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Quinze jours après la rentrée, coup de sonnette et je vois mon Nathan avec un gros sac.

— Je me suis enfui de chez mes parents. Je peux vivre avec toi ?

Il était gonflé ! Il ne me demandait pas une aide, un hébergement, mais carrément de vivre avec moi ! De toute façon, il était vingt heures passées, je n’avais pas le choix. Et mon cœur battait la chamade.

— Entre !

Il posa son sac.

— Sympa, chez toi. Tu étais en train de diner ?

— Oui ! Je suppose que tu as faim ?

Il s’installe. Nous partageons mon diner.

— Tu es parti ou tes vieux t’ont foutu à la porte ?

— C’est plus compliqué que ça !

— Raconte !

— Je me suis engueulé avec ma mère, pour des conneries. Je savais que le paternel allait surenchérir en rentrant. Alors je suis parti en disant que j’allais dormir chez un copain, qui habite à côté du lycée.

— C’est lequel, ton lycée ?

— Campo !

— Mais il est à l’autre bout de la ville !

— Je me lèverai plus tôt !

— Nathan ! Dis-moi la vérité.

— Cela fait plus d’un mois que nous avons couché ensemble. J’ai tellement envie de recommencer. Avec toi. Chaque soir !

Que répondre ?

— Nic, dis-moi que tu es d’accord, steuplé. Dis-moi que tu es content de me voir…

Cinq semaines et trois jours ! Je savais bien ! J’avais compté chaque seconde. Je ne l’avais pas relancé. C’était un gamin, il était mineur. C’était juste impossible. Il me mettait devant le fait accompli. Je n’aime pas qu’on m’impose les choses.

— Nath, c’est OK pour ce soir. Pour la suite, je ne sais pas !

Il me sauta au cou, m’embrassa sur les joues avant de retrouver le chemin de mes lèvres. Mon Dieu, que ce garçon était doux, qu’il était agréable de partout. Il me tira vers le couloir, cherchant ma chambre. Il était chez lui.

Tout de suite, nous plongeâmes dans un amour fou. Il n’avait rien oublié de mes conseils. Il y avait réfléchi, car il était un amant formidable. Je ne voulais pas qu’il vienne, car je ne voulais pas qu’il parte.

***

Nous avons commencé notre vie en commun.

— Nic, je ne t’ai pas dit exactement comment cela c’est passé !

— Tu me prends pour un con ? Ça se voyait !

— Je ne me suis pas engueulé avec ma vieille. J’ai juste dit que j’allais dormir chez un pote qui habite à côté du lycée et qu’il pourrait m’aider pour les devoirs.

— Tu as besoin d’aide ?

— T’es fou ! Je suis le meilleur de la classe !

— Nath, tu es mineur ! Tu dois être chez tes parents ! S’ils apprennent que tu vis avec moi, ils vont porter plainte, je risque la prison !

— Ils n’en sauront rien et tu n’as rien à craindre !

— Mais ils ne t’ont pas demandé le nom de et l’adresse de ton pote ?

— Si ! J’ai inventé une adresse. Pourquoi voudrais-tu qu’ils découvrent la vérité ? Ils ne savent même pas que je n’ai aucun pote, que je suis gay et… que je t’aime ! Ils s’en foutent de moi.

— Mais, justement, tu n’as vraiment aucun pote ? Aucun qui va te proposer une sortie ?

— Si, j’ai des potes, mais pas d’ami. Je veux dire avant de te connaitre.

Il s’est donc installé, rayon de soleil permanent, m’instillant sa joie et sa spontanéité. Vivre auprès de lui était un emballement permanent. Vivre avec lui, un festival chatoyant. Nous avons eu du mal à nous accorder sur un point. Il préférait, comme moi, être passif. Il me faisait plaisir, sacrément plaisir, de temps en temps. Je me forçais, un peu, car sa rondelle n’était pas sans attrait. Il adorait que je lui fasse une « feuille de rose ». C’est lui qui m’avait appris ce mot. Ceci dit, brouter sa rondelle fraiche était un vrai plaisir. Nous avons été également été choisir une panoplie de godes, pour nous aider. Il était insatiable !

