Chapitre 4 – 13 semaines avant la chute
La lumière est éteinte.
Je suis allongée sur le côté, les genoux contre moi.
Je ne dors pas.
Je ne pense même pas.
Je suis juste là, dans le noir, à attendre que ça passe, sans trop savoir ce que “ça” est censé être.
Ma tête bourdonne.
Je revois le dîner.
Les couloirs.
Les messages sans réponse.
Les silences qu’on laisse en moi comme on laisse un verre vide.
Je tends le bras.
Je prends mon MP3, sans réfléchir.
Je l’allume.
Et je mets mes écouteurs.
Je connais la chanson par cœur.
C’est une de celles que je garde pour les nuits comme ça.
Pas pour aller mieux.
Juste pour ressentir un peu moins seule.
La voix me berce.
Je ferme les yeux.
Et là, je tends la main sous mon oreiller.
Je cherche mon nounours.
Il est là.
Toujours là, même si je le sors rarement.
Un vieux nounours blanc.
Il tient contre lui un petit cœur rouge avec “Love you” brodé dessus.
Je ne sais même plus qui me l’a offert.
Peut-être quelqu’un qui m’aimait encore, à l’époque.
Je le serre contre moi.
Très fort.
Comme si je voulais rentrer dedans, disparaître avec lui.
Comme si son coton pouvait absorber mes larmes avant qu’elles n’arrivent.
Et c’est là que je craque.
Je pleure.
D’abord un peu.
Puis tout.
Tout ce que j’ai retenu.
Tout ce que je n’ai pas dit.
Tout ce que je ne sais même pas expliquer.
Je ne sais pas où j’ai mal.
Mais j’ai mal partout.
Dans la gorge, dans la tête, dans le cœur, dans les bras.
Je chuchote des choses sans y penser :
“J’en peux plus.”
“Je suis fatiguée.”
“Je suis là, mais j’y arrive plus…”
Le nounours est trempé.
Je continue de le serrer comme un enfant qui se noie.
La musique passe à la suivante.
Puis encore une.
Je n’écoute plus.
Je m’enfonce dans le chagrin, doucement.
J’aimerais que quelqu’un vienne.
Mais je sais que personne ne viendra.
Alors je pleure jusqu’à ce que le sommeil me prenne,
ou que mes larmes s’épuisent avant moi.
Demain, j’aurai les yeux gonflés.
Je dirai que c’est des allergies.
Et tout recommencera.
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