Chapitre 20 - Oscar 

8 minutes de lecture

06.02.21

The Heaven, LONDON – 3:12 pm.

Je finis de lécher la dernière goutte de sperme qui colle à mes doigts et je lance un sourire salace à Liam. Son regard est encore allumé de cette étincelle d'excitation et je n'ai aucun mal à deviner ce qu'il pense. Mais il est impuissant, à moitié dévêtu, tout comme moi. Son torse brille de sueur et se soulève au rythme de sa respiration qui tend à se calmer. Je m'approche de lui, l'embrasse fougueusement une dernière fois et insère ma langue entre ses dents pour qu'il puisse connaître le goût de sa semence. Puis, toujours sans échanger un mot, je me rhabille je déverrouille la porte et sors. Je prends une grande inspiration pour chasser la chaleur de mon corps. Je sens derrière moi Liam sortir à son tour. Nous nous regardons le temps d'un silence, embarrassés.

— Je vais rejoindre ma sœur, dis-je comme excuse pour m’éclipser.

Il hoche la tête doucement, comme perdu dans ses pensées. Alors que j'allas quitter la pièce, il me hèle.

— Est-ce que tu veux prolonger la soirée ? Et la rendre plus... démente ?

Je hausse un sourcil devant son air conspirateur. Soudain, il farfouille dans la poche de son short et en tire un petit sac plastique transparent. À l'intérieur, trois comprimés blancs.

— C'est quoi ? demandé-je suspicieux.

Il balaie ma question d'un revers de la main.

— Le plus important, c'est de savoir ce qu'ils peuvent nous apporter.

Il s'approche du lavabo et fait rouler le contenu du sachet sur le bord sous mon regard inquisiteur. Puis, il saisit une pilule et la fait rouler entre les doigts avant de la lever à hauteur de mes yeux.

— Qu'en dis-tu ?

Il me sourit, de ce sourire qui, je le sais, a pour but de briser mes défenses et d'ensorceler. Il l'a déjà utilisé à maintes reprises. La première fois a été lors de la soirée où nous avions baisé, alors qu'il tentait de m'entraîner dans la piscine. La première fois que je m'en suis rendu compte.

— Juste une fois... Promis, ça ne te fera aucun mal.

Je sais pertinemment ce que c'est. Et je sais tout aussi bien que je ne devrais pas accepter. Devenir addict dès la première prise est très rare, mais pas impossible. Et je ne me surestime pas. Mais ce n'est pas la première fois que Liam en prend et il ne semble pas complètement dérangé. Enfin, je crois. Alors pour moi, ça sera pareil.

Ses paroles me reviennent en mémoire. Soirée où tout est permis. Si ce n'est pas maintenant que je prends des risques, ce sera quand ?

Ses yeux posés sur moi sont comme deux billes de feu qui contiennent tous les péchés du monde. Et c'est sans hésitation que je plonge dedans.

Voyant que je finis par céder, Liam porte le comprimé à sa bouche qu'il pose sur sa langue. Puis, il s'approche et me roule une pelle. La pilule passe de sa bouche à la mienne, engluée de sa salive. Je l'avale sans me poser de questions et continue à l'embrasser. Je sens le désir revenir mais je décide que c'en est assez pour ce soir. Je rompts le contact et recule.

— Je vais vraiment rejoindre Sarah, maintenant ou elle va commencer à se demander où je suis.

Liam ne semble plus se préoccuper de moi, et avale à son tour un comprimé. Alors que je sors finalement des toilettes, j'entends sa voix qui me lance un « À plus tard, pretty boy » et la porte se referme sur lui.

La musique me perce les tympans et je reste un instant pantelant, le temps de m'y habituer à nouveau. Puis, je pars à la recherche de ma sœur. Je me fraye un passage parmi le monde fou qui se trouve dans la boîte, frôle des corps, en percute certains, m'excusant à peine. De toute façon, ils ne m'entendraient même pas. Je lève les yeux et un projecteur m'éblouit de sa lumière violette. Je ferme les yeux violemment, une douleur vrillant mes tempes. Je continue d'avancer, ma main en visière. J'ai conscience que mes pas sont imprécis, fuyants, et que j'ai du mal à me tenir debout. Mais je n'ai pas la sensation d'être instable, la pièce ne bouge pas. Je comprends que ce sont les effets de la drogue et j'essaye de lutter. J'arrive difficilement près du bar et m'appuie sur un des tabourets. Soudain, une voix résonne à mes oreilles, mielleuse et rassurante.

— Ne résiste pas, Oscar, laisse-toi aller.

Mon prénom dans sa bouche est une douce mélodie. Des mains me saisissent par les hanches et j'embrasse Liam. Une explosion de messages inonde mes sens : ses lèvres pulpeuses sur les miennes, sa langue rugueuse qui explore sa jumelle, ses mains qui me marquent au fer rouge, ses doux cheveux qui me chatouillent le front mais surtout, son torse lisse dont je n'arrive pas à décoller mes doigts.

— Viens.

Je le suis comme un automate. Je le suivrai où il veut car il est mon seul repère dans ce nouveau monde qui ne cherche qu'à être exploré. Je fixe sa main dans la mienne et nos doigts entrelacés. J'ai une folle envie de les porter à ma bouche, de les sentir sur moi. Il me demande de m'asseoir sur un canapé et me tends un verre. Je le finis d'une traite, l'eau me fait un bien fou. Je sens que le brouillard de mon cerveau se dissipe un peu. Je tourne la tête, Liam a disparu. Qu'importe, je n'ai pas le courage de me lever et m'enfonce un peu plus dans le sofa moelleux. Je perds la notion du temps, et me laisse complètement immergé dans ce doux état. La musique semble lointaine et les projecteurs caressent de lumière mon visage. Je ferme les yeux pour profiter un peu plus de cette chaleur réconfortante.

