CHAPITRE XXXII

7 minutes de lecture

La sonnerie de 9h a retenti et je me suis vite dirigé vers la salle d'anglais. Bérangère et Alicia attendaient déjà devant la porte avec d'autres élèves de la classe. Je me suis approché d'elles et je leur ai fait la bise. D'abord à Alicia et puis je me suis tourné vers Bérangère, elle me souriait, je l'ai regardée un peu gêné et je l'ai embrassée sur les deux joues. Elle m'a tenu contre elle un peu plus longtemps que ne le ferait juste une copine de classe mais j'espère sans rendre trop évident aux autres que nous sortions ensemble. Je me suis dégagé dès que je l'ai pu avant de devenir trop caramélisé...

Pendant les cours, ça va. On fait comme d'habitude, je me suis senti à l'aise et ça m'a rassuré. Je ne sais pas pourquoi mais je trouve que cette histoire entre nous crée chez moi une forme de tension pas très agréable à vivre...

A midi, Boris est venu me rejoindre ; il voulait qu'on mange avec les filles mais je lui ai rappelé qu'Alicia ne mangeait pas à la cantine le lundi. Il était dépité mais ça n'a pas entamé longtemps sa bonne humeur.

-"Alors tu te sens comment ?

-"Comment ça, je me sens comment ?

-"Ben tu dois quand même être sur un petit nuage, non ? Sortir avec la plus belle fille de 2nde B, c'est pas donné à tout le monde!

-"Ah... non, tu sais je vais pas m'en vanter et puis d'ailleurs avec Bérangère on a décidé qu'au lycée, on ne dirait rien à personne. Tu n'en a pas parlé à tout le monde au moins ? repris-je subitement alarmé.

-"Ben heu...

-"Boris !

-"Juste à Théo et deux trois gars du foot mais c'est pas grave... et puis tu devrais être fier !

-"C'est pas une question de fierté, je sors pas avec Bérangère pour frimer devant mes copains et puis j'te dis, j'ai pas envie que ça se sache partout alors s'il te plait, t'arrête d'en parler. C'est ma vie et j'ai pas envie que tout le monde soit au courant."

Il m'a regardé et visiblement il avait du mal à comprendre. C'est clair que nous n'avons pas le même caractère et ma réaction lui était complètement étrangère.

-"OK, c'est vrai, c'est toi que ça concerne, j'en parlerai plus, juré !

-"OK merci. Et sinon, tu as vu les stands des clubs ce matin ?"

-"Ouais, vite fait. Je vais aller voir ce qu'ils proposent au club de Sports, je ferai bien de la muscu et toi ?

-"Moi j'suis passé rapidement ce matin; il y a le club d'échec qui m'intéresse et puis peut-être d'autres faut voir mais en tous les cas, c'est plutôt sympa comme idée...

...

J'ai retrouvé Boris l'après midi en allemand. J'avais demandé à Bérangère si on maintenait le fait que Boris vienne à côté de moi parce que je voulais être sûr de ne pas faire de gaffe et elle m'avait répondu que maintenant que nous sortions ensemble, elle allait attendre un peu avant de m'empêcher de voir mes copains !

Je l'ai regardée un peu perplexe.

'Je sais pas comment je dois le comprendre ; soit elle a beaucoup d'humour, soit il faut que je m'attende au pire !'

Boris est donc venu s'assoir au premier rang du côté de la fenêtre. Comme il est gaucher, on a inversé nos places pour ne pas se gêner en écrivant et je suis passé du côté de l'allée.

-"Pas mal cette place, juste à côté du radiateur, je pense que je vais l'apprécier cet hiver !" commente-t-il.

Je me suis retourné pour faire un petit signe à Bérangère et je me suis aperçu que de cette place je voyais aussi Thibaud qui était sur une diagonale à l'opposé de moi. J'ai fait un petit clin d'œil et j'ai vu qu'il l'avait remarqué ce qui m'a fait sourire.

M. Zeiger a commencé son cours en nous passant une vidéo ; un extrait de film, Das Leben der Anderen, (La vie des autres). Il nous avait expliqué qu'on allait traiter de l'histoire récente de l'Allemagne au cours de cette année et en ce moment on voit les deux Allemagnes de l'après-guerre et dans ce cas, la vie des allemands de l'Est. J'ai trouvé ça super intéressant, c'est une dénonciation du système totalitaire qui espionnait les citoyens par tous les moyens y compris par les voisins, la propre famille... Boris, lui, n'avait pas l'air d'être vraiment dans le sujet ; il n'arrêtait pas de me faire des réflexions.

-"T'as vu Diego, ta copine, s'est trouvé un nouveau mec !

-"Hein, qui ça ?" lui réponds-je en me retournant.

