CHAPITRE CXXXIII

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Plongé dans un sommeil de plomb, j'ai soudain senti une main qui me secouait l'épaule.

-"Contrôle des billets ! S'il vous plaît, contrôle des billets !"

J'ai eu du mal à émerger.

-"Bonjour monsieur, pouvez-vous me montrer votre billet s'il vous plaît ?

-"Oh oui, bien sûr."

Je me suis levé pour prendre mon blouson et quand je me suis retourné, immédiatement, j'ai senti un froid glacial m'envahir.

-"Mon blouson ! Mon blouson n'est plus là !"

Je me suis retourné vers le contrôleur et j'ai balbutié.

-"On m'a volé mon blouson ! Je..."

Je me suis effondré. Les larmes ont envahi mes yeux avant de se mettre à couler abondamment sur mes joues et j'ai perdu pied. Heureusement le contrôleur qui avait certainement déjà eu à faire face à ce type de situation, m'a parlé calmement.

-"Votre billet était dans votre blouson ?

-"Oui ! Et puis mon portefeuille, mon téléphone ! Mais qu'est-ce que je vais faire ?"

J'ai regardé à mes pieds et j'ai noté machinalement que mon sac à dos était toujours là.

-"Calmez-vous jeune homme, c'est très rare mais cela arrive, vous allez me suivre et je vais prendre votre déposition."

J'ai soudain pris conscience que l'homme qui s'était assis près de moi n'était plus là.

-"C'est sûrement la personne qui était à côté de moi, un homme d'une vingtaine d'années. Je me suis endormi tout de suite et je ne sais pas quand il est descendu... je suis sûr que c'est lui !

-"On ne peut pas accuser quelqu'un sans preuve...

-"Il est descendu à Angers. Et maintenant que j'y réfléchis, il avait un blouson bleu marine sous le bras." intervient une femme qui était derrière moi.

-"Oh, c'était mon blouson !"

C'est à ce moment que je me suis rendu compte que j'étais devenu le point de mire de tout le wagon. Le contrôleur a une nouvelle fois, repris la direction des opérations.

-"Merci madame. Il est parti de quel côté ?

-"Oh je disais ça pour que vous ne preniez pas ce jeune homme pour un fraudeur. L'homme est parti par là..." répond-elle en indiquant une direction.

-"Merci madame !" glissé-je avec reconnaissance.

-"Allez, suivez-moi jeune homme on va remplir les papiers."

J'ai essuyé mes joues encore humides et je l'ai suivi jusqu'à la voiture de tête où il m'a fait entrer dans un petit compartiment.

-"Je vais prendre votre déposition mais nous allons aussi remplir un procès-verbal qui indique que vous n'avez pas pu présenter votre titre de transport.

-"Mais je ne suis pas un fraudeur !

-"Oh non, j'en suis convaincu mais c'est la procédure...

-"Et je n'ai pas d'argent pour vous payer...

-"Vous recevrez un courrier amende sous quinze jours chez vous et vos parents auront la possibilité de contester l'amende."

J'ai rempli le formulaire et je l'ai tendu au contrôleur.

-"Et maintenant, je fais quoi ? Je devais aller à Marseille !

-"On va arriver à Montparnasse dans une demi-heure. Vous allez regagner votre siège et avec mes collègues, je vais faire une première recherche de votre blouson et si nous ne le trouvons pas, on recommencera plus à fond quand tous les passagers seront descendus, d'accord ?

-"Oui d'accord...

-"Allez, ne perdez pas espoir, nous avons des chances de le retrouver. Peut-être pas votre portefeuille mais le blouson certainement. Les voleurs ne s'encombrent pas de tout ce qui est inutile et qui pourraient les compromettre."

J'ai hoché silencieusement la tête et il a du comprendre que j'étais complètement désespéré et sous le choc de ce qu'il m'arrivait.

-"Allez, je reviens vous voir dès que j'ai du nouveau et vous m'attendez quoi qu'il en soit à votre place quand on sera arrivé au terminus."

Très pâle, choqué et surtout désespéré car cela remet en question tout ce que j'ai prévu, je suis retourné m'asseoir à ma place complètement groggy.

La femme qui est intervenue en ma faveur m'a fait un petit sourire quand elle m'a vu revenir.

-"Ca va ?

