Chapitre 18 - Oscar 

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05.02.21

The Heaven, LONDON – 10:17 pm.

Je regarde Liam repartir vers ses amis. Enfin, mes yeux sont un peu plus bas que ce qu'ils devraient être. J'en reviens toujours pas de ses habits ! Franchement, c'est impossible de lui trouver un défaut : certains pourraient dire que c'est moche mais je n'y crois pas. Ils le mettent clairement en valeur ; j'avais du mal à me détacher de son torse imberbe et ça m'a rappelé la fois où nous avions baisé. Je me rends compte que je n'avais pas assez pris le temps de le regarder, trop pressé d'être en lui.

Mais je n'oublie pas les paroles qu'il a eues la dernière fois. Il faut que je reste concentré : Liam est une araignée qui n'hésite pas à tisser sa toile pour emprisonner ses proies. J'ai évité d'avoir le moins de contact possible avec lui cette semaine, et la soirée n'est pas le moment pour flancher. Bien au contraire.

Pourtant, je me souviens de ce que j'ai vu tout à l'heure, quand il a fait la bise à ma sœur. La forme que laissait dévoiler son short était on ne peut plus suggestive. J'en reviens toujours pas, il a osé se montrer sans sous-vêtement. Ça montre bien qu'il ne cherche qu'à provoquer et qu'il a chaud au cul : du moment qu'il baise, qu’importe qui c'est.

— Aller les rejoindre si vous voulez, lâche Arthur à côté de moi.

— Pourquoi tu dis ça ? le questionne Sarah.

Il hausse les épaules.

— Je ne sais pas, vous avez l'air de bien vous entendre, malgré ce que tu dis, ajoute-t-il en me regardant. Je ne veux pas que vous restiez avec moi par pitié.

— On ne reste pas avec toi par pitié !

J'acquiesce, d'accord avec ma sœur. J'étais suspicieux, au début, je l'avoue. Qu'un gosse de riches viennent nous voir dès le premier jour et sois gentil avec nous à de quoi être louche. Mais il a toujours été discret, que ce soit sur sa classe sociale ou dans son attitude et il n'a jamais eu un mot de travers envers nous. En plus, il s'entend bien avec ma sœur et je sens qu'elle lui fait confiance et qu'elle l'apprécie alors je ne vois pas pourquoi je devrais me méfier. Peut-être que je me trompe mais j'en doute, on voit clairement qu'il n'est pas comme Liam ou cette peste de Luna.

Arthur nous sourit, ému.

— C'est gentil. Vous savez, je suis content que vous ayez intégré le lycée. Et il y a une raison au fait que je sois venu vers vous le premier jour...

Autre que celle de ma sœur qui te plaît ? Je ne suis pas stupide, je sais quand un gars est attiré par Sarah. Je ne compte pas les poings que j'ai foutus dans des gueules à cause de ça.

— J'ai été à votre place, il y a encore peu de temps. Tobias, le pote de Liam m'a fait des sales coups au début de mon entrée au lycée.

— C'est pas vrai, souffle Sarah, émue.

— Liam n'a rien fait, il semblait ne pas s'intéresser à moi. Mais il ne me défendait pas pour autant. En vérité, je n'ai rien subi de bien méchant. Tout était plus... insidieux. Quelques piques lancées par-ci par-là, des remarques quand on se changeait dans les vestiaires ou quand je posais une question à un professeur. Et puis des regards. Mais depuis la rentrée, plus rien.

— Je suis désolée.

Sarah tend soudain les bras et enlace Arthur. Il se laisse faire, pris par surprise, avant de rendre gauchement son étreinte en me jetant un coup d'œil.

— Ça va. Ce n'était pas vraiment du harcèlement, juste de l'exclusion. Je n'ai pas beaucoup d'amis comme vous pouvait le voir alors forcément, ça aide pas.

Je lui adresse une mimique désolée, sûr qu'il minimise les faits.

— Bref, c'est pas le moment de remuer tous les mauvais souvenirs. On est là pour s'amuser non ?

Il sourit pour se donner du courage.

— Tu as raison ! Et si on allait danser ? demande Sarah.

Arthur et moi échangeons un regard affolé et ce geste nous fait rire.