Chaque vendredi soir, j’allais passer la soirée au Damn’s. Je ne pratiquais plus. L’envie s’était envolée. J’avais dû cramer tous mes capteurs. J’aimais l’ambiance du lieu et, surtout, retrouver la bande de copains. Les invitations à reprendre étaient nombreuses : je leur manquais. Armand était toujours à la recherche de l’extrême. Il me relançait sur la prochaine épreuve suprême, voulant achever sa démarche.

Nathan restait avec moi, malgré de multiples sollicitations. Je remarquais, seulement maintenant, que plus le garçon était beau, plus nombreux étaient ceux qui souhaitaient le faire souffrir. Je l’encourageais à essayer des trucs pas trop méchants. En tant que passif, c’était une voie intéressante. Il eut du mal à accepter, puis comme certains de ses anciens camarades scouts, il devint demandeur. J’assistais aux séances, trop inquiet pour lui et qu’on me l’abime. Quand nous rentrions, il était dans un état second. Nous avions beaucoup en commun.

Le voir ainsi réveilla mes envies. Mon corps sortait de son engourdissement. Je demandais à Anucci de me prendre en main, lui demandant de lever tout ce qui s’était endormi. Le résultat fut décevant. Je savais qu’une seule chose pouvait me faire revenir, mais mon maitre en la matière n’était plus là.

J’avais montré à Nathan le fouet, la poulie, les cordes. Il avait failli s’évanouir. Il était encore loin. Ou il lui manquait un bourreau à la hauteur. Impossible de lui demander.

C’est donc au Damn’s qu’eut lieu mon réveil. La charge en revint à Barnabé, homme solide et fort, qui savait libérer ses coups. Je voulais une séance discrète, mais la rumeur la transforma en soirée spectacle : le retour de Nicolas.

Nathan devint très nerveux à son approche. Il me connaissait trop et avait deviné les conséquences. Il voulut y assister et flancha dès le premier coup. Pour moi, ce fut un déclencheur extraordinaire. Ce coup entraina une érection et une éjaculation immédiate. J’étais revenu dans mon monde.

Les coups m’avaient moins marqué que ceux de William : ils avaient manqué de volonté de mort. Nathan était impressionné et c’est moi qui l’ai soutenu au retour. Il me fit l’amour avec une grande tendresse cette nuit-là.

Il ne comprenait pas ma démarche. Je lui parlais des endorphines et de l’endurcissement du corps qui obligeait le drogué à aller toujours plus loin dans les doses. J’étais un drogué et je venais de faire une rechute. Il lut dans mes yeux mon avenir avec terreur.

Ce réveil suffit. Je repris des séances au Damn’s. Je voyais Nathan curieux de cela, tentant des ateliers de plus en plus hard. Je ne voulais pas qu’il plonge comme moi. Il voulait suivre mon exemple, atteindre le nirvana. Nous nous sommes disputés, sans nous fâcher. Devant tant de beauté et de gentillesse, c’était impossible.

Une autre dispute se leva. Je savais son goût pour la biologie et son attrait pour cette grande université, malheureusement lointaine. Au vu de ses résultats, il était certain d’y accéder. Quand il m’annonça l’abandon de son projet, pour ne pas être séparé de moi, je l’engueulai. C’était sa vie entière, contre un amour incertain. Ce mot le ravagea. Comment lui faire comprendre que la force irrésistible du moment peut avoir un avenir différent. J’ai bataillé, j’ai promis que nous passerions chaque weekend ensemble. Je devais le repousser, renoncer aux merveilleux moments que nous partagions en permanence. Il finit par accepter.

Je savais que notre relation s’estomperait. De toute façon, c’était mieux pour lui. Comme pour William, mes démons étaient revenus. Je devais les affronter seul, sans l’entrainer dans ma dérive que je savais mortelle.

Le printemps approchait. Le souvenir de l’acmé de l’année précédente travaillait le Club. C’était un sujet récurent. Plus d’une dizaine de volontaires voulaient supporter le supplice ultime.

Sans en parler à Nathan, j’annonçais mon souhait de renouveler l’expérience. Cela déclencha le deuxième round.

Je redevenais le Nicolas de toujours. Je me retrouvais. Et j’avais besoin de retrouver mon ange exterminateur. J’étais prêt à affronter la mort dans ses yeux.

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