Chapitre 64

14 minutes de lecture

— Ben voilà ! C’était pas compliqué !

Le baron Livresse lâcha un soupir d’une évidente satisfaction tout en levant les bras au ciel. En contrebas, la géante des Scies venait de croquer la jambe valide du capitaine de la Perle Bas-fonds et ce dernier hurla enfin lorsqu’elle le jeta par-dessus son épaule à l’attention des créatures semblables à des oursins sur pattes. Brisé, démembré et gisant sur la pierre coupante, Lombric hurla encore lorsque les abominations se jetèrent sur lui.

Le baron du Lion, lui, s’affala enfin dans son fauteuil sans prendre la peine de cacher son soulagement devant le regard on ne peut plus inquisiteur de Tamp. En effet, la grosse dame ne disait toujours rien mais ses yeux parlaient pour elle.

— Une coupe pour moi aussi ! s’exclama Livresse. Servez-vous tout le monde, c’est ma tournée !

— Je paye pour cela, fit remarquer l’Archevêque avec agacement.

— Oui, oui…

Clare ne faisait aucunement attention au manège des deux barons. « Ezie » courait à perdre haleine et contrairement à la majorité des participants, il avait pris le parti d’emprunter un chemin bordant les parois de la cuvette dans laquelle logeait la Gargantesque.

— Mais que fait-il ? s’exclama l’Archevêque.

Du haut de son promontoire, la géante des Scies observait calmement le jeune homme fuir à toutes jambes. Son fendoir sur l’épaule à la manière d’Harlequin et son épée, elle semblait jouir du spectacle qui s’offrait à elle et savourer un moment tout particulier. À première vue, l’immense vague qui se rapprochait à toute vitesse ne l’inquiétait pas le moins du monde. Avec son long manteau rapiécé tout en peau de bêtes et sa chevelure hirsute lui donnant des airs de champignon géant, elle était telle une effrayante mégère de contes horrifiques.

Soudain, elle s’élança dans une course terrifiante qui fit trembler toute sa masse et agita furieusement ses graisses. Le fendoir toujours sur l’épaule, elle partit à la poursuite de sa proie qui venait d’effectuer plusieurs rouler bouler en évitant deux des tentacules de la Gargantesque l’ayant également pris pour cible.

Clare grimaça en voyant le jeune homme se relever pour se plaquer contre la roche tout en s’étreignant le torse. Malgré tout, il repartit dans cet énorme escalier en colimaçon naturel. Sautant des marches inégales tandis que la géante les dévalait indubitablement plus vite.

— Il n’y arrivera pas, murmura-t-elle pour elle-même.

C’est alors qu’un tentacule particulièrement gros se saisit de la géante des Scies au moment où elle atteignait sa cible. L’instant d’après, elle se retrouvait dans les airs dans une imitation de son geste avec Lombric, avant que d’autres tentacules ne s’enroulent à leurs tours sur sa gigantesque personne. Le grondement qu’elle poussa couvrit un temps celui de la Gargante. Enfin, le fendoir émergea de la masse tentaculaire et se mit à tailler furieusement dans une gerbe de sang et de crocs.

— Yanis, on ne peut pas faire ça ! S’il te plaît, aide moi !

Mais le soldat ne s’approcha pas. La main toujours tendue en direction de Jalil qui soutenait Caes seul, il restait inflexible.

— Nous n’y arriverons jamais avec ce poids mort, dit-il. On le laisse là !

— S’il te plaît, supplia le jeune médecin.

Des larmes roulaient sur ses joues alors qu’il pliait sous le poids du chevalier. Jalil n’était guère épais et, sans Yanis, il n’avait aucune chance.

— Personne ne nous voit ici, argua le garde de l’Échanson. Personne ne saura !

En effet, ils avaient trouvé refuge sous un pont de pierre lorsque l’armée de mantes religieuses avaient attaqué leur groupe. Les créatures avaient dépecé leurs victimes si vite qu’une véritable brume sanguine s’était abattue sur eux, les plongeant dans une panique totale. Ils étaient tombés dans ce ravin de pierre hors de vue des monstres et du public.

— Il ne sentira rien, continuait Yanis. Il ne se réveillera pas. Ce sera rapide.

