me réponds le manieur de feu.

— Je ne vous gêne pas ! s’agacer faussement celui-ci.

On explose tous les trois de rire.

— Arrivée à la capitale dans dix minutes ! Soyez prêt à débarquer ! hurle la lanterne en tête du convoi nous coupant dans nos éclats de rires.

— Je vais récupérer mon sac…, lance Bryn en se levant, faisant grincer le charriot. Et m’éloigner de vous avant que vous ne passiez à l’acte, ajoute-t-il, amuser.

Je souris, mais ma tête est ailleurs. Dix minutes et après, on ira rencontrer l’empereur… L’angoisse ne desserre pas ma poitrine.

— Ça va ? me demande Soa sûrement en me sentant tendu.

— Oui, oui, ça va juste faire bizarre de quittée tout ce petit monde…

— Ça, c’est sûr… On a une expression pour en parler en langage caravanier. On appelle ça “décrocher les chariots”. J’aime bien l’idée que la vie, c’est peut-être ça…

— Comment ça ?

— Eh bien, on est peut-être tous un chariot, avec ses failles et ses particularités. On chemine seule et dés fois les temps d’une caravane, on fait un bout de chemin avec d’autre. Puis, on se décroche pour continuer sa route, chacun sa bataille. Tous les voyages nous marque plus ou moins et chaque rencontre nous pousse plus loin. Alors, dans ce cas partir, ce ne serait pas abandonner quelques chose ou quelqu’un, mais trouver un autre endroit où nos qualités et nos défauts serviraient davantage. Et surtout, où on pourrait continuer à avancer…

— C’est beau, finis-je par murmurer en m’imprégnant de ces paroles.

La capitale est mouvementée, encore plus que la ville de Vayn ce qui était prévisible. Quand, je saute du chariot, les mots de Soa tournent encore dans ma tête.

Un chariot avec ses failles et ses particularités.

Je hoche les épaules, ce n’est pas vraiment le moment. J’aide comme je peux les autres à décharger les marchandises. Puis Bryn et moi ont se donne l’accolade.

— Je serais ravi de refaire un bout de chemin, lança le caravanier.

— Un jour, sûrement Bryn, répond Soa.

Soa et moi, nous partons saluer les autres avant de rejoindre Elyrian et Nyméris qui discutait encore avec la lanterne et Siora.

— Vous avez terminé ? nous interroge Nyméris.

On acquiesce tous les deux.

— Bien, ne faisant pas attendre l’empereur, murmure-t-elle.

— Je vous souhaite bon courage pour la suite, soupire la cheffe caravanière.

— Merci, murmure Nym.

Mhyrra me serre dans ses bras et fait de même avec les autres. Au fond, je me demande si toutes les lanternes sont aussi chaleureuses qu’elle, j’en doute.

Siora nous accompagne étant, elle aussi, au courant du secret.

J’espère vraiment que tout se passera bien, d’ailleurs, il faut vraiment que je pense à demander si quelqu’un a reçu les résultats de mes tests.

Avec tout ça, j’ai oublié.

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