-"Heu... je sais pas, même si on retrouve mon blouson, il m'a dit qu'il serait vide. J'ai tout perdu ! Mais merci pour votre intervention, au moins grâce à vous, il n'a pas cru que j'étais un fraudeur !

J'ai essayé de ne pas me remettre à pleurer mais j'étais au bord d'une nouvelle crise de larmes. J'ai esquissé un très pâle sourire et je me suis assis.

...

Je suis resté prostré sur mon siège pendant de longues minutes quand j'ai soudain vu le contrôleur ouvrir la porte du compartiment et venir vers moi.

-"On a trouvé un portefeuille dans les toilettes de la voiture 19 et ce blouson pas très loin dans un porte-bagage...

-"Oui, c'est le mien !"

-"Il n'y a plus d'argent dans le portefeuille mais il y a votre carte d'identité, une carte de bus, une carte de cantine... donc je vous le restitue. Je n'ai pas cherché dans le blouson, vérifiez vous-même..."

Je me suis emparé du blouson et j'ai ouvert les poches. Rien dans la poche intérieure, celle où se trouvait mon portefeuille. Rien dans la poche extérieure droite mais j'ai senti quelque chose dans l'autre.

-"Il ne m'a pas pris mon billet ! Tenez, le voici !"

-"Bon, c'est quand même une bonne chose. On peut déjà oublier l'amende !

-"Oui mais il m'a volé mon argent et mon téléphone...

-"Oui, je sais..."

Il m'a quitté peu après et j'ai essayé de faire le point.

'Sans argent, est-ce que je peux continuer ?'

La perte de mon téléphone me touche mais bizarrement pas autant que je le pensais. En fait si, elle me touche mais mon téléphone n'est pas indispensable pour ce que je veux faire tandis que sans argent...

Je ne me vois pas revenir à Nantes aujourd'hui sans avoir pu voir Gabriella Orsini et je m'en veux de m'être endormi sans penser à ce qu'il pouvait arriver.

'C'est pas quelque chose qui serait arrivé à Jimmy, ça !'

Je me rends compte à quel point je ne suis pas prêt pour vivre sans protection dans le monde. Je suis un garçon naïf, qui ne voit pas le mal, et je viens de me prendre une grande claque dans la figure !

'C'est foutu, il faut que je rentre !'

Je me sens minable à cette idée ! Revenir après avoir averti tout le monde d'un message sibyllin que je partais plusieurs jours pour mener une action mystérieuse...

'Je vais faire pitié !'

Je me revois préparer ce que je qualifiais au fond de moi d'aventure.

'Tu parles d'un aventurier. Je m'endors dans les cinq minutes et j'ai à peine fait quelques kilomètres que je me retrouve dépouillé comme un pigeon !'

Ca me donne envie de pleurer, non pas sur ce qu'il m'est arrivé, mais sur moi, sur mon arrogance à vouloir prendre en charge un problème complexe alors que je ne suis pas capable de faire deux pas tout seul.

'Pas plus autonome qu'un gamin de cinq ans ! Hugo, n'aurait pas fait pire !'

Le haut parleur interrompt soudain mes pensées désillusionnées et la voix du steward retentit.

-"Mesdames, messieurs nous arrivons en gare de Montparnasse-Bienvenue, notre destination finale dans moins de cinq minutes. Pensez à vérifier que vous n'oubliez rien. J'espère que vous avez passé un agréable voyage et je vous souhaite une excellente journée au nom de tout le personnel navigant de votre TGV. Ladies and gentlemen we will arrive in..."

Dépité, je suis resté assis tandis que les autres passagers autour de moi, se levaient voire pour certains, se précipitaient vers la sortie.

J'ai soudain senti une main sur mon épaule et je me suis retourné. C'était cette dame si prévenante.

-"Tenez jeune homme, je sais que ça ne remplacera pas tout ce que vous avez perdu mais cela pourra vous dépanner un peu."

Elle m'a tendu un billet de vingt euros en souriant.

-"Oh heu... je ne peux pas...

-"Allez, prenez-le, je sais que vous en avez besoin !

-"Oui c'est vrai... merci madame ! Merci, vraiment !

-"Je vous en prie, et bonne journée tout de même !

-"Merci... merci, à vous aussi !"

...

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