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- Abby…


Une étrange sensation m’envahit. Mes jambes me portent à vive allure dans une vaste étendue d’herbes et de bruyères. Une nappe de brouillard m’empêche de discerner le lointain et l’air iodé irradie mes poumons. Je crois percevoir le bruit de l’eau. La mer ? L’océan peut-être…


- Abby…


Je continue à courir en direction de ce murmure, de cette voix lointaine qui m’appelle à elle. Elle semble étouffée, comme un souffle à peine perceptible qui caresse mes oreilles. Le voile se dissipe enfin et dévoile un ciel lumineux d’un bleu azur. À une centaine de mètres, la flore s’arrête au bord d’une imposante falaise qui surplombe l’océan.

J’aperçois une silhouette assise sur un banc de bois. Un homme. Il fait face à l’étendue d’eau. Son bras droit allongé le long du dossier semble attendre d’y accueillir quelqu’un en son creux. Il se retourne doucement et regarde dans ma direction. Un sourire s’esquisse sur ses lèvres. J’avance d’un pas et je tends la main vers lui…

La vision s’évanouit et je me retrouve sur un balcon plongeant sur un immense hall de pierre. Aucune âme ne déambule dans l’immensité de cet espace. D’après l’architecture et la configuration, il semble que ce soit une ancienne gare. La grande verrière de la voûte, entrecroisée de poutres métalliques, accueille une lumière étincelante. Le sol de marbre beige réfléchit les rayons du soleil de façon si aveuglante que je préfère détourner le regard.

En face de moi, une immense horloge circulaire orne le mur. Ses aiguilles parcourent à vive allure les chiffres romains dans un sens inhabituel. Elles remontent le temps… Alors que je me tiens immobile, fascinée par leur folle agitation, un grand bruit sourd et métallique résonne dans tout le hall. Instinctivement, je couvre mes oreilles de mes mains pour étouffer ce tintement trop agressif. Un autre coup. Un troisième. 03h00. Les aiguilles sont maintenant totalement arrêtées.


Le paysage change à nouveau et me voilà assise sur le banc, face à un océan très agité. Les vagues se jettent sauvagement contre les falaises, laissant leur fine écume revêtir les flancs rocailleux.

Le ciel est à présent violacé. Une voix douce et affectueuse remplace la cacophonie de l’énorme cloche qui résonne encore dans ma tête.

- Tu es revenue…

À ma gauche, de grands yeux bleus remplis de douceur me regardent. Le jeune homme semble avoir une vingtaine d’années. Peut-être une trentaine. Une mèche brune virevolte sur son front au rythme de la brise. Il me sourit une fois de plus. Mon cœur ne fait qu’un bond. Il y a quelque chose de fascinant dans ce regard plein de tendresse. Troublée, je me détourne de lui quelques instants, mais au moment où je souhaite me noyer une nouvelle fois dans le bleu de ses yeux, il a disparu. Je le cherche partout, en vain.

Mais quelque chose de plus inquiétant attire mon attention. L’horizon est en pleine transformation. Le ciel clair vire rapidement au noir. Les ténèbres s’étendent maintenant à perte de vue et la brise a cédé la place à de fortes rafales. La terre gronde sous mes pieds. Les éléments se déchainent de plus en plus violemment. Des particules de poussières, soulevées par les vents tempétueux, m’obligent à me protéger le visage.

Quand enfin une accalmie survient, tout ce que je distingue est en train de se déformer. Les nuages balaient rapidement le ciel. À mesure qu’ils s’éclaircissent, ils s’étendent jusqu’à prendre la forme d’un énorme rectangle avec, en son centre, une sphère opaque. Une ampoule.


J’ouvre les yeux.

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