7. Une Prophétie Complète
An 2691, Eclexys, la capitale de l'Empire Xvii.
Un Xvii imposant, musclé, aux épaules carrées, grand d'environ trois mètres, habillé d'une tenue qui fut autrefois royale, pleine de couleurs et de symboles représentant son appartenance à la famille impériale des Xvii, mais qui maintenant n'est qu'une tenue délavée, déchirée, sale avec des traces de sang séché un peu partout.
Il marche parmi les débris, dans une cour intérieure située en hauteur dans la capitale, offrant une vue panoramique sur celle-ci. Dans une cour intérieure où une fontaine coulait autrefois paisiblement, où des oiseaux de toutes les couleurs et de toutes les tailles venaient s'hydrater. Une cour intérieure où les jeunes Xvii de l'Académie des Arts venaient se reposer, rire, aimer. Son regard s'attarde sur un banc adossé à un mur légèrement sur le côté.
Mais il continue de marcher. Sa silhouette imposante dissimule une autre personne qui le suit derrière lui.
Il s'arrête au bord d'une falaise, ses doigts de pied presque dans le vide. Son regard, empreint de regret et de chagrin, balaye la capitale en ruine, détruite. De la fumée s'échappe de part et d'autre à travers différents bâtiments un peu partout. Des dragons volent dans les cieux, crachant occasionnellement leur feu dévastateur probablement envers des Xvii qui ne sont pas encore tombés.
"On a perdu", dit-il d'une voix grave. "J'ai perdu", en se passant la main sur le visage. Il reste ainsi à contempler la scène pendant un moment.
"Nous ne sommes pas différents des autres races mortelles. Notre ego nous a perdus. Notre recherche dans le perfectionnement de notre art nous a aveuglés, nous nous sommes pris pour ce que nous n'étions pas : des êtres divins." Puis il lève sa main droite et, tout en récitant la prophétie, il la bouge en même temps, comme s'il la récitait avec sa main :
"Dans la Trame de l'Eternité, une fleur sera créée, une Lys. Lorsque ses sépales s'ouvriront, une vague de magie lumineuse soufflera sur le monde, l'inondant de sa promesse de vie. Lorsque ses pétales absorberont la lumière du soleil, ses protecteurs pourront atteindre le pouvoir des Divinités. Lorsque son pollen sera prélevé, le premier changement de la Trame de l'Eternité fera changer la Roue du Temps... Et la convoitise emplira le coeur de quiconque posera les yeux dessus." Il soupire. "La prophétie incomplète a été complétée, mais bien trop tard. Nombre de Xvii ont essayé de nous prévenir à travers ce dernier millénaire. Mais nous avons fait la sourde oreille, pour ce que ça aurait changé..." Un petit rire s'échappe de sa bouche et il laisse son bras retomber à ses côtés. "Ironique, non ? Une race qui se vante d'avoir conquis le monde par sa sagesse et son intelligence bien plus développée que les autres se fait avoir par sa sagesse et son intelligence en question. La convoitise.... tout mes ancêtres aurait rit à la lecture de cette phrase. Mais la convoitise dans le coeur des Dieux ?." Il soupire.
Il regarde le ciel nuageux. "Est-ce réellement une prophétie ? Ou simplement une prédiction prévisible des conséquences lorsque la cupidité et la connaissance vont de pair ?" Il baisse son regard. "L'histoire se souviendra de moi comme étant le dernier Empereur de l'Empire Xvii. L'Empereur qui a mené son peuple à l'annihilation. Alors qu'en réalité, c'était un effort de groupe, qui remonte à mes ancêtres."
Une voix féminine et autoritaire, habituée à être entendue et obéie, lui répond : "L'histoire ne se souviendra pas de toi, Xalgran. Toi, ton père, ton grand-père et toutes les générations d'Empereurs qui t'ont précédé seront effacés de l'histoire. Votre Empire, enfoui au plus profond de la terre. Votre art, votre savoir et votre culture, oubliés à jamais, tel est votre châtiment." Xalgran ne réagit pas. Après un court silence, il répond :
"Tu étais là lors de sa création, hein ? Lors de la création de la Fleur de l'Espoir." La femme ne répond pas. "Je me souviens quand j'étais petit, tu avais rendu visite à ma mère avec qui tu t'entendais très bien. Oui, j'écoutais aux portes à cette époque... Je me souviens que tu lui avais raconté l'horrible souvenir que tu en avais gardé. Un funeste jour où plus de cinquante mille Xvii ont été sacrifiés contre leur gré, sans qu'ils le sachent, à part une poignée qui avait réussi à échapper au contrôle hypnotique de la rune. Tu lui avais aussi dit à quel point Kahena t'effrayait, tout ton être te criait de fuir. Que ta mère n'a plus jamais été la même après ce soir-là... Telles ont été les conséquences de laisser une divinité posséder son corps."
Une épée se pose contre son cou. "Fais attention aux prochains mots que tu prononces, Xalgran, il y a pire que la mort en ce monde." dit la femme, d'une voix froide et sèche.
Xalgran sourit. "Tu es bien plus qu'une archange au service des dieux, Sorenne."
Sorenne, de ses yeux bleus et or qui reflètent la dualité de son héritage divin, dotée de cheveux blonds attachés en queue de cheval, dans la cuirasse de platine de sa mère, déploie ses trois grandes et larges paires d'ailes majestueuses, blanches comme la neige où chaque plume semble vibrer d'une énergie mystique, lui conférant une aura divine et indéniablement puissance.
"Tu n'es pas en position de me dire qui je suis, Xalgran."
"En effet, je ne le suis pas. Tu es la Championne des Entités mythiques, la plus puissante d'entre tous sur Arsare... Ne t'es-tu jamais demandé pourquoi les dieux nous ont approchés, au tout début ? Dans un monde où le Dragon du Chaos et le Dragon de l'Harmonie étaient déjà présents bien avant qu'ils n'arrivent ici ? Pourquoi est-ce que leur progéniture se sont rebéllé contre eux ? Provoquant une guerre si destructrice que ses conséquences sont arrivé jusqu'ici ?"
Sorenne garde le silence.
"À genoux", ordonne-t-elle.
Xalgran se met à genoux, l'épée de Sorenne toujours posée contre sa gorge. Elle se place devant lui, le dominant maintenant de toute la majestuosité de ses origines.
"Un dernier mot ?"
Xalgran la regarde.
"Réfléchis à ce que je t'ai dit. C'est certes la fin pour nous, Sorenne. La fin d'un âge. Mais tant que la Fleur de l'Espoir existera, les mondes continueront à être déchirés par les conflits, pas juste Arsare, pas juste celui des Dieux, les conséquences de notre création n'en sont qu'au début. Le futur s'annonce effrayant. Réfléchis à ce que je t'ai dit, Sorenne. Tu as la confiance des dragons originels, tu partages un lien spécial avec le Dragon du Chaos. Demande-toi pourquoi. La vérité n'est jamais ce qu'elle semble être. Retrouve la Fleur de l'Espoir, et détruit-la." Xalgran se tait et soupire. Sorenne lève son épée au-dessus de la nuque de Xalgran. "Adieu, Sorenne. Puisses-tu trouver la paix." Et elle l'abaisse, transperçant Xalgran, son épée plongée dans la nuque du dernier Empereur de la dynastie Xvii. Elle reste ainsi, ses mains serrées sur la poignée de son épée plantée profondément dans la nuque de Xalgran, son regard froid fixé sur lui. Un moment passe, son regard s'adoucit dans un murmure elle dit:
"Adieu... Mon ami."
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