Je me souviens

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Je me souviens encore ce soir-là.

Elle était venue chez moi. Comment la soirée a-t-elle commencé, je ne m'en souviens plus clairement depuis. Peut-être avec une étreinte, c'est ce qui me semble le plus probable dans ma reconstruction mnésique.

Mais ce dont je me souviens nettement, c'est de la passion, de la tendresse et de mon cœur qui battait à un rythme soutenu. Nous avions fini par nous allonger et nous blottir l'un contre l'autre dans ce canapé qui prône au milieu de mon salon. Blottit l'un contre l'autre, nous profitions de notre présence mutuelle. Nous nous humions, nous nous caressions, puis vint les baisers dans le cou et les mots à l'oreille qui accentuèrent le rythme soutenu de nos palpitants hardis.

Il fallut que nous arrêtions de nous faire face pour assumer la suite de la soirée. Nos regards nous auraient confrontés au désarroi de nos cerveaux démunis face à l'ardeur de nos sentiments, de nos désirs.

Vint alors les audacieuses caresses, la douce constriction, les impudentes paroles et tout cela sembla durer à la fois un instant et toute l'éternité. Mon âme n'aspirait plus qu'à cela et mon esprit aurait souhaité ne plus en faire que sa seule ambition.

Mais la tocante nous rattrape et nous sommes, à la fin, obligé de nous rappeler que la terre tourne toujours sous nos pieds. Cette réalité ne fait qu'accroître notre attache et après tout cela, nos lèvres finissent par se joindre. Pas comme nous avions pu le faire jusqu'ici. Plus fougueusement, plus généreusement, presque frénétiquement. Nos bouches s'enchevêtrent, nos langues se cherchent, se rencontrent et une danse quelque peu asynchrone fait s'enflammer une dernière fois nos existences.

Devrait-on suivre cet élan ou revenir sur terre ?

Nous avons fait le choix de la raison et je me résolus à la raccompagner.

Dehors, une averse nous attendait. Elle était là, présente, tombant franchement sur nos têtes, mais un phénomène étrange nous frappait. Après la chaleur et le bonheur de cette étreinte, nous aurions pu croire que l'idée de cette séparation doublée de la pluie aurait assombri notre moral, que cela aurait été déprimant, mais étonnamment nous étions pris d'une profonde euphorie.

Nous l'apprécions, nous en rions, nous célébrions le monde, aussi humide pouvait-il être à cet instant, car il ne pouvait nous enlever ce souvenir encore très présent, cette ocytocine et cette sérotonine sous lesquelles nous étions noyées.

Les neurotransmetteurs ont un pouvoir effrayant sur les simples mortels. Ils pourraient nous faire oublier tout bon sens, toute réalité pour quelques instants d'intimité.

Puis le temps s'est écoulé. Pour une raison qui m'échappe, cette magie n'aura pas suffi. Pas suffit à la garder près de moi. Pas suffit à faire en sorte que l'on décide de ne vivre que pour cette ambition.

Progressivement, nous nous sommes perdus de vue. Nos échanges se sont espacés, sans que je n'en comprenne très bien la cause.

Il semblerait que toute folie est destinée à prendre fin un jour et que le monde ne nous laisse pas nous y consacrer éternellement.

Mais ma tête continue de se souvenir et mon cœur de rêver, mon âme quant à elle, espère que le monde récompensera sa dévotion en leur autorisant encore une petite dose de plus.

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