La musique me réveille en sursaut et une tâche blanche à ma gauche attire mon attention. Je fronce les sourcils pour me concentrer et reconnais la personne : Chloe discute avec un type sur un siège non loin de moi. Soudain, il se penche vers elle et l'embrasse. Sa main se pose sur sa cuisse et disparaît presque jusque sous sa robe. Eh beh, dis donc, elle a l'air de bien aimer ça, cette coquine.

Ils sont brusquement interrompus par un gars. Je reconnais Tobias à ses cheveux bruns et le costume qu'il porte que j'ai aperçu plus tôt dans la soirée. Je n'entends rien de là où je suis mais je comprends qu'il crie sur Chloe. Il n'a pas l'air d'avoir apprécié qu'on touche à son amie. Un souvenir tente de remonter à la surface, quelque chose dont je devrais me rappeler mais je n'y arrive pas. Il bouscule le type et doit certainement le menacer comme je l'ai fait plus tôt avec le gars qui a voulu baiser Liam. À cette pensée, une montée de rage remplit mon cœur mais je me calme immédiatement quand je revois Liam à genoux devant moi, ma bite dans sa bouche. Le type déguerpit enfin. Chloe se lève, tout aussi en colère que Tobias et tourne les talons. Il la saisit par le bras pour la forcer à rester. À la vitesse de l'éclair, Chloe se tourne et gifle Tobias devant mon air hébété, mes lèvres dessinant un O parfait. Elle part à l'autre bout de la salle et le pote de Liam reste planté là, frottant sa joue avec sa main. Un sourire se dessine sur mes lèvres. Ah les femmes !

En pensant aux femmes, je me rappelle de l'existence de ma sœur et me lève d'un bond. J'hésite un instant : Liam n'est pas revenu. Mais mon instant de grand-frère prend le dessus et je pars à la recherche de Sarah. Cette fois-ci, je la trouve rapidement, elle danse encore avec Arthur, un poil trop collé. Mais la drogue annihile ma capacité à intervenir.

Ma sœur m'aperçoit et me fait un geste. Je les rejoins, et Arthur reprend une distance raisonnable avec elle.

— Ça va ?

Je hoche la tête par facilité.

— T'es sûr ? T'as l'air complètement mort.

— L'alcool, mens-je. J'ai un peu trop bu.

— T'étais où ?

Un mensonge à la fois.

— Avec Liam.

Elle ne cherche pas à en savoir plus, certainement préoccupée par mon état et parce qu'Arthur est à côté.

— Tu veux rentrer ?

— Non, crié-je dans son oreille. Je veux pas t'empêcher de t'amuser.

Arthur intervient :

— Je peux vous ramener si vous voulez. J'ai juste à appeler mon chauffeur.

Ma sœur et moi nous concertons du regard.

— D'accord, merci, c'est adorable de ta part, répond ma sœur.

Arthur nous sourit et nous fait signe de le suivre. Nous sortons de la boîte de nuit et le froid nous cueille. Nous nous enfouissons dans nos manteaux que nous avions récupérés du vestiaire et attendons la voiture d'Arthur, un bras de Sarah sous le mien. Elle arrive très vite – enfin, d'après ma perception du temps tronquée – et nous nous engouffrons sur la banquette arrière, ma sœur au milieu.

Arthur et Sarah discutent sur le trajet mais je ne les écoute pas. Je pose ma tête contre la vitre et observe les lumières de la ville défiler devant moi.

Je sens qu'on me secoue doucement et lorsque j'ouvre les yeux à nouveau, la voiture est arrêtée. J'émerge de mon sommeil pour voir le visage de Sarah penché sur moi. Elle m'aide à m'extirper de la voiture et me fait asseoir sur le rebord d'un parapet près de notre immeuble. Puis, elle rejoint Arthur et je les regarde échanger quelques mots. Ma sœur sourit et fais la bise à Arthur.

Elle m'aide à me relever et nous prenons l'ascenseur. Je fais le plus d'effort possible pour ne pas réveiller notre mère et nous rejoignons ma chambre sans souci. Je la soupçonne d'être réveillée mais de ne pas s'être levée, elle savait que nous allions rentrer tard. Ma sœur m'aide à me déshabiller mais la drogue ne circule presque plus dans mes veines et son aide est superflu.

— Aujourd'hui, c'est toi qui prends soin de ton grand-frère, chuchoté-je pendant que je retire mon pantalon.

— Ma façon de te rendre la pareille après tout ce que tu as fait pour moi.

Je suspends mon geste et croise son regard. Ses yeux pétillent dans la pénombre et reflètent toute sa gratitude. Je lui souris, touché.

Puis, elle soulève les couvertures et je me glisse dans mon lit.

— Merci, Sarah.

— De rien. Bonne nuit.

Elle s'apprête à refermer la porte quand je la retiens.

— Sarah ?

Elle passe la tête par l'ouverture.

— Il est vraiment gentil Arthur, hein ?

Le sourire qu'elle m'adresse me réchauffe le cœur. C'est un sourire sincère, un sourire que je n'avais pas vu depuis longtemps sur son visage.

— Dors, maintenant.

La porte à peine fermée que je sombre dans les bras de Morphée, éreinté.

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