"Et donc, qu'est-ce qu'il t'est arrivé pour que tu soies amoché comme ça ? demanda Pratha après une longue inspiration.

- Si t'avais vu ça... sourit Gopta. Le Grand Qalam a organisé un tournoi. On a livré un combat exemplaire, avec Djéma. Tu n'en aurais pas cru tes yeux. Tu sais... Je les respecte, lui et ses amis. J'ai du mal à croire ce que tu viens de me dire. Même Jébril est devenu beaucoup plus calme et ouvert au fil des jours. Je suis sûr qu'il y a une erreur de jugement, quelque part.

- C'est tout à fait possible. Mais tu seras d'accord avec moi; ce qui compte le plus, c'est la survie du Chram. Le contexte actuel ne nous permet pas de faire autrement qu'en les retrouvant et les livrant à l'autre qâphi", pesta Pratha.

Les deux amis se contemplèrent en silence, effrayés à l'idée de violer l'une des lois les plus fondamentales d'Eshev. Pourquoi, par la vénéria, Sayyêt et ses hommes n'avaient-ils pas choisi une autre destination, pour demander l'asile ? En échange de leur mise au service des patelins de la région, ils auraient pu vivre grassement, sans que leur présence ne soit soupçonnée avant une éternité. Une idée occupa la conscience de Pratha.

Et si... la fin du Grand Qalam était plus proche que ce que tout le monde pensait ? Et si... Eshev lui-même avait entamé son déclin inéluctable ? Comment expliquer autrement ce coup improbable du sort qui s'abattait sur les pauvres têtes des habitants du Chram ?