— Tu sais bien que je ne sais pas danser, plaidé-je.

— Au final, je crois partager un point commun avec ton frère.

Nouveaux éclats de rire.

— Vous êtes nuls les garçons. Aller, venez, j'ai envie de m'amuser.

Elle empoigne la main d'Arthur et même dans la pénombre, je vois la gêne empourprer ses joues. Il me supplie silencieusement de venir à son secours mais je ne bouge pas. Alors, pour se venger, il m'attrape par le poignet et me tire à lui tandis qu'il se fait traîner de force sur la piste. Je trébuche et n'ai d'autre choix que de les suivre.

Sarah, aux anges, commence à se trémousser. J'envie sa capacité à ressentir la musique et à se laisser porter. À côté d'elle, nous ressemblons à deux poissons hors de l'eau qui s'agitent frénétiquement. J'essaye de me détendre et peu à peu, j'arrive à me dérouiller les hanches. Enfin, tout est relatif. Je ne fais que regarder autour de moi, à la recherche de celui ou celle qui se moquerait de moi. Mais personne ne semble me remarquer dans la foule. Tant mieux.

Alors que la musique commence à faiblir, un grésillement se fait entendre, provoquant des cris de frustration sur la piste. Aussitôt, un tapotement se fait entendre et une voix retentit, portée par un micro :

— Messieurs et surtout mesdames, chers camarades, chers amis, j’interromps quelques instants les festivités pour vous souhaiter une bienvenue ! Je vous remercie d'être venus aussi nombreux et nombreuses et j'espère de tout cœur que vous passiez une merveilleuse soirée !

Des hurlements de joies et des sifflements m'assourdissent. Je me faufile un passage pour avoir une vue sur celui qui parle. Liam se tient debout sur une estrade que je n'avais pas vue en entrant. Ou alors, elle a été installée plus tard. Il se détache clairement des gens agglutinés avec ses habits outre le fait qu'il soit en hauteur. Bien entendu, mes yeux accrochent la timide bosse sous son short. Les autres ne semblent s'apercevoir de rien ou alors comme moi, ils se taisent. Peut-être même que certains ne se privent pas pour le dévorer des yeux.

— N'hésitez pas à suivre vos envies et votre instinct en cette magnifique nuit et à explorer en vous ce que vous n'avez jamais osé effleurer du doigt.

— Et puisque les gestes valent mieux qu'un grand discours, je déclare les enchères ouvertes !

Tous se retournent vers le fond de la salle derrière le DJ et Liam. Ce dernier, aussi surpris que nous, cherche du regard celle qui vient de parler dans le micro. Un projecteur se stabilise à l'entrée de l'estrade et une fille habillée tout en noir monte les quelques marches.

— C'est Luna ! chuchote à mon oreille Sarah.

En effet, la meilleure amie de Liam l'a rejoint sous les acclamations. Je remarque aussitôt l'indécence de sa tenue, ne laissant aucun doute sur les formes de son corps. Je secoue la tête. Luna dans toute sa splendeur.

Elle pose une main sur l'épaule de Liam, la laisse langoureusement glisser le long de son torse jusqu'à la ceinture tout en tournant autour de lui avant que ses doigts ne terminent sur sa nuque. Liam se mord la lèvre et lève les yeux avant de tomber à genoux aux pieds devant Luna, face à la foule. Ravie qu'il joue le jeu, la brune pose sa main sur la tête de son ami. Cette vision de soumission provoque des hurlements d'excitation parmi la gent féminine.

Luna porte le micro à ses lèvres écarlates :

— Commençons immédiatement par ce magnifique lot que j'ose qualifier d'excitant.

Elle fait une pause pour que la foule crie son assentiment.

— Notre cher... volontaire ici présent (Liam fait une mimique qui fait rire la salle) a très envie de vous montrer à quoi il fait allusion. Ainsi, y a-t-il parmi vous, une ou un, ajoute-t-elle en insistant, qui dévore des yeux ce bel apollon et qui rêverait de l'embrasser ?

La foule devient littéralement hystérique. Des mains se lèvent de tout part, on hurle et on s'agite. Sarah, Arthur et moi nous faisons bousculer et on se fait repousser du devant de la scène parmi les folles qui sont à deux doigts de grimper sur l'estrade.