La peur habitait le regard du garde. Une peur panique et Jalil sut qu’il ne pourrait jamais le résonner. Il avait déjà vu cela auparavant. Son métier l’avait amené à voir une foule de comportements et il avait assez d’expérience dans ce domaine, en dépit de son jeune âge, pour savoir quand il n’avait aucune prise.

— Ce sera notre secret, Jalil, dit doucement Yanis dont la voix était pressante. Ce sera notre secret à tous les deux. Jamais je ne le dirai à qui que ce soit, tu as ma parole. Tu peux me faire confiance.

Le jeune médecin étouffa un sanglot tout en se cramponnant au chevalier inconscient. Il avait peur. Peur de mourir, peur de souffrir et peur des créatures qui les entouraient.

— Ils ont sacrifié les nôtres, Jalil !

La douceur avait laissé place à un ton haineux et Jalil enfouit son visage dans le cou de Caes. La tentation était là, aussi présente que sa peur. Et elle était comme un poison à deux doigts de prendre le contrôle de son esprit.

— Ils peuvent aussi mourir pour nous…

— Non…

— Elban ne le saura jamais.

— Non ! lâcha le jeune homme plus fort.

Il ne levait toujours pas la tête et il s’agissait là de la seule chose qu’il pouvait opposer à la démence du garde de l’Échanson. Ce dernier garda le silence quelques secondes.

— C’est ta décision, murmura le garde.

Les sanglots reprirent Jalil alors qu’il l’entendait tourner les talons pour s’enfuir.

— Caes, s’il te plaît…, pleura-t-il. S’il te plaît, réveille-toi…

— Quelque chose me dit que ça va pas être faisable tout d’suite !

Avec un hoquet, Jalil leva la tête vers le nouvel arrivant qui attrapa l’autre bras du chevalier.

— Pov’ connard ! s’écria-t-il, stupéfait.

— Ce n’est pas mon foutu nom, j’te signale ! rétorqua l’homme en lui adressant son curieux regard cave. Je m’appelle Hector !

— Hector…

Le gredin sourit de toutes ses dents en adressant un clin d’œil à Jalil. Soudain, il se figea et indiqua un renfoncement rocheux obscur dans lequel ils s’empressèrent de trainer le chevalier. Là dans la pénombre, ils retinrent leurs respirations alors que l’ombre du Scie emplissait la crevasse. La créature était sur le pont de pierre et restait immobile, à l’affut.

Hector et Jalil échangèrent des regards angoissés. Le premier avait la main en suspens, dans un geste inutile pour imposer le silence. Dans ce dernier, ils attendirent.

Et le raz de marée approchait.

Après ce qu’il leur parut une éternité, un grondement retentit enfin et ce n’était guère celui de la Gargante. Celui-ci, ils l’avaient entendu et ressenti maintes fois dans les Fosses. À son écoute, l’ombre du Scie se redressa. Un cri plus tard, dans une course lourde mais incroyablement rapide, il disparut.

— Vite ! s’écria Hector. On a plus beaucoup d’temps !

Un sourire aux lèvres tant il était soulagé, Jalil acquiesça tandis qu’ils relevaient Caes pour reprendre cette course contre la montre. Un sourire qui disparut alors que le haut de la vague était déjà visible de leur position. Quelque part, au-delà des murs de pierre, un rugissement retentit.

Comme venait de le dire Hector, il n’avait plus beaucoup de temps.

Ezie n’était visible nulle part et le combat auquel ils assistaient était invraisemblable. Grondant aussi fort que la Gargante, la géante des Scies découpait méthodiquement la Gargantesque dont les gueules se brisaient sur leur supposé dîner. Si dans un premier temps, la pieuvre ne semblait pas disposée à abandonner, la minute suivante l’avait faite changer d’avis. Surtout après la perte de pas moins de quatre tentacules. Elle tentait maintenant de trainer sa formidable masse hors de la cuvette dans une piètre tentative d’échapper à son opposante. Cependant, celle-ci n’était guère disposée à laisser s’enfuir son agresseur. Hachant avec constance, elle mettait la Gargantesque en morceaux et les hurlements des multiples gueules avaient maintenant une tonalité bien différente alors qu’un sang noir comme le charbon jaillissait des membres coupés. Se déversant ainsi dans la cuvette en torrents.

