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La voisine téléphone, la musique va trop fort. J’éteins. Je sors. J’enjambe le clochard réfugié dans le hall. Il dit truie, je dis bonne journée. La pharmacie est pleine, je rejoins la file brouillonne en foudroyant du regard les nouveaux venus, qu’ils ne s’avisent pas de me dépasser. Une femme éternue, je sens des gouttelettes humides atterrir sur mon visage, elle s’excuse. J’achète l’insuline, je n’oublie pas les seringues. C’est cher. Il pleut. Je marche sur un pavé descellé, j’ai les pieds trempés. Je rentre. J’enjambe le clochard. Il dit truie, je dis connard. Le chien m’accueille. Je dis je t’aime toi. Je plonge la seringue dans le flacon, aspire jusqu’à dix-sept, lui attrape la peau du cou et pique doucement. Je lui sers ses croquettes spéciales. Je rallume la musique, je décroche le téléphone. Je regarde la cafetière. Le chien se frotte contre moi. Je dis on va promener maintenant ? Il dit volontiers. J’attrape la laisse. Il me suit. Je descends les trois étages. J’enjambe le clochard, Il dit il est beau ton chien. Je dis il a du diabète. Il dit il a quel âge ? Je dis douze ans. Il dit ah ben c’est beaucoup pour un gros chien comme ça. Je dis oui, mais sinon il est encore en forme. J’arrive au parc, le chien chie sous un arbre, il n’y a personne, je ne dois pas ramasser, je suis contente. Il pleut toujours. Je marche vite, le chien a du mal à me suivre, il est vraiment vieux. Je m’assieds et lui caresse la tête. À l’autre extrémité du banc, il y a un jeune noir, anorak trop grand et bonnet en laine turquoise. Je le regarde. Il baisse les yeux. Je dis ça va ? Il me sourit. Je dis tu t’appelles comment ? Il dit moi s’appelle Nahom. Je dis tu dors ici ? en montrant le parc. Il dit oui froid. Je me lève et le salue de la main. Le chien est fatigué, je rentre. Dans le hall, le clochard est endormi. Je l’enjambe. Je monte chez moi, le chien se couche et ronfle. J’allume la musique. Le téléphone est resté décroché. Je me fais un café. Je fume. La voisine frappe à la porte. Je n’ouvre pas. J’aperçois glisser un papier sous la porte. Je me lève et le lis.

Elle a écrit : Madame Renard, votre égoïsme est sans limites.

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