Chapitre 5

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Violette regarda une dernière fois son reflet dans le miroir. Elle portait un simple top noir à col rond surmonté d'un blazer kaki et un pantalon slim. Noir lui aussi. Seules ses sneackers blanches illuminaient sa tenue. Ses cheveux étaient relevés en un espèce de chignon dont certaines mèches s'échappaient pour venir danser au creux de son cou et un peu de fard et de mascara habillaient son visage pâle. Elle se sentait bien dans cette tenue qui ne dévoilait rien d'elle. À part peut-être cette part sombre qui l'habitait.

Fred l'attendait devant le club. Ils entrèrent et s'installèrent au bar.

Le Green Mill était la réplique française du Green Mill Coktail Lounge de Chicago, réputé pour ses prestations de jazz qui s'entremêlaient aux lectures de poésie et aux performances de slam. L'atmosphère feutrée et la musique jazzy renforçaient l'ambiance cosy du bar. Des appliques tapissaient les murs de briques à intervalles réguliers. Des bougies dansaient à l'intérieur de lumignons posés sur des tables rondes surmontées de nappes blanches autour desquelles se trouvaient des fauteuils en velours rouge. Des ampoules étaient suspendues à des longs câbles et pendaient au-dessus du bar, diffusant une lumière ambrée qui illuminaient les visages souriants des clients.

  • Qu'est-ce que je vous sers ? demanda la barmaid.

Fred interrogea son amie du regard.

  • Un martini.
  • Et une bud pour moi.

Il reprit :

  • Ça n'a pas été simple d'avoir ton numéro tu sais, ta copine elle n'est vraiment pas facile.
  • Elle a froncé les sourcils, demanda Violette, amusée.
  • Elle fronce toujours les sourcils !
  • Faut pas lui en vouloir. Elle veille sur moi. Depuis toujours. Elle me défend.
  • Tu sais pourtant parfaitement te défendre toi-même. Tu boxes tous les jours ?
  • Oui, la salle est sur mon chemin. J'y passe avant de rentrer. Ça me fait du bien.
  • J'imagine que ça doit bien défouler. Et d'où t'est venue cette passion pour la boxe ?

Le sourire de Violette s'évanouit. Un flash l'aveugla. Les gants sur l'étagère. Le sac accroché au plafond. La douleur dans son poing. Le vide dans son cœur.

La barmaid arriva à point nommé pour les tirer tous deux de ce malencontreux malaise.

  • Santé ? lança Fred en la dévisageant tendrement.

Elle accrocha son regard aux prunelles azurées du jeune homme. Elle sentit un vent tiède caresser ses pensées et le bruit des vagues noyer ses souvenirs amers. Elle retrouva son sourire et leva son verre à son tour pour trinquer.

  • Et toi ? Un ami fidèle ? Quelqu'un avec qui partager tes petits secrets ? reprit-elle.
  • J'avais un ami, moi aussi, lorsque j'étais petit. On était tout le temps fourrés ensemble. Mais à l'inverse de vous, le temps nous a éloignés. Il est parti vivre à l'étranger avec sa petite amie. Je ne l'ai jamais remplacé. Au fond, je suis un grand sentimental, ricana-t-il.

Violette sourit. Elle avait l'intime conviction que ce qu'il venait de dire était plus vrai que ce qu'il voulait bien lui faire croire. La faute à cette étoile présente dans ses yeux.

  • Tu n'as jamais eu envie de reprendre contact ?
  • Si...mais il semble vivre aussi bien sans moi et moi sans lui.
  • T'en es sûr ?
  • Tu sais Violette, je me dis que si la vie nous a séparés c'est que ça devait se passer ainsi.
  • Alors tu crois au destin ? Tu crois que tout est écrit d'avance ? Qu'on ne contrôle rien ?

Le jeune homme réfléchit longuement à la question.

  • Je crois que si des personnes sont faites pour s'entendre ou pour être à deux alors la Vie les ramènera toujours l'un vers l'autre. Tu ne crois pas ?
  • Je ne sais pas. Peut-être qu'il faut parfois savoir se battre pour obtenir ce qu'on veut vraiment.

Ils s'observèrent un moment comme pour puiser dans le regard de l'autre les sentiments qui se cachaient derrière leur discours.

Derrière eux, le gérant annonçait l'entracte et la musique laissa place à des lectures. Violette était complètement absorbée, elle buvait chaque parole que ces pseudo-poètes livraient au public, comme si les mots énoncés étaient les siens. Elle était émue par ces personnes qui, le temps de quelques minutes, partageaient leur joie, leur peine, leur bonheur ou leur malheur comme autant de fragments de cœur qui trouvaient leur écho dans l'ombre d'une autre vie.

Ils grignotèrent sur place pour ne pas avoir à quitter ce lieu qui les enchantait et continuèrent à échanger autour des musiques et des films qu'ils aimaient, curieux d'en apprendre un peu plus l'un sur l'autre. Puis quand ils n'eurent plus d'autre choix, ils se quittèrent et, un sourire dessiné sur leurs lèvres, ils se promirent de se revoir bientôt.

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