Le silence régnait en maître dans la cinquième tortue. Y compris dans leur loge. Si Sybille, l’Échanson, dame Lise, Tamp ou encore les apôtres ne montraient pas la moindre émotion, il en était autrement pour l’Archevêque et les autres barons. L’Écureuil, le Rat et la Fourmi se ratatinaient sur leurs sièges. Livresse, lui, avait plaqué sa main sur sa bouche et écarquillait les yeux avec un effroi non dissimulé.

Pourtant, la réaction la plus marquante était sans doute celle de l’Archevêque lui-même. Les lèvres tremblantes et le regard aussi incertain qu’angoissé, il observait le combat qui faisait rage les mains jointes plaquées contre sa poitrine. Avec l’immense vague en arrière-plan venant à la rencontre des dantesques créatures qui s’affrontaient, la scène avait définitivement des airs de fin du monde. La sauvagerie du Scie était à couper le souffle, de même que sa puissance ou cette impression d’invulnérabilité qu’elle dégageait. Les briseurs de destins semblaient aussi inéluctables que ces derniers.

La Gargante, elle-même n’était pas en reste. Le reste du cirque était la proie de centaines de scènes d’horreur toutes plus sanglantes les unes que les autres. Les prisonniers étaient tués de dizaines de façons et dévorés dans des hurlements à glacer le sang. Non, même le public des Jeux ne célébrait guère en cet instant. Ce qui se déroulait en contrebas était une véritable catastrophe dont le raz de marée magnifiait l’envergure. Et tous ici savaient que les organisateurs n’avaient aucun contrôle sur ce qu’ils avaient déclenché. Il y avait à l’œuvre ici des forces qui ne pouvaient être domptées.

En aucune façon.

Lentement, Lamia s’était levée et elle penchait la tête d’une curieuse manière. Clare la connaissait bien pour la savoir au comble de l’extase. Et elle savait aussi que ce n’était pas les morts ou les atrocités qui mettaient la dame de parage en transe. Il s’agissait du tableau tout entier et de son intensité. À raison de choquer son entourage qui se ratatinait encore plus devant cette expression admirative, Lamia ne voyait tout simplement pas les choses comme le commun des mortels.

Nul doute qu’après cela, elle allait créer.

Le Scie mâle ne tarda pas à faire son apparition, sautant à son tour sur la Gargantesque, il alterna les coups de sa monstrueuse masse et de ses griffes. Au grondement que la femelle poussa, il se recula précipitamment en gémissant avant de se jucher d’un bond sur l’un des bords de la cuvette. D’une main, la géante retenait la pieuvre par un tentacule, de l’autre elle pointa son fendoir en direction des trappes et de la muraille d’eau. Grondant de nouveau, elle reprit son œuvre tandis que le mâle se précipitait vers son objectif. Un jeune homme désormais visible et qui longeait une saillie dans une course trébuchante. Il se trouvait toujours dans le dédale de roche du cirque et n’avait pas encore atteint le terrain argileux sur lesquelles les trappes étaient disposée.

Ezéquiel était à deux doigts de tomber sur l’un des enfers qui se déchaînaient quelques mètres en dessous de lui. Le dédale de la Gargante était labyrinthique et il était impossible de passer les créatures qui y pullulaient. Surtout lorsque ces dernières étaient conscientes de la présence de nourriture. Vite bloqué par des amas de corps en train d’être dévorés, il s’était décidé à grimper l’une des abruptes parois pour traverser ce piège mortel en hauteur. Une chose qu’il n’avait pas oublié de Brick quelques épreuves plus tôt.

Tentant de ne pas regarder en bas, il luttait pour garder les bras écartés, et non les plaquer sur son flanc à chaque coup de poignard que lui infligeaient ses côtes brisées. Il perdrait automatiquement son équilibre s’il y cédait. Mais par les Architectes, que c’était difficile. Il essayait aussi de ne pas regarder le gigantesque mur d’eau qui se précipitait à sa rencontre dans une implacable déferlante.

