9. Le choix du sanctuaire

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John referma doucement la porte de son bureau derrière lui. Le déclic sec de la serrure résonna dans la pièce comme un verrou sur le monde. Son sanctuaire. Ici, personne ne pouvait entrer. Ici, il pouvait penser, ou au moins essayer.

Il s’assit lourdement sur sa chaise, alluma une cigarette. « C’est la bonne décision », se dit-il en laissant la fumée emplir ses poumons. Mais aussitôt, l’image de sa mère jaillit dans son esprit : son regard enragé, ce regard qui l’avait paralysé toute sa vie.
Si tu parles, tu me trahis. La phrase n’avait jamais besoin d’être prononcée ; elle vibrait dans ce regard, comme une malédiction.

John sentit la peur s’insinuer, froide et acide. Son cœur cognait. Ses doigts tremblaient.

Alors, lentement, presque avec solennité, il tira le tiroir de son bureau. Sous une pile de papiers, enveloppée dans une pochette usée qu’il protégeait depuis toujours, il sortit la photo de sa sœur. Une photo ancienne, jaunie, mais intacte. Elle était son secret le plus précieux, gardé loin des yeux de sa mère.

Il la posa devant lui. Le visage de sa sœur apparut, souriant timidement, les yeux remplis d’une douceur qui contrastait avec la violence maternelle.

« Toi… tu comprends », murmura-t-il, ses lèvres effleurant les mots. Sa main effleura le papier, comme si elle pouvait traverser le temps. « Si je parle, ce n’est pas pour la trahir. C’est pour nous deux. Pour toi. »

Un tremblement parcourut son corps. Entre la photo et le spectre du regard maternel, un combat invisible se jouait. La peur d’un côté, la vérité de l’autre.

Il serra la photo contre lui, la tenant comme un talisman. Les larmes montèrent, brûlantes, incontrôlables. « Elle ment encore… Elle dit que Sophie… que tout est de sa faute. Mais toi et moi, on sait. On sait ce qu’elle est. »

La voix se brisa, mais le souffle continua, obstiné. Alors, doucement, il reposa la photo sur le bureau. Le regard de sa mère s’effaçait. Restait celui de sa sœur, fragile mais vivant, planté comme une ancre dans son esprit.

John sut, à cet instant, que parler ne serait pas trahir. Parler serait honorer.

Avec précaution, comme s’il rendait hommage à un trésor, il remit la photo dans sa pochette et la rangea au fond du tiroir. Son secret restait protégé, mais sa décision, elle, venait de s’ancrer pour de bon.

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