12h11
Un Chishiki est né humain, mais façonné par des modifications génétiques ont permis à nos ancêtres de franchir la barrière de leur condition biologique. Aujourd’hui, nous sommes une race à part entière, vivant dans l’ombre de l’espèce qui nous a vus naître. Mon fils hérite de tout mon savoir par la transmission génétique.
À son tour, il le transmettra à ses descendants. Les observateurs sont notre prolongement, créés grâce à l’ERA. Ces consciences ramenées de l'au-delà dont l'enveloppe est morte peuvent se lier aux sens d’un vivant et enregistrer ce qu’il perçoit. Ils sont nos yeux, nos oreilles, nos souvenirs incarnés. Leur durée de vie dépend de leur créateur.
On pourrait les comparer à des caméras sensorielles, mais leur fonction dépasse de loin cette analogie simpliste. Quant à l’ERA, c’est le fil invisible reliant tous les êtres vivants depuis plusieurs siècles. Présent dans chaque goutte de sang, il permet la connexion, la mémoire partagée, l’existence programmée.
J'ai par ailleurs écrit un rapport complet sur ce sujet...
Un léger coup frappé à la porte interromptant mes réflexions. Élise.
— Entre, chérie. — dis-je avec douceur et chaleur, simulant les émotions.
Je referme le carnet avec soin et le glisse dans un tiroir fermé à clé. Dès qu’elle franchit le seuil, sa voix puissante emplit la pièce comme une lumière douce. Elle tient Noran contre elle, berçant avec tendresse ce petit être qui, malgré son âge, comprend bien plus qu’il ne le devrait.
— C’est l’heure du repas, Telius. Tu viens manger ?
Ses mots sont familiers et simples. Pourtant, ils portent une chaleur à laquelle je ne suis jamais indifférent. Cela est le point faible des Chishiki, le retour d'émotion qui parfois altère faiblement notre perceptions, mais j'en garde un très bon contrôle.
— Bien sûr, Élise. J’arrive.
Je me lève, lui souris. Noran est silencieux et sent qu’il doit taire ce qu’il sait. Il comprend. Car même si nous l’aimons profondément, elle reste une humaine. Et nous, nous sommes des Chishiki. Telius Keltus. Tel est le nom que tous connaissent, sans soupçonner qui je suis vraiment. Ce passage est daté du jour de la naissance d’Hana, le 19 juillet 2698, à 12h11.
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