Désenchantement

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Ce soir, Jessica se sentait bien. La journée avait pourtant été rude, mais là, dans son lit, plongée dans le noir, tout semblait calme, apaisant. Rien ne pouvait lui donner l’impression de mal-être. Ni ses modifications, ni ses blessures, pas même ce petit sifflement dans son crâne qui lui donnait la migraine. Tout était paisible. Les yeux ouverts, malgré l’obscurité, la femme observait le plafond. Puis, elle leva son bras gauche à hauteur de ses yeux. Il lui semblait si parfait, tapi dans l’obscurité. Les néons qui le composaient ne luisaient presque pas. Par réflexe, Jessica passa sa main sur son bras. Le contact de sa peau sur le métal aurait dû être froid.

Seulement, cette fois-ci, ce n’était pas le cas. Son épiderme semblait avoir trouvé un semblable. Une peau douce, fine, certainement blanche d’apparence. Hier encore, le métal avait cette touche trop lisse pour paraître parfait au toucher. Fascinée, son pouce se mit à dessiner des cercles sur son membre. Une pensée absurde traversa l’esprit de la femme. Et si son bras était revenu ? Et si elle n’avait plus besoin de prothèse ? Plus besoin de faire attention à la pousse de son épiderme. Plus besoin de pommade pour nettoyer cette plaie à jamais infectée. L’espérance de retrouver un jour son bras l’avait désertée depuis longtemps. Sa destinée s’était écrite ce funeste jour de rébellion.

Mais ce soir, l’illusion lui paraissait si réelle, si tangible, si palpable. Jessica laissa son esprit divaguer un instant. Pouvoir toucher de nouveau, sentir le contact d’une peau sur la sienne, quel bonheur cela serait. Demain pourrait voir la promesse d’un jour radieux, avec ses deux mains de nouveau présentes. Le toucher serait de nouveau synchrone, unique, agréable. Sans dissociation, ni froideur.

L’esprit engourdi de la femme se perdit dans ses rêveries, ses désirs de retrouver l’entièreté de son corps. Puis un doute l’assaillit, lui tordant les entrailles.

« Izis, allume la lumière à 20 %, » s’entendit-elle murmurer.

Une douce lueur se diffusa dans la pièce, tel un manteau de clarté, éclairant sa vue. Jessica regarda son bras, qu’elle tenait de sa main droite, au-dessus d’elle. La déception lui déchira le cœur. Là, devant elle, son bras n’avait rien d’organique. Artificielle, mécanique. Tout ce que la femme déteste en elle. Les pistons encore en place, la plaque métallique qui recouvrait ses os et les LED brillaient d’un vert émeraude vif, comme pour la narguer.

Une larme roula lentement sur la joue de la femme. Elle était pourtant sûre de la sensation qu’elle avait éprouvée quelques secondes plus tôt. Mais il lui fallait se rendre à l’évidence : ce n’était qu’une élucubration de son cerveau éreinté, mêlée à son souhait de ne plus être un humain rafistolé, un bio-humain.

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