Les hurlements fendaient l’air comme de tranchantes mélodies, colorant le grondement de la Gargante ainsi que les cris de la gargantesque en train d’être littéralement hachée par la géante des Scies. Au sein de ce concert et luttant pour conserver son équilibre, Ezéquiel avait le sentiment d’évoluer sur un monde horrifique inconnu. Tout ici lui semblait être sorti d’un esprit malade. Les scènes à vomir autour de lui, les horreurs, ce combat titanesque dans son dos, ce public le surplombant ou encore cette vague annonciatrice de la fin.

Il se sentait minuscule et était cruellement conscient de sa vulnérabilité. Pour ainsi dire, et bien qu’il continue de courir en dépit de la douleur, il ne voyait pas de lumière au bout de ce diabolique tunnel. C’est à ce moment précis qu’il plongea tête la première dans la galerie sur sa droite. Une des créatures semblables à une mante religieuse marqua un temps d’arrêt alors qu’il la percutait pour littéralement rouler sur son dos. Le cri de surprise qu’elle poussa se mua en un crissement dans l’explosion de roche que le Scie provoqua en abattant son monstrueux maillet à l’endroit même où se trouvait sa proie un instant plus tôt.

Ezéquiel ne se retourna pas et couru à perdre haleine dans le dédale. La douleur explosait dans son corps en une indescriptible et insoutenable palette. Il sentait le Scie dans son dos le rattraper en un clin d’œil. Il imaginait déjà le maillet maintenu par cette horrible main aux griffes démesurées l’aplatir contre la roche souillée.

Débouchant sur une intersection, il négocia maladroitement pour prendre le chemin de gauche. Il eut à peine le temps de constater qu’il s’agissait d’un cul de sac qu’une forme surgit de l’autre direction pour le percuter dans une nouvelle explosion de douleur.

— Non ! hurla une voix familière au travers de sa vision voilée. La plage est juste là ! Les portes sont juste derrière cette…

Yanis frappa de son poing la roche avec un sanglot alors qu’il avisait les parois glissantes qui s’élevaient à plusieurs mètres de hauteur. Rendant ainsi leur escalade impossible. Dans le dos du jeune prince, le dédale s’élargissait en un cirque miniature suffisamment grand pour les cacher aux yeux du public et les empêcher de voir la vague.

Ou même de s’échapper.

Sa vision s’éclaircissant en une fraction de seconde, Ezéquiel se releva promptement en refoulant un gémissement.

— Yanis…, éructa-t-il péniblement. Caes ? Jalil ? Où sont… ?

L’ancien garde cessa de marteler le mur avant de se tourner vers lui. Il niait de la tête en continue tout en fuyant son regard.

— Je suis désolé…, gémit-il. J’ai eu peur… j’ai… peur…

Ezéquiel se figea à ses paroles.

— Yanis… qu’as-tu fait ?

Celui-ci sembla sur le point de lever les bras au ciel mais ces derniers s’immobilisèrent à hauteur de hanches avant qu’il ne les laisse retomber sans force. Il releva vers le jeune prince un regard où la culpabilité régnait en maîtresse.

— Je suis désolé, murmura-t-il.

Le maillet du Scie l’aplatit dans une gerbe de sang et de membres. Les griffes précédèrent le gigantesque visage de la chose, cliquetant sur la paroi avant que n’émerge de l’intersection ce regard obsessionnel. Avec une expression d’impatience douloureuse, le géant se faufila avec une effroyable agilité à travers le corridor naturel. Débouchant avec précipitation devant sa proie qui était tombée à genoux.

Alors que le Scie longeait la roche tout en lui tournant autour, Ezéquiel, les paumes plaquées à même le sol, ne bougeait pas. Sur son visage figé se mêlaient incompréhension et déni, ainsi qu’une profonde peine. Un autre type de souffrance qui semblait avoir balayé sa douleur physique. Une souffrance vrillant son cœur telle la corde d’un instrument en vibration.

Caes…

Dans son dos, le Scie se passa la langue sur les lèvres alors qu’il levait le maillet qu’il tenait des deux mains à la manière d’une batte. Sa proie ne bougeait toujours pas et le besoin de la fracasser contre la roche devenait impérieux. Tout comme l’idée de lécher ses chairs éparses contre ce mur acéré. L’excitation du géant brouillait sa vue, focalisant son attention sur la silhouette prostrée qu’il dominait. Le destin était si fort que l’air semblait pulser autour d’eux, se strillant de lignes noires jusqu’à prendre une constance qui fit hésiter la créature. Elle leva la tête, interloquée en percevant une vibration. Une vibration qui donna lieu à une note des plus particulières. Ténue, elle semblait pourtant venir de partout à la fois, bien que son origine soit évidente.

