Chapitre 10 - La nouvelle Gigi

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- Bon... bonjour.

- Ah ! T'es rentré ? La nourriture est prête.


Mais, qu'est-ce-qui se passe au juste ? En début de semaine, je me suis ramassé une belle fièvre après avoir dormir dehors parce que je me suis frotté à Gisèle et aujourd'hui, dîner et bonne humeur m'accueillent dans ce même appartement qui a perdu tout de son côté infecte.

Et moi qui me suis préparé à jouer les ménagères après ma sortie du lycée. J'me suis trompé de piaule ou quoi ?

Je savais bien que le GPS de la Mitsubishi allait finir par vaciller un jour. Ah ! Que la vieillesse est un lourd fardeau.


- Alors, tu rentres ?

Je ne sais pas trop. J'ai un peu l'impression de ne pas être au bon endroit.

Même si, en fin de compte, je n'ai jamais considéré être chez moi, ici.

- Tartiflette ; Coq au Vin ; Pot au feu ; Quiche lorraine ; Crêpes de maïs ; Steak tartare ; Cassoulet ; Huîtres noires. Le choix te revient.

- Hum ! Mer... Merci.

- Je les ai, moi-même, préparé et... et spécialement pour toi, en plus.

Ah bon ? Il y'a cinq minutes, je ne savais même pas que tu t'y connaissais en cuisine.


La nourriture a tellement l'air appétissant. Si j'avais vent des talents culinaires de Gigi, je n'allais même plus penser à aller voir maman en début de semaine.

Ni jamais d'ailleurs.


- Euh ! Vous ne venez pas manger, Sabrina et toi ?

- Hum… Non ! On s'est pris une pizza il y'a vingt minutes.

Une pizza ? Si je savais faire des plats comme ça, j'oublierai les restos et les livraisons de bouffe.

- D’ailleurs, elle est où ? Elle n'est pas là ?

- Non ! Elle est chez sa copine.

- Ah ! Je vois. Je suppose qu’elle ne va pas rentrer d’aussitôt.

- Oui ! Elle va passer la nuit là-bas.

- Ah d’accord !

Généralement, quand Gisèle envoie sa petite sœur dormir ailleurs c’est qu’un de ses clients va venir squatter l'appart. Pourtant, aujourd’hui, je ne vois personne d’autre. Il n y a que nous deux à la maison.

Qui va être « l'heureux » élu, alors ?

Curieux !


Pendant que je m'installe pour commencer à déguster ce menu de senior, Gisèle stop mon élan et me recommande d'aller d'abord me débarbouiller. Histoire de déposer mes affaires et de prendre une douche. Affamé, je me hâte de le faire. Je ne veux pas trop longtemps quitter ces petits bonheurs des yeux. Ils pourraient... disparaître.

Qui sait ? Peut-être que c’est la fatigue que je ressens qui me fait halluciner ces plats, après tout.

Arrivé dans la chambre, je ressens à nouveau ce même sentiment d'étrangeté. Non, ce n’est définitivement pas la fatigue. Je ne reconnais même plus le coin ou j’achève régulièrement les nuits et débute les journées. Moi qui me croyais être un maniaque de la propreté, je dois m'avouer vaincu face au sens aigu de l'ordre qu'a Gisèle. Elle a réécrit ma chambre du début jusqu'à la fin.

Mais, d'où sorte-t-elle ces nouvelles aptitudes ? En tout cas, ce qui est sûr c'est qu'elle n'aurait jamais pu avoir l'argent nécessaire pour organiser tout ça. Même les places que je n’earrive pas à nettoyer ont été remises à l'ordre. Ce coin de la chambre où les gouttes de pluie ont massacré le plafond et le sol par la même occasion. Derrière mon armoire-à-linge, un sombre recoin qui a essuyé la migration du peuple fourmi. Même la peinture semble être refaite.

Si cela se trouve, Gigi est la réincarnation humaine de Hygée ou de Déméter ?


Bah non, en fait ! Pas de doute sur ce point-là. C'est bien Gigi. Ni la déesse de la nourriture, ni la déesse de la santé.

