La mission
Par où commencer...
Je suis un agent secret. Oui, vous avez bien entendu, top secret, comme dans les films, sauf que dans mon cas, c'est encore mieux parce que moi, je travaille pour le gouvernement, le vrai, celui qu'on voit dans les théories du complot. Le FBI, la CIA, tout ça. Tiens, ma gâtée, t’as capté ?
Maintenant, vous vous demandez sûrement : "Mais comment t'as fait pour devenir agent secret, toi ?" Franchement, c'est super simple. J'ai bossé pour le gouvernement comme un gars lambda, et puis un jour, ils ont remarqué mes incroyables talents. Là, ils se sont dit : "Ce type vaut le coup. Engageons-le !" Et bam, ils ont supprimé toute trace de mon existence passée. Carrément, je ne sais même plus quand c'est mon anniversaire. Enfin... peut-être que si, mais on va dire que ça fait partie du mythe.
Bref, ce matin-là, j'étais juste parti prendre un café pépère, quand soudain, Billy Boy, mon collègue et ami, me coupe net la route. Il me balance :
— "Ah non, tu attendras."
Lui, c’est Billy Boy, et moi, c’est Billy Boum. Vous voyez le délire ?
Je lui réponds direct :
— "T'as vraiment autant la rage ? C'était juste une blague !"
Et là, il s'énerve encore plus :
— "Si tu trouves que remplacer l'intérieur de mon gâteau d'anniversaire par une fausse bombe est un cadeau, je crois que t'as de sérieux problèmes dans le crâne."
Ouais, OK, c'était peut-être un poil abusé, mais c'est une longue histoire. Je vous la raconterai un jour. Ce qu'il faut savoir, c'est que Billy Boy, d'habitude, est un mec sympa, mais là, il m’en veut grave. Apparemment, chez lui, la rancune, c’est comme un tatouage : ça reste gravé longtemps.
Pendant qu'il me faisait son cinéma, un nouveau gars débarque. Il est tout jeune, à peine arrivé dans la division. On l’appelle Swoden. Vous savez, le genre de petit génie qui va sûrement sauver la patrie un jour. Il nous balance avec un sourire :
— "Salut les Billy Boy et Billy Boum !"
Ah oui, j’ai oublié de vous dire, on était chez la CIA, mais dans la section informatique, là où tout part en vrille pour des raisons obscures. Promis, je vous expliquerai ce bazar un autre jour.
Puis Billy Boy reprend :
— "T’étais au courant pour Ernesto Diablo Paquito ? Ils l’ont emprisonné, ce chef des Serpents Ratés."
— "Ouais, j'ai vu ça," ai je répondu. "Bonne nouvelle, on est débarrassé de cette enflure."
— "Sauf qu’on n’est pas débarrassé du boulot," il soupire.
Je lui lance alors avec un petit sourire :
— "Ne sois pas trop pressé de quitter le métier. T'as encore des chances de croiser de belles nanas, si tu vois ce que je veux dire."
Lui, avec son sérieux légendaire, réplique :
— "T'as dit littéralement 'belles nanas'. Comment je pourrais ne pas comprendre, c’est tellement explicite."
Pas le temps de réagir qu’un autre gars arrive. Cheveux bruns, petite moustache : c’est Billy Bob. Attention, à ne pas confondre avec l’agent Bob, notre supérieur. Billy Bob, c’est l’archétype du collègue insupportable mais qu’on ne peut pas détester totalement.
— "Alors, ça va, les petites bites ?" lance-t-il tout en se servant un café sous mon nez. Sérieusement, ce gars me pousse à envisager des scénarios meurtriers.
Billy Boy éclate de rire :
— "Regarde sa tronche, Billy Boum ! Ça l’apprendra à respecter les files d’attente."
— "Ouais, sauf que moi, je ne me suis pas fait recaler par cinq filles d’affilée," je rétorque.
Billy Bob se marre encore plus et ajoute :
— "C’est vrai qu’il a un beau score de friendzones, notre Billy Boy."
Mais Billy Boy ne se démonte pas :
— "Au moins, moi, j’essaye. Je ne reste pas comme un idiot sans rien dire, contrairement à certains."
La pique était pour moi, évidemment, mais j’ai préféré l’ignorer. Vous savez, stratégie d'ignorement : ça marche toujours avec les mecs comme lui.
C’est alors que nos téléphones sonnent. L’agent Bob, notre boss, nous convoque. Vingt minutes plus tard, nous voilà dans un bureau improvisé à Boston. Là, sans même nous dire bonjour, il nous balance :
— "Messieurs, mission de la plus haute importance. Cette mission devait être pour James Bond, mais il a décliné l’offre. Vacances, vous comprenez. Donc, ça tombe sur vous."
Là, on se regarde, incrédules. Bob continue :
— "Votre mission si toutefois vous l'acceptez est simple : vous devez récupérer deux caisses de plutonium. L’une est en circulation dans Boston, et l’autre est entre les mains de Midas Palabras, chef des Aigles Enragés."
Je ne vais pas mentir, c’était beaucoup d'infos à digérer d’un coup. Mais en voyant le regard déterminé de Billy Bob, j’ai décidé d’accepter. Évidemment, lui aussi a dit oui. Après tout, des missions comme ça, ça ne tombe pas tous les jours.
Sauf que Billy Boy, contre toute attente, lâche :
— "Sans moi, les gars."
Je reste sans voix.
— "T’es sérieux ?" je demande. "C’est une mission ultra-importante, mec !"