Les distorsions dans l’air était plus concentrée autour du jeune homme au sol. De même que la vibration… plus forte.

— Non, murmurait-il pour lui-même. Non…

Sans attendre, le Scie smasha littéralement sa proie de son maillet.

Il percuta le sable dans une série de rouler-bouler qui ravivèrent ses blessures et le firent émerger de sa léthargie. Ezéquiel cria lorsqu’il roula sur une pierre de la taille d’un poing, ses côtes subissant cet énième tourment. À deux doigts de s’évanouir, il tint pourtant bon et se releva promptement en dépit de la douleur pour laisser échapper une exclamation où se mêlaient surprise et terreur. La déferlante venait à sa rencontre et elle le surplombait de si haut que, bien qu’il soit ancré sur le sable plat, il se sentit perdre l’équilibre.

Que venait-il de se passer ?

Dédaignant la trappe à côté de lui, il fit volte-face contre tout bon sens pour voir l’œil du Scie le dévisager à travers un trou dans la muraille rocheuse de la Gargante. Une vision qui lui rappela l’être derrière le monde blanc. En dépit du temps lui manquant, il ne pouvait détacher son regard de l’ouverture dans la roche. Une ouverture qui n’était pas là la minute d’avant.

C’est alors que deux silhouettes émergèrent du dédale à une quarantaine de mètres sur sa gauche. Deux silhouettes qui en soutenaient une troisième et Ezéquiel laissa échapper un gémissement de soulagement. Jalil et l’acolyte de Lombric se dirigeaient vers la seconde trappe face et accéléraient en dépit de leur fardeau. Ils allaient y arriver. C’est à ce moment que surgit à son tour une immense scolopendre rugissant et lancé à leur poursuite.

— Merde !

Sans réfléchir, Ezéquiel se lança dans une course chancelante. Le trio avait remarqué la créature et Pov’connard poussa Jalil pour prendre Caes sur son épaule sans même s’arrêter tant la peur lui donnait des forces. Repartant de plus belle, ils n’étaient plus très loin de la trappe bien que cela ne suffise pas. La chose aurait le temps de rentrer à l’intérieur également avant qu’elle ne se referme sous l’action de l’eau.

Se pliant dans sa course dans un autre gémissement, Ezéquiel ramassa une nouvelle pierre et accéléra encore. Des larmes de douleur dans les yeux, il arma son bras et lança son projectile dans une explosion de souffrance.

La scolopendre rugit lorsque la pierre s’écrasa à l’arrière de sa « tête ». Elle changea aussitôt de trajectoire et se lança à la poursuite du jeune prince qui courait déjà péniblement vers l’autre trappe. Ses jambes semblaient être de plomb et sa poitrine brûlante n’était qu’un léger encombrement en comparaison de la douleur à son flanc. Sa vision était toujours aussi trouble et son esprit était embrumé par la fatigue et la douleur. Il sentait la scolopendre dans son dos se rapprochant toujours plus près. De même que la vague qui avait déjà parcouru bien huit cents mètres et l’atteindrait dans quelques secondes seulement.

Il n’y arriverait pas.

Sa fatigue se volatilisa lorsqu’il entendit le bruit de course incroyablement rapide du Scie sur sa gauche. Il accéléra alors que le géant balayait de son maillet la scolopendre qui fusa littéralement sur des dizaines de mètres pour aller s’écraser sur la vague qui avait déjà avalé la moitié du reste de sa distance. Le monstre cria dans son dos et Ezéquiel accéléra encore dans un instant où il fut affreusement conscient de ce qu’il l’entourait. Le Scie, à un souffle de lui. La trappe devenue encore plus sombre à l’ombre de la déferlante qui les enveloppait déjà. Son propre souffle et ses battements de cœur qu’il percevait avec acuité en dépit du vacarme de la Gargante.

Il sentit la masse du géant s’abattre dans son dos et il hurla avant de plonger vers la trappe alors que cette dernière et la vague le heurtaient de plein fouet.



Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire t-sabe ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0