CHAPITRE XVII

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La semaine s’est très bien passée, enfin du point de vue de l’école.

Mon emploi du temps est assez chargé puisque je fais allemand européen ; j’ai donc deux heures d’allemand et une heure d’histoir-géo en allemand en plus. C’est sûr que du coup, je finis tous les jours à cinq ou six heures, ça ce n’est pas la joie !

Je n’ai rien compris à la façon dont ils ont fait les classes parce que nous ne sommes que dix dans ma classe à faire allemand européen et il y a en plus six élèves de la seconde B dont Boris, Corentin et Théo et quatre d'une autre seconde. Je ne comprends pas pourquoi ils n’ont pas regroupé tous les élèves qui font la même option dans la même classe. Stéphane m’a expliqué qu’ils ne voulaient pas faire une classe de seulement dix-huit élèves et qu’ils ont préféré répartir les germanistes pour avoir deux classes de 24 ce qui permet de gagner des heures en terme de dédoublement. Ca me parait bizarre comme logique mais d’après lui « c’est comme ça maintenant dans l’Education Nationale, il n’y a plus rien de pédagogique, l’objectif c’est de faire des économies d’heures et de postes ! ». Il était à moitié énervé quand je lui ai raconté ça.

De son côté, ça va, sa rentrée s’est bien passée. Il n’a pas eu de mauvaise surprise et il a les classes qu’il avait prévu d’avoir.

-« Pourquoi, c’est pas toujours comme ça ?

-« Ben tu sais, avant quand je débarquais dans un nouvel établissement tous les ans, j’avais ce qui restait et c’était pas toujours super tandis que là on se répartit les classes entre collègues.

-« Ah oui, maintenant t’es installé quoi !

-« Oui, c’est un peu ça et puis pour moi aussi c’est mieux de connaître les autres profs, l’administration, je n’ai pas l’impression d’être un étranger qui a besoin de plusieurs mois avant de se sentir à l’aise.

-« Ouais finalement c’est exactement comme moi ! Je suis bien content qu’on reste à Nantes et puis maintenant on déménagera plus, hein ?

-« J’espère ! Enfin pour l’instant tout va bien…

-« Ouais et faut que ça dure ! »

En cours, je suis à côté de Bérangère sauf en « européen » à partir de la semaine prochaine parce que Boris a envie d’être à côté de moi. On était tout le temps l’un à côté de l’autre au collège et on a envie de se retrouver. J’ai cependant l’impression que ça ne plaira pas trop à Bérangère.

'Mais elle peut bien comprendre ça, enfin j’espère…'

Ma semaine s’est donc très bien passée mis à part au foot. J’ai encore eu super mal aux genoux mercredi. Ca me brûlait, c’était encore pire que lundi. Pourtant j’ai fait attention et j’ai couru vraiment tout doucement mais à la fin du premier tour, j’avais déjà les genoux en feu.

-« Diego, ça va pas ?" me demande Eric l'entraineur.

-« Non, je peux plus courir, j’ai l’impression que mes genoux vont exploser…

-« Bon alors tu t’arrêtes tout de suite.

-« Oui mais…

-« Ecoute, faut aller voir le médecin, tu peux pas rester comme ça !

-« Je peux peut-être essayer juste de joue …

-« Non, c’est pas raisonnable, va te changer et rentre chez toi. Prends rendez-vous chez ton médecin et appelle-moi pour me dire ce que tu as, d’accord ?

-« Ok, je t’appelle dès que je l’ai vu… j’espère que c’est pas grave… »

Je suis donc retourné aux vestiaires pour me changer et je suis rentré doucement jusqu’à chez moi parce que même en vélo, ça me tirait douloureusement.

Stéphane a levé la tête de son ordi et m’a regardé surpris quand j’ai ouvert la porte.

-« Didi, qu’est-ce que tu fais là ? T’es pas au foot ? »

Je lui ai expliqué ce qui se passait et il a appelé tout de suite le docteur Dufresne pour prendre un rendez-vous.

Jeudi soir Stéphane nous a appris qu’il avait invité un de ses collègues à venir manger à la maison. Sébastien était visiblement déjà au courant mais moi j’ai été très surpris.

-« Ben et les « Règles de Nantes » alors, qu’est-ce que t’en fais ? Je croyais qu’il fallait jamais inviter personne à la maison !