Bérangère, obligée de déménager, s'était assise dans la rangée du milieu à côté d'un redoublant, Hugo, je crois. Il parait beaucoup plus vieux que nous d'abord parce qu'il est nettement plus costaud et puis aussi parce qu'on voit bien qu'il se rase et pas comme moi, une fois tous les quinze jours histoire de dire que je le fais. Par contre, il n'est pas épargné par les soucis liés à la puberté et son visage est couvert de boutons voire même de plaques rouges c'est presque effrayant.

'Le pauvre, il doit en souffrir. Pourvu que j'ai jamais ça !'

-"Je crois qu'il s'est inscrit au club Pustules et Points noirs et qu'il a été élu président directement!" reprit-il en se retournant une nouvelle fois pour mieux étudier notre infortuné camarade et en éclatant de rire pas du tout discrètement.

-"Arrête tes conneries, le pauvre!" réponds-je en réprimant à mon tour difficilement un début de fou rire.

-"Monsieur Mautrier, was passiert ?" intervint tout d'un coup M. Zeiger

Boris, surpris, ne répondit pas appliquant à la lettre la consigne bien connue de tout élève un peu turbulent, faire le mort et ne surtout pas alimenter le problème en discutant.

-"So was können wir darüber sagen ? Ist es normal oder..." reprit le prof en jetant un regard peu amène à Boris.

Pendant quelques minutes, Boris réussit à se calmer mais avant la fin du cours, il recommença à me donner des coups de coude et à me chuchoter des idioties plus ou moins discrètement.

-"Bérangère va lui donner des conseils beauté, il en a bien besoin !" murmura-t-il en singeant de façon outrancière une fille qui se maquillait.

-"Monsieur Mautrier, je ne sais pas si c'est le fait d'avoir changé de place qui vous met dans cet état là mais je vous conseille de sérieusement vous calmer si vous ne voulez pas reprendre celle que vous occupiez jusqu'à présent, c'est compris ?

-"Oui monsieur, désolé."

Le reste du cours se passa sans plus d'incident, heureusement, et c'est avec soulagement que j'entendis la sonnerie de 16 heures retentir. Je me suis levé et alors que je me dirigeai vers la sortie, j'ai croisé le regard de Thibaud. Il avait l'air furieux ; il était blanc comme un linge et est passé devant moi sans me regarder, ça m'a fait bizarre et je n'ai pas compris. Moi qui voulais lui demander s'il avait trouvé un film pour samedi, je me suis dit que ce serait plus sage d'attendre mercredi pour en discuter avec lui...

Comme c'était le dernier cours de la journée, j'ai eu envie de retourner voir s'il y avait d'autres clubs qui pourraient me plaire. J'ai demandé à Bérangère si elle voulait venir avec moi.

-"Ah oui, je peux, ma mère ne sera pas là avant la demie !

On est retourné dans le hall qui était noir de monde ; c'était la récré et tout le lycée était là.

-"Ben dis donc, ça marche on dirait, il y a foule ! constate-je un peu surpris.

-"Oui ou alors c'est peut-être aussi qu'il fait un temps de chien et que personne n'a envie d'aller dehors !

"Oui t'as raison, c'est plutôt ça..."

On a déambulé dans le hall ; on s'est arrêté au club de l'animation sportive, Bérangère voulait savoir s'il y avait des cours de fitness et je lui ai parlé du club de géographie que j'avais découvert ce matin. La fin de la récré a retenti et en quelques secondes le hall s'est vidé; on s'est retrouvé presque tous seuls.

-"Pffou ça fait du bien !

-"Oui, il y autre chose que tu voulais voir ?

-"Heu non je sais pas..."

J'ai fait le tour des stands du regard, les responsables étaient en train de ranger pour la plupart. J'ai aperçu Matthys et un autre élève qui discutaient devant le stand du club de géographie et il m'a vu aussi. Il m'a fait un grand sourire accompagné d'un clin d'œil et surpris, je lui ai répondu par un petit signe et puis j'ai détourné la tête. Je crois que je ne voulais pas que Bérangère remarque que je le connaissais.

'T'es con ou quoi Diego, qu'est ce que ça peut faire !'

Il n'empêche j'avais réagi bêtement et c'était trop tard pour y faire quoi que ce soit.

-"Tu viens, on va aller attendre ma mère, on va se trouver un petit coin tranquille..." dit Bérangère en souriant d'un air malicieux et en me prenant le bras.

'Ca y est, il faut que je joue mon rôle de petit copain !'

Et bizarrement, cette idée m'a presque fait penser à une corvée et j'ai eu honte de l'avoir formulée.

'J'suis vraiment pas clair, moi !'

...

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