CHAPITRE CLIV

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-"Merde ! Qui te l'a envoyée ?

-"Je ne sais pas, c'est sur le groupe qu'on a créé sur Snapchat mais c'est en masqué...et tu as vu le commentaire ? Surprise, surprise ! Regardez comme ils sont mignons !

-"Bon, au moins c'est pas directement homophobe !

-"Oui, heureusement !

-"Mais ça veut dire que tout le monde est au courant ou va l'être dans quelques minutes..." reprend Marine alarmée.

Je me suis tourné vers Thibaud qui était blanc comme un linge.

-"Eh Thibaud, c'est pas grave, on va faire face ensemble et puis on n'est pas seuls !

-"Non, Marine et moi on est là aussi et on va vous défendre !

-"Oui mais ça va recommencer... oh, non !"

Des larmes sont apparues dans ses yeux et je perçois la détresse qui s'est emparée de lui. Je passe sans réfléchir mon bras derrière sa tête, viens le poser sur son épaule et j'attire Thibaud contre moi.

-"Non, ça ne va pas recommencer ! On ne va pas se laisser faire et puis moi, je n'ai pas honte d'être gay et que tu sois mon petit copain !

-"Moi non plus mais...

-"Je sais, c'est plus difficile pour toi mais on ne va pas se laisser faire ! Je vais aller voir Boris pour qu'il m'explique ce qu'il s'est passé cette nuit. Il sait peut-être qui a pris la photo..."

J'ai relevé la tête et j'ai repéré la table où Boris déjeunait. Il était avec Corentin et deux autres élèves de sa classe. Je me suis dirigé vers leur table et quand Boris m'a vu arriver, il s'est levé et est venu vers moi.

-"T'es au courant ?" lance-t-il directement.

-"Oui, Léa vient de recevoir la photo. Qu'est-ce qu'il s'est passé cette nuit ?"

Comme il avait terminé son petit déjeuner et que moi je n'avais plus du tout faim, on s'est installés à une table à l'écart et ce qu'il m'a raconté rejoignait en tous points ce que Léa nous avait dit dans le car.

-"Le problème c'est que quand j'ai remis la couverture sur vous pour vous protéger, j'ai perdu de vue celui qui avait pris la photo. J'ai essayé de le découvrir après mais bien sûr personne n'a reconnu que c'était lui !

-"Ben oui, bien sûr... tu l'as reçue en masqué, toi aussi ?

-"Oui, juste avant qu'on s'arrête et j'ai renvoyé un message, tiens regarde !"

Il m'a montré son écran de téléphone et j'ai lu le message virulent qu'il avait envoyé à l'interlocuteur anonyme.

Je ne sais pas qui a envoyé cette photo mais c'est lamentable ! Tu as intérêt à la supprimer immédiatement ! Diego est mon meilleur ami et je connais bien Thibaud aussi. Si j'apprends que quelqu'un fait ou propage quelque chose de malveillant contre eux, il aura à faire à moi et je suis très sérieux !!! Boris

-"Oh merci...

-"C'est normal et Corentin a été encore plus direct, je peux te le dire ! Si quelqu'un vous emmerde, on sera là !

-"Merci, Boris, merci ! Heu, je vais retourner voir Thibaud, il est un peu paniqué..."

Ils n'étaient plus à la table où nous avions pris le petit déj' alors je suis sorti de la cafétéria. Je ne les ai pas vus dans le hall de l'aire, je suis donc allé jusqu'au car pour voir s'ils n'étaient pas remontés dedans mais il était fermé.

'Merde, où sont-ils passés ?'

J'ai fini par retrouver les filles qui sortaient des toilettes mais Thibaud n'était pas avec elles.

-"Il nous a dit qu'il allait faire un tour dehors...

-"OK, allez chercher de ce côté et moi je vais voir sur le parking !"

Je suis ressorti un peu affolé, je l'avoue. Je sais que cette histoire de photo a complètement déstabilisé Thibaud. Ca le ramène trois ans en arrière quand il s'est fait outer dans son collège et il faut que je le retrouve vite avant qu'il ne s'effondre complètement.