-« Oui je sais Didi et j'aurai du convoquer un Conseil de famille pour en parler mais ça c'est fait comme ça en discutant. Tu sais, ça fait longtemps qu’il est au courant que je suis gay et il est super sympa, tu verras !

-« Oui mais pour Sébastien et moi, il est au courant ?

-« Je lui ai dit que j’avais un compagnon et un fils… »

J’en suis resté presque sans voix. Lui qui ne voulait prendre aucun risque pour ne pas qu’on se retrouve dans les mêmes situations sordides que nous avions vécu à Dreux ou à Chartres…

-« Mais pourquoi tu lui as dit ?

-« Je n’ai rien dit, c’est lui qui avait compris et il a gardé le secret alors je pense qu’on peut lui faire confiance. Je suis allé manger chez lui un soir au mois de juin, je ne sais pas si tu te rappelles…

-« Heu non…

-« A la fin du repas alors que je prenais congé, il m’a glissé gentiment que la prochaine fois il faudrait que je vienne avec toute ma famille !

-« Ah oui… mais quand même, c’est risqué !

-« C’est vrai Didi, tu as raison mais on en a parlé avec Stéphane et je crois que c’est bien d’avoir quelques amis et de vivre librement devant eux… c’est pesant de ne jamais rien dire à personne, de mentir à tout le monde et puis pour moi… je sais pas mais ça me donne l’impression d’exister… » intervient Sébastien qui jusqu’à présent était resté silencieux.

Je me suis senti mal parce que je n’avais pas pensé à lui. A son rôle ingrat qui n’a d’existence qu’ici entre ces murs ou en dehors seulement avec Sophie ou ses parents …

-« Oh oui bien sûr Séb, c’était pas par rapport à toi… heu j’veux dire moi aussi je serai très content de vivre normalement mais j’ai peur qu’on perde tout…

-« Je sais, il y a quelques risques mais je crois que nous sommes une vraie famille et que de temps en temps, avec des personnes de confiance…" reprend Stéphane.

-« Et puis, tu es grand maintenant, tu comprends les choses et tu peux te défendre…

-« Oui mais j’ai un peu peur… moi je me vois pas le dire à mes amis…

-« Ah bon même pas à Corentin ou Boris ?" demande Sébastien.

-« Je sais pas… tu sais j’ai pas envie de tout gâcher…

-« Ecoute, avec mon collègue Gaël, il n’y a pas de risque ou s’il y en a un c’est uniquement moi que ça concernera puisqu’autrement il ne vous connaît pas ni l’un ni l’autre !

-« Oui c’est sûr !

-« D’accord, je comprends. Samedi soir, tu dis ? »

La fin de la semaine s’est déroulée calmement, chacun reprenant ses marques pour sa nouvelle année enfin Stéphane et moi parce que Sébastien a repris depuis début août, le pauvre !

Ma classe me plait bien, les profs nous ont dit à plusieurs reprises qu’on était privilégiés parce qu’on est seulement 24 et encore moins en « européen » mais qu’en contrepartie ils exigeaient le silence et l’attention de tous. Pour l’instant je ne connais pas grand monde en dehors de mes copains de collège mais les autres élèves ont plutôt l’air sympa. Il y a deux redoublants qui ont donc deux ans de plus que moi et c’est vrai que ça fait une différence. Ce n’est pas tellement une question de taille parce que c’est vrai que j’ai bien grandi cet été, je ne sais pas combien je mesure mais le médecin me dira ça samedi, c’est plus qu’ils font plus vieux. Ils se rasent, ils ont plein de boutons, ils ont un look… c’est difficile à expliquer mais clairement ils font plus vieux.

Boris m’a demandé si j’avais flashé sur Alicia, une copine de Bérangère. Il la trouve super canon et n’arrête pas de la regarder dès qu’il en a l’occasion dans la cour parce qu’elle ne fait pas allemand alors, il ne la voit jamais en cours ! Pour un peu, on pourrait presque dire qu’il vient nous parler juste pour la voir de plus près !

Ca me fait rigoler, de le voir dans tous ses états mais je commence à en avoir l’habitude avec lui tous les ans il fait une crise, en fait plutôt tous les trois ou quatre mois ! Il est complètement obsédé et puis après, généralement quand il s’est pris un râteau, ça lui passe… avant de retomber amoureux d’une nouvelle fille !

Ca me fait marrer ! Je ne suis pas du tout comme ça, moi !

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