— "J’ai des trucs à faire."
— "Attends, qui dit mission de James Bond dit belles nanas…"
Il réfléchit une demi-seconde avant de changer d’avis :
— "OK, finalement, je peux me libérer."
Bob nous fixait avec une intensité telle qu’on aurait dit qu’on venait de prononcer une incantation interdite. Finalement, il lâcha sur un ton grave :
— " Vous ne comprenez pas, hein ? Ce plutonium, dans de mauvaises mains, pourrait littéralement réduire des villes entières à néant. Ce n'est pas une mission banale. Vous DEVEZ le récupérer, peu importe les moyens nécessaires. "
Après une demi-heure de blabla ponctuée de termes techniques et d’expressions pompeuses, on reprit la route pour retourner à la base. Je vous épargne les détails ennuyeux de ce trajet, sauf pour vous dire qu’une fois arrivés, on s’est effondrés sur les premières chaises pliantes qu’on a trouvées. Ces foutues chaises ! Elles grinçaient tellement qu’on aurait dit qu’elles allaient rendre l’âme à chaque mouvement. Quant à la table en métal bancal devant nous, elle tremblait au moindre contact, menaçant d’éjecter tout ce qu’on posait dessus.
Swoden était là aussi, avec sa tête d’informaticien tracassé. Il marmonnait des trucs à propos de vie privée et de libertés individuelles. J’ai décroché dès la deuxième phrase. Sérieusement, qui s’inquiète encore de ces conneries à la CIA ? Tout le monde est sur écoute, et alors ? Personne ne le sait, et même si quelqu’un l’apprenait, il continuerait sa vie comme si de rien n’était. Faut bien sécuriser la patrie, non ? Bref, pendant qu’il déversait ses états d’âme, il nous servit un café.
Par chance, je ne fis pas l’erreur de Billy Bob, qui posa sa tasse sur la table instable. Évidemment, celle-ci se renversa en une fraction de seconde, inondant la surface et ruinant ses notes. Je ne vous raconte pas la crise qu’il piqua en nettoyant tout ça.
Billy Boy reprit alors la conversation avec un air sérieux, pour une fois :
— " Bon, si j’ai bien capté, on doit récupérer deux caisses de plutonium. Une qui se balade on ne sait où dans Boston, et une autre qui est planquée chez Midas Palabras, le big boss des Aigles Enragés. "
Billy Bob, fidèle à son impulsivité légendaire, proposa :
— " Et si on attaquait directement Midas ? Comme ça, on règle le plus gros problème en premier. "
J’ai senti la sueur perler dans mon dos à cette idée. J’étais peut-être un agent secret, mais foncer tête baissée contre un criminel surnommé le frigo américain, ça ne me tentait pas du tout. Alors j’ai tenté de sauver ma peau :
— " Pourquoi ne pas se séparer pour gagner du temps ? Deux enquêtent sur le plutonium en ville, et l’autre s’infiltre chez les Aigles Enragés. On se retrouve ce soir au bar de ‘Le Poto Tony’. "
À mon grand soulagement, personne n’a exprimé de désaccord. Mais mon soulagement fut de courte durée, car Billy Boy lança :
— "Super idée. Alors toi, Billy Boum, tu t’infiltres, et nous, on cherche la caisse. "
Billy Bob, hilare, ajouta :
— "Une idée brillante, pour une fois. Merci de te sacrifier, vieux. "
Avant même que je puisse protester, ils étaient déjà en train de planifier leur mission. Trop tard, j’étais fichu.
Quelques heures plus tard, me voilà à attendre dans une ruelle sombre, seul, comme un imbécile. Les minutes s’égrenaient, et le stress montait. Finalement, un type louche apparut. Il tenait un couteau et marmonna d’une voix tremblante :
— " T-toi là ! Donne-moi tout c’que t’as, sinon t’iras rejoindre Elvis Presley ! "
Je remarquai un tatouage d’aigle sur son bras. Jackpot ! Je sortis immédiatement mon atout secret : un bon vieux coup dans les maracas. Simple, efficace, redoutable. L’homme s’écroula, gémissant de douleur.
En fouillant ses poches, je tombai sur un téléphone à l’écran complètement fissuré, quelques billets froissés, et, surtout, une mine d’informations. Le téléphone contenait tout : son nom, son prénom, sa couleur préférée, et même le nom de son poisson rouge, Bidibull. Plus important encore, il y avait une carte indiquant cinq repaires des Aigles Enragés à Boston. Bingo.
Après avoir reproduit son tatouage sur mon propre bras (merci mon talent pour le dessin et les Malabar), j’étais prêt à m’infiltrer.
Quand la nuit tomba, je rejoignis Billy Boy et Billy Bob au bar. Ils étaient attablés dans un coin, l’air épuisé. En les écoutant, j’appris qu’ils avaient passé la journée à suivre une piste absurde digne d’un escape game, en parlant à des informateurs aussi utiles que des tutos Excel.
De mon côté, je partageai mes découvertes. Billy Boy éclata de rire en voyant mon tatouage et lança :
— "Eh, on dirait que t’es prêt pour un casting de motards ringards ! "
Billy Bob, lui, ne put s’empêcher de balancer une pique :
— "Sérieux, ton flow est tellement éclaté que même Florent Pagny l’aurait recalé. "
Je voulus répliquer (même si je ne sais pas qui est Florent Pagny), mais ma répartie légendaire était déjà partie se coucher. Alors j’optai pour la meilleure stratégie : ignorer et siroter mon verre.
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