'Je suis là Thibaud, je suis avec toi et je te protègerai !'

Je suis passé en courant devant un groupe d'élèves sortis fumer leur cigarette et j'ai entendu une voix narquoise s'élever.

-"Regardez, c'est le petit PD de la photo, il a l'air complètement perdu ! Tu cherches ton petit chéri ?"

J'ai failli l'ignorer mais finalement je me suis arrêté puis je suis revenu vers l'élève de première qui m'avait interpellé et je me suis planté juste devant lui.

-"Bonjour, je ne suis pas un petit PD, je suis un élève de seconde et, oui, je suis gay ! Au même titre que tu n'es pas un connard homophobe, que madame Ravier me pardonne ce pléonasme, mais un élève de première qui n'a pas réfléchi à ce qu'il disait et qui ne mesure pas à quel point ses paroles peuvent être blessantes ! Sommes-nous d'accord sur ce point ?"

Je le regardais droit dans les yeux et j'étais énervé mais paradoxalement très calme en même temps. Je crois que c'est ce que l'on appelle de la colère froide et je peux vous assurer qu'à cet instant, mon ire était glaciale.

Tout le groupe, les cinq lycéens, était immobile, silencieux comme statufié. J'ai froidement reposé ma question en ne le quittant pas des yeux.

-"Sommes-nous d'accord sur ce point où dois-je faire un signalement pour homophobie ?

-"Hein ?

-"Heu nous sommes complètement d'accord, excuse-nous..." répond enfin la fille qui était juste à côté de mon agresseur.

-"C'est lui que j'aimerais entendre !"

Elle a mis un coup de coude dans les côtes du garçon et il a enfin réagi.

-"Heu je suis désolé, je voulais rigoler et comme tu dis je n'ai pas réalisé... excuse-moi..."

Je l'ai regardé attentivement, il avait l'air sincère. Ce n'est certainement pas un mauvais bougre, juste un garçon qui voulait faire une plaisanterie pour se faire mousser auprès de ses amis. J'ai attendu quelques secondes pour bien lui montrer que je pesais sa réponse.

-"Pas de problème, si tu es sincère, c'est oublié." réponds-je en souriant légèrement."Eh oui, je cherche mon ami, vous ne l'auriez pas vu par hasard ?

-"Si je l'ai vu partir par là" intervient un autre garçon jusqu'à présent silencieux en désignant le bout du parking. "Il n'avait pas l'air très bien...

-"OK, merci beaucoup !"

Je suis reparti inquiet à grandes enjambées mais j'ai à peine fait quelques mètres que je suis tombé sur Madame Ravier et sa collègue de français, Madame Gourvenec, qui fumaient une cigarette à l'écart.

-"Bonjour Diego, ne t'inquiète pas, il est juste un peu plus loin. Il va bien, on a discuté avec lui quelques instants. Excuse-nous, nous avons tout entendu...

-"Ah heu c'est pas grave...

-"Je ne sais pas comment tu as fait pour retourner cette situation et en sortir grandi aux yeux de tous... Bravo !" dit Madame Gourvenec.

-"Oui, bravo Diego, tu as fait preuve d'une grande maîtrise de soi et de belles qualités d'éloquence . J'imagine malheureusement que ce n'est pas la première fois que ça t'arrive de te faire ainsi agresser ?" reprend ma professeure de français.

-"Heu si... en fait j'ai compris que j'étais gay il y a quelques semaines seulement alors c'était la première fois...

-"Eh bien bravo ! Et puis, je suis très heureuse de constater qu'un de mes élèves utilise mon cours ! L'utilisation du pléonasme était pertinente dans ce contexte. Plus sérieusement, va rejoindre ton ami et nous, nous allons mettre une touche finale à ta belle argumentation en discutant avec ces élèves.

-"Oui, absolument, je les connais. Ils ne sont pas méchants mais on va leur faire comprendre qu'il y a des choses pour lesquelles il n'y aura aucune tolérance !

-"D'accord, merci. Heu, j'y vais...

-"File, il t'attend !"

...

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