Liam se penche Luna et lui murmure quelque chose. Elle lui tend alors le micro :

— Il va sans dire que je préférerais que ce soit un mec, lance-t-il avec un sourire espiègle.

Il parcourt alors la salle des yeux, comme s'il était à la recherche de quelqu'un. Mon cœur s'accélère ; et s'il me cherchait moi ? Mais ils me passent dessus sans me voir.

Luna s'avance alors, fait semblant de choisir mais je suis sûr qu'elle sait déjà qui prendre depuis longtemps. Elle s'arrête, s'accroupit et pose un doigt sous le menton d'une fille.

— Viens ma belle.

La fille ne se fait pas prier et grimpe, poussée par ses folles de copines. Le projecteur l'illumine et elle s'approche de Liam les yeux brillants. Je fais une moue ; elle est quelconque, sans vraiment de charmes.

Liam se relève alors et prend la fille dans ses bras. Il la renverse et comme dans les films, l'embrasse à pleine fougue. La foule hurle de joie et saute en l'air. La fille reprend son souffle, une main sur sa poitrine, un sourire hébétée aux lèvres. Quelle comédienne. Moi, j'ai couché avec lui et je n'ai pas fait le quart de tout ça.

Luna lui demande de descendre puis, elle se tourne vers nous :

— Ce soir, notre volontaire est d'humeur généreuse : il remet le couvert pour une dernière fois ! Alors qui saisira l'occasion ?

Elle laisse le suspense planer, fait mine de chercher la bonne personne. Soudain, elle pointe du doigt quelqu'un dans la foule.

— Toi ! Oui toi, le blondinet, viens par ici, darling.

Des rires fusent alors et je vois ses potes lui tapaient dans le dos. Pas de chance, il doit pas être de ce bord-là. Il résiste tandis que ses amis le forcent à monter et n'a d'autre choix que d'abdiquer lorsqu'un grand gaillard le soulève comme s'il pesait le poids d'une plume. Il arrive à se réceptionner assez dignement sur l'estrade et le projecteur se pointe sur lui. Il crie quelque chose à son agresseur et lui fait un doigt, hilare.

— Eh bien, on est timide ? se moque Luna, faisant rire l'assemblée.

Le blond touché dans son ego, bombe son torse et ses lèvres bougent. Luna lui tend le micro :

— Tu disais ?

— Non.

Nouveaux rires. Moi-même, je souris : il fait le beau mais il n'en mène pas large, en réalité. Tout ça pour impressionner la foule et les donzelles de la salle. Est-ce qu'il aura le courage d'aller jusqu'au bout ? J'en doute.

— Alors, je t'en prie. Il est tout à toi.

Luna libère le chemin. Le blondinet reste un moment immobile, comme s'il hésitait. Puis, galvanisé par la foule, il avance jusqu'à un Liam qui s'est agenouillé, les mains en croix devant lui. Il lève le regard sur le garçon, et tout dans son attitude démontrent une soumission totale. Mais une soumission feinte ; je crois être le seul à remarquer ses lèvres qui s'étirent imperceptiblement. On pense qu'il est la victime de ce petit jeu, mais en vérité, c'est lui en tire le plus de satisfaction. Il joue de son charme à la perfection, et attire les autres dans la toile qu'il a tissé. Comme s'il vient de comprendre dans quoi il est tombé, le blond s'arrête et hésite quant à l'attitude à adopter. Je devine qu'il est intimidé par le regard chocolat de Liam. Combien de fois ce même regard hautain m'a déstabilisé, quand je me retrouvais seul avec lui ? J'avais l'impression qu'il se moquait de moi, qu'il me narguait, comme s'il savait que je n'arrivais pas à sa cheville. Mais c'est trop tard. Le blond, tout comme moi, n'a pas d'autre choix que de terminer ce pourquoi il est là, s'il ne veut pas être la risée de tous. Je ressens de la peine pour lui : moi, je n'ai jamais risqué de perdre la face devant tout le monde. Seulement devant Liam.

