Chapitre Quatre : Nous changeons tous, souvent sans le voir
Hana fête ses quinze ans avec ses parents et ses amis, toujours timide au fond d’elle, sans le laisser paraître. Elle lit chaque jour les articles sur les travaux scientifiques de Mirina qui inspirent ses rêves, c’est pourquoi elle émet ce souhait de rejoindre son équipe. Sans vraiment l’encourager, car ils ont peur pour elle, Josh et Méline la soutiennent. Quant à moi, je l’observe juste.
Noran semble amoureux, pourtant lui non plus n’a pas vraiment d’émotions. Nous avons appris à les simuler, mais nous le faisons si bien, que j’ai peur que ces dernières ne finissent par nous paraître réelles. Il est comme aveuglé par Mirina, si bien que j’ai dû lui rappeler la règle d’or des Chishiki qui est… ‘Ne partage jamais le savoir avec les ignorants, car c’est un pouvoir dangereux.’
Cela vaut aussi pour Mirina, car malgré son génie elle pourrait engendrer un chaos dont elle-même ne se rend pas encore compte. Sa main droite le prouve d’ailleurs, car suite à une explosion d’un de ses projets, une grande cicatrice est très visible sur le dessus. Cependant, son œil cybernétique fonctionne parfaitement et désormais, il est impossible de différencier le vrai du faux.
Aujourd’hui, Hana passe son entretien, Mirina, trop absorbée, comme toujours, demande à Noran de s’en charger. C’est dans cette vaste salle qui lui sert de chambre et de laboratoire que tous les trois, pour la première fois, se rencontrent. Les pensées confuses de Hana me sont perceptibles, tandis qu’elle joue avec ses doigts. ‘Je ne pensais pas que Mirina était aussi, comment dire…’
Elle réfléchit alors que Noran l’interpelle d’une voix forte. « Ne fais pas attention au bazar ! » Hana sourit puis dit doucement. « Désolée, c’est vrai que ce n’est pas si important. » Cependant, ses pensées continuent de se former. ‘Mirina est presque nue sous sa blouse.’ Noran la reprend rapidement d’une voix posée. « Donc, tu veux travailler avec nous ? »
Soudain, Mirina rit sans arrêter ses recherches et dit calmement. « Ne la taquine pas, Noran. » Puis continue d’une voix douce. « Soit la bienvenue si tu veux être ici, Hana. » Noran soupire, puis tend sa main à Hana. « Comme l’a dit Mirina, soit la bienvenue, Hana. » Les larmes aux yeux, elle serre la main de mon fils qui l’aide à se lever du fauteuil enfoncé, où dort parfois Mirina.
Mirina se retourne soudain, puis dit doucement avec un geste de la main. « Viens voir, Hana. » Noran commence à ranger la pièce en ramassant les vêtements éparpillés partout sur le lit et les meubles, tandis que Hana s’approche du large bureau. « Regarde dans le microscope. » Hana place son œil, des millions de polypes de Turritopsis dohrnii bougent rapidement dans cette plaquette.
« Qu’est-ce que c’est, Mirina ? » À peine Hana pose-t-elle sa question que Mirina d’un doux rire dit. « De nouvelles vies et un espoir pour chacun qu’ils soient humains ou non. » Mirina ferme les yeux et ajoute. « Peu importe les progrès scientifiques, ils ne remplaceront jamais la nature. » Les pensées de Hana se bousculent alors. ‘Mirina est tellement cool, et Noran si gentil.’
Alors que je note tout cela dans mon carnet, les coups résonnent à ma porte. « Entre. » Comme chaque jour elle vient me chercher pour dîner, Noran n’est pas ici cette fois. Il reste avec Mirina désormais, mais devrait être au réfectoire. « À quoi penses-tu, encore ? » Élise m’adresse ces mots et je la regarde avec un sourire avant de dire. « Beaucoup de choses, surtout celle qui te concerne, car je t’aime comme au premier jour, d’un amour grandissant dont la flamme est éternelle. » Je suis sûrement en partie un menteur, car je n’ai pas de vrais sentiments, mais est-ce à elle ou à moi que je mens le plus. Après tout, chacun cache une part d’ombres qui nous rend multidimensionnels.
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