Après m’être assis sur le lit pour ôter mes chaussures, je sens quelque-chose sous mon derrière. Quelque-chose qui ne fait pas partie du drap. Une matière autonome. Je me lève et me retourne, puis tombe sur un objet qui me renvoi directement à Gisèle. Je ne l'avais pas remarqué aussitôt, mais après un second revers d'un regard critique et suspicieux, je le vois assez clairement. Ou plutôt, je les vois. Trois sachets de préservatifs tous liés les uns aux autres par les lois du plastique. En dessous, une culotte pour femmes neuve bien rangée.

Il faut que j'échappe à cette situation. Cette détraquée de Gigi tente une fois de plus de me mettre dans son lit. J'en ai des frissons dans le dos rien qu'en y pensant.

Et ce n’est pas à cause de cette séance difficile à la salle de sport.


Je prends alors une grande aspiration et décide par la suite de sauter à travers la fenêtre. Je vise le bac à ordures qui se trouve sous la chambre de Sabrina. C’est le moment de mettre en pratique la formation de trois heures trente que j’ai reçu à la salle de sport.

La victoire des jeux olympiques est à portée de main.

- Vraiment désolé pour ce qui est arrivé à votre petit ami, énonce le médecin qui a débarqué de l'ambulance que mes voisins ont appelé, il y a vingt minutes.

Apparemment, un stupide jeune homme a été retrouvé inconscient et avec une jambe légèrement fracturée dans une poubelle du coin.

Oui ! Ce stupide jeune homme c’est Moi !

- Merci beaucoup, docteur.

Ça ne sert à rien de battre des cils comme ça, Gigi. S’il te plaît tant que ça, t'avais qu'à le mettre dans ton lit. Sale allumeuse !

Tu ne peux pas te concentrer sur une seule proie, à la fois ?


- Bien, je suis à toi maintenant.

- Ah ?

Je n’aurais pas dû dire ça.


- Peux-tu me dire ce qui t'as pris de sauter par la fenêtre ? Avance Gisèle, l'air un tantinet préoccupé.

- Je... je n’ai pas essayé de sauter. Je suis juste tomber dans le bac à ordures après avoir maladroitement tenté de rattraper ma chaussette. Elle s’est envolée par la fenêtre, je crois.

- Tu crois ? Pour une simple chaussette, tu risques ta vie, toi ?

- Euh… Je pensais que je pouvais la saisir. J’étais dans le feu de l’action.

En tout cas, ce feu me brule encore en ce moment tellement j’ai la jambe qui me picote de douleur.


- Et tu as finalement atterris dans la poubelle qui était sous la chambre de ma sœur… comme par hasard.

- Bah oui ! Parce que... euh... la chaussette allait vers là-bas.

Je ne sais pas vraiment ce qui me fait bégayer à ce moment-là. La douleur de mon entorse à la jambe jumelée à celle de mes courbatures d'après le sport, le fait que j’ai bêtement et ridiculement raté ma fugue, ou alors la nervosité due à la vue de mon peignoir sur le corps de Gisèle.

Cela dit en passant, ce dernier commence déjà à dévoiler trop d'indices indiscrets sur son état en dessous.

- Tu es sûr de ne pas plutôt avoir sursauté à la vue du petit cadeau que t'ai laissé sur le lit ? demande-t-elle jubilatoire.

C’est exactement ça !


- Pas du tout, dis-je précipitamment.

Pas le choix.

Je ne veux pas en parler.


- Tu en es bien sûr ?

- Oui ! D'ailleurs, je ne vois pas de quoi tu parles.

- Ah ! C'est dommage ça.

Rhabille-toi. On ne va pas le faire ce soir.

Ni jamais d'ailleurs. Pétasse ! je

- Bon...

C'est ça. Positive, ma belle.


- Bon, on va le faire quand même.

- Euh !? Faire quoi ? Euh… non !

- Tu ne pourras pas m'échapper, cette fois-ci, tu as le pied scellé dans le plâtre.

Au secours !

Ce n’est pas comme ça que j'ai prévu de perdre ma petite fleur.

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