Un véritable prédateur qui a piégé ses proies. C'est ainsi que je vois Liam à cet instant alors le blond, dominant de toute sa stature Liam, prend son menton entre ses doigts, et se penche pour l'embrasser. La foule relâche toute la frustration accumulée et l'excitation presque jouissive dans un hurlement sauvage alors que le bisou s'éternise et se transforme en véritable baiser. Il l'a fait.

Je reste là, figé, à les regarder. Une douleur tord mon estomac et je fronce les sourcils. C'est bon, on a compris, il va arrêter de lui bouffer la bouche comme ça ?

Enfin, ils se détachent. Le gars lève les bras au ciel comme s'il venait de gagner la coupe du monde de football. Il devrait se calmer, il ne l'a pas soulevé, lui. Il descend rejoindre ses potes, qui le félicitent. Je ferme les yeux, exaspéré. Une belle brochette de débiles.

— Qu'est-ce qu'il y a Oscar ?

Je me tourne vers ma sœur, qui me regarde, pensive.

— Rien du tout. Je me demande juste pendant encore combien de temps ce petit jeu va durer. On n'est pas là pour regarder Liam se donner en spectacle toute la soirée, non ?

Sarah hausse les épaules. Comme si elle a entendu ma prière, Luna reprend le micro :

— Bien, je pense que notre petit Liam a eu son compte pour la soirée. C'est maintenant à votre tour de profiter ! Je vous souhaite une excellente soirée et surtout, d'excellents plaisirs !

Elle descend de l'estrade sous les acclamations avant de s'évanouir dans la foule. Le DJ reprend son rôle et bientôt, la piste de danse est à nouveau envahie de projecteurs et de corps dansants.

Arthur et moi accompagnons Sarah danser, pour lui faire plaisir tous les deux. J'intercepte plusieurs fois les regards avec lesquels Arthur couvre ma sœur. Elle ne voit rien, trop occupée à se dandiner comme si le démon de la danse s'était emparé de son corps. Toutes ses préoccupations se sont envolées de son esprit, je ne l'avais jamais vu prendre autant de plaisir, surtout dans une discothèque. Je crois que c'est la première fois qu'elle y met les pieds, et je ne pensais pas qu'elle aimerait ça. Peut-être n'était pas que cette jeune fille qui bouquine et étudie beaucoup, après tout. Elle n'a tout simplement pas eu l'occasion de sortir et de me montrer ce côté de sa personnalité auparavant, quand nous étions dans notre ancien lycée et qu'elle se faisait harceler.

Je décide, dans un accès de bonté, de m'écarter et de les laisser un peu tous les deux. Je refoule mon côté protecteur en me raccrochant à l'idée qu'elle était en sécurité avec Arthur. Je suis quasiment certain qu'il serait prêt à se jeter dans la bataille pour elle.

Je vais au bar et décide de me prendre un verre. Quelques instants plus tard, le barman – un homme d'une vingtaine d'années, barbu et tatouée, plutôt bad boy – me dépose mon cocktail. J'en bois une gorgée et sens la vodka me chatouiller le gosier. Je reste assis, à siroter mon verre, quand soudain, un mouvement attire mon attention à la périphérie de ma vue. Je plisse les yeux pour percer la pénombre et j'aperçois alors une tête blonde familière. Elle s'écarte alors et je reconnais Liam avec le gars qui l'a embrassé plus tôt dans la soirée. Que font-ils tous les deux... ?

J'écarquille les yeux quand je les vois s'embrasser. Me dis pas que... Je pensais qu'il l'avait fait sous la contrainte, pour satisfaire les gens autour. Mais dans la façon qu'il a de poser sa main dans le cou de Liam et de glisser l'autre jusqu'à ses fesses...

Ils arrêtent un instant et Liam se penche à l'oreille du gars. Puis, il lui sourit et le prend par le bras. Je me tortille sur ma chaise pour voir où il l'emmène. Ils disparaissent derrière un mur. Je lève les yeux aux néons multicolores au-dessus de l'entrée. Toilettes.

Comment ça, toilettes ? Je manque de m'étrangler avec ma propre salive. Je me souviens de la tenue de Liam et le fait qu'il n'a pas... Putain, il a tout prévu !

Je saute de ma chaise et abandonne mon verre. Bon sang, ça va pas se passer comme ça. Oh non. Une fois, pas deux.

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