Désillusion (2/2)

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Delhass, sans même se retourner, percevait les pas de son collègue derrière lui. Ce dernier marchait avec une lenteur calculée, désirant assister au spectacle et assouvir sa curiosité sans se salir les mains. Lorsque l'Elfe atteignit le chariot près duquel se tenait Olgeirth, Adan interrompit sa marche aussitôt et croisa les bras sur son torse avant de s'adosser au tronc d'un arbre. Delhass se racla la gorge afin de signaler sa présence au magicien. Ce dernier, fort préoccupé par le contenu de ses lettres récemment arrivées, fronçait les sourcils. Il releva lentement les yeux vers le nouvel arrivant et attendit sans piper mot.

De mauvaises nouvelles ? questionna l'Elfe en jetant un regard en biais aux parchemins.

Le magicien frissonna, mais se reprit aussitôt, arborant son air neutre spécialement dédié aux situations de crise. Il replia les lettres en vitesse avant de ficeler le tout.

— Où sont-ils, ces fameux partenaires de voyage ? D'ailleurs, que fais-tu là ? N'es-tu pas censé les accueillir ?

— Dites la vérité. J'vois bien que ça va pas en ce moment, maître. Me mentez pas, vou'savez que je vous connais par cœur. Je vois bien que vous dormez mal en ce moment, et votre teint est plus pâle que d'habitude et...

— Delhass..., soupira le magicien avant de se redresser. Tu ne pouvais pas te mêler de tes affaires ?

— C'est nos affaires, pas juste les vôtres ! On risque tous not'vie pour votre entreprise. Qu'est-ce qui nous y attend, sur le chemin ?

— Rien qu'on ne puisse surmonter, mentit Olgeirth, accrochant son regard dans les yeux de l'Elfe méfiant.

— Vraiment ?

— Vraiment, répéta-t-il machinalement.

— Vous croyez que je vais lâcher l'affaire comme ça ?

— Je crois surtout que t'es assez intelligent pour retourner d'où tu viens, si tu crains le voyage et ses dangers, Delhass, je ne te retiens pas.

L'Elfe se crispa, ne s'attendant point à un tel rejet. Il savait que le magicien ne l'adorait point, mais malgré ses injures il semblait tenir à lui comme un précepteur tient à son élève prodigue.

— Me traiter de lâche n'est pas la meilleure solution pour se débarrasser de ma trogne..., grogna Delhass entre ses dents, manifestement vexé.

Le magicien soupira lourdement, il pensait sérieusement l'évincer de la compagnie du voyage, car il tenait à lui. Il tenait à ce qu'il ne périsse pas au cours des prochains jours. Il n'avait pas le don de voir l'avenir, mais ses cauchemars le poursuivaient partout où il allait... Par conséquent, ça ne saurait tarder. C'était inévitable.

Il portait leur marque, leur essence sur sa peau. Et à cause de cela, il ne pouvait ni trouver le répit, ni connaître la paix et certainement pas se soustraire à leur vision. Aussi intrépide et aventurier que fût son apprenti Elfe, il était bien trop jeune pour périr pour les folies d'un vieillard qui avait déjà vécu une longue et riche existence. Pour la première fois, Olgeirth faisait preuve d'altruisme. En vain, car sa froideur et son mensonge n'eurent que l'effet contraire sur son second, qui considéra cela comme de la provocation. Les ricanements moqueurs d'Adan en arrière-plan devaient certainement y avoir joué un grand rôle. Delhass était décidé à convoyer en compagnie du magicien, et cela sans savoir qu'ils couraient, sans aucun doute, à leur perte. De la pire des manières.

L'Elfe, qui avait rebroussé chemin, bombait fièrement le torse alors qu'il toisait du regard son égal. Un groupe, étrangement composé, atteignait lentement le point de rendez-vous au même moment. Delhass écarta les bras en guise d'accueil et cria à gorge déployée d'une joie non dissimulée :

— Je vou'souhaite, à vous mes futurs'amis, la bienvenue dans cette charmante compagnie du Magicien De Lir ! Soyez honorés de la présence du plus grand des Mages, l'élite des érudits, l'Initiateur des Miroirs-Portails, le génie d'une génération toujours adulé. Une légende vivante. Z'avez la chance de participer à la quête d'une science, d'une puissance et d'une magie ancienne perdue découverte par le Maître lui-même ! Vous, tous, entrerez dans l'Histoire ! Et serez aussi riche qu'un duc de Changelac ! Une cité abandonnée, jamais pillée, pour sûr qu'elle contient des trésors qui n'attendent qu'à être cueillis !...

Le discours dura si longtemps que certains arrivants durent s'improviser des sièges à l'aide de leur sac de voyage. L'Elfe ne tarit point d'éloges à l'égard du magicien.

Olgeirth ne put qu’acquiescer, peiné d'avoir échoué dans son dernier recours afin de l'épargner. Il avait à peine conscience de l'environnement qui l'entourait, mais il devait se reprendre. Ne point se laisser envahir par la culpabilité ! Il le fallait !

Décidé, il ne reculerait devant rien. Il les conduira tous à la mort.

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