Chapitre 7

15 minutes de lecture

Emmène-moi avec toi. Où que tu ailles. Whaou.

Devant mon air perdu, il secoue simplement la tête en souriant et me fait signe d’approcher. Hypnotisé par ses lèvres ravageuses, j’obéis. Nous nous mettons dos à dos. Je ne vois plus son visage mais ressens sa présence comme s’il faisait partie intégrante de moi.

Je peux pressentir chacun de ses gestes. Sa main qui attrape son paquet de clopes… L’autre qui fouille à la recherche de son briquet… J’entends la pierre à feu craquer et j’imagine sans peine sa bouche se refermant sur la cigarette et esquisser le mouvement d’inhalation de la fumée presqu’aussi toxique que mes médicaments.

Sa main effleure la mienne. Pas par inadvertance. Son contact se prolonge, pour mon plus grand plaisir. D’effleurement, elle exerce à présent une pression non négligeable sur la mienne. Elle me fait mal mais…

Je ne veux pas qu’elle me lâche.

D’où sort ce genre de pensées saugrenues ? Mais la vérité est là. Sa main enserre la mienne jusqu’à m’en faire souffrir et je ne veux pas qu’il me lâche.

  • Si tu as quelque chose à me dire ou à me demander c’est le moment, fis-je, la voix assurée mais le cœur absent.

Je sais qu’il sourit de cette façon que j’aime tant tout autant que je la redoute. Ce sourire carnassier. Ce sourire démoniaque.

  • Mon petit lion s’énerverait-il par hasard ?

Il n’y a dans sa voix aucune trace de sarcasme ou d’un quelconque sentiment. La pression de sa main se fait plus douce jusqu’à ce qu’elle soit juste posée sur la mienne. J’ouvre la bouche pour parler mais…

  • Mon petit frère s’est suicidé avec des médicaments. Sans que je puisse agir. Des anxiolytiques. Un peu comme ceux que tu prends actuellement.

Mon cœur s’est arrêté.

Son petit frère est… mort ?

C’est donc pour ça qu’il n’aime pas le terme de grand-frère. Et ça explique aussi la phrase de Stéphanie.

Fais-le pour Rey.

  • Quand je t’ai trouvé… Avec ce fichu bocal de médicaments vide… J’ai bien cru que…

Il se replie sur lui-même, sûrement la tête entre les genoux. Sa main glisse mais je la rattrape. À mon tour de la tenir. Je sens naître en moi un sentiment, un sentiment très désagréable, comme si un étau comprimait ma poitrine…

  • Ma mère a tellement bu ces trois dernières années qu’elle a fini par tout oublier, jusqu’à ma propre existence, avouais-je en chuchotant, sans même m’en rendre compte. Elle a été internée… depuis, j’enchaîne les crises...

Bizarre.

Je parle de ma mère et… mon tourbillon ne se forme pas. Pas de sentiments négatifs, ni de sensation d’étouffement… Étrange. Rey se met à rire doucement et serre ma main.

  • Deux bras cassés. On forme une belle paire.
  • Mouai…

Je souris jusqu’à ce qu’une sombre pensée ne me gâche ce moment…

Et dire que tu ne sais pas tout…

  • Rey, murmurai-je, je…
  • Mmmhh ?
  • Je… Je ferai des efforts… Tu sais pour les médocs…

Tant que tu restes près de moi… Ça ira…

  • Merci, mon petit lion.

Je sens son sourire dans sa voix. Son soulagement. Dos à dos, nous observons les étoiles qui parsèment le ciel, dans un silence absolu. Main dans la main.

Vais-je seulement être capable de tenir cette promesse ?


  • Dépêche ! Faut qu’on y aille ! me lance Rey, au petit-déjeuner.

J’ai eu le droit à un réveil mouvementé ce matin… Rey est entré dans ma chambre, par la fenêtre, une fois n’est pas coutume, et m’a balancé un casque en plein estomac.

  • Je crois bien que j’ai une idée pour tes problèmes d’angoisse et tes crises de colère. Si ça marche pour moi, peut-être que pour toi aussi !

Je n’ai pas eu le temps de comprendre ce qui se passait qu’il était déjà parti. Je me suis levé et après être rapidement passé par la case toilette, je suis descendu prendre le petit déjeuner.

Stéphanie et Arnold semblaient vraiment heureux de la présence de Rey à table.

Aurais-je droit à ça moi aussi un jour ? Est-ce que je peux seulement espérer ?

Précipité par Rey, je finis mon café au lait en vitesse et le suit dans le garage. Je n’ai pas vraiment visité cette partie de la maison. Hormis les véhicules, un établi se trouve tout le long du mur du fond sur lequel sont rangés des outils presque avec maniaquerie. Trois vélos sont aussi accrochés au plafond par un système de chaîne. L’un d’eux attire particulièrement mon attention.

  • C’était le mien. Prends-le si tu veux. Je t’en fais cadeau…

Ces dernières paroles, susurrées au creux de mon oreille par un Rey beaucoup trop proche, me font frissonner. Je ne l’ai pas entendu arriver. Je fais mine de sursauter avant de le frapper. Il se met à rire franchement.

  • Bon, on y va ou on attend le déluge ?

Je vérifie que personne ne nous a suivi avant de prendre la parole.

  • Tu m'emmènes où ?
  • Vers mon destressant personnel…

Je dois avouer que je suis curieux. Il allume sa moto et je monte derrière lui, non sans une note d’appréhension. Il me regarde me sort son sourire démono-carnassier avant d’accélérer.

Finalement, il est assez prudent. Nous roulons… En fait, il a pris la moto juste pour faire le tour du quartier. Nous nous arrêtons au Akuma Club. Devant mon air ahuri, il me tire la langue…

  • Elle est en rodage…

Je lève les yeux au ciel.

L’Akuma Club n’est absolument pas un bar… mais une salle de musculation. Rey entre et salue quelques personnes ici et là. Il se dirige d’emblée vers une femme assez petite d’une quarantaine d’année.

  • Hey ! Coach !

Elle se retourne lentement et un sourire éclaire son visage.

  • Rey ! Chou !

Chou ?!

Un sentiment désagréable s’empare de ma poitrine sans pour autant ressembler à ce que je connais déjà. Elle s’approche et enlace mon ami.

  • Et lui c’est… ? lui demande-t-elle, en me détaillant de la tête au pied.
  • Oh… Il s’appelle Tristan et vient d’emménager chez Ma. Il a… mmmh… disons besoin de déstresser de temps en temps… Du coup, j’ai pensé que tu pourrais l’aider… Comme tu l’as fait pour moi.
  • Je vois ça, fait-elle en regardant mes mains, les sourcils froncés. Salut ! Moi c’est Érika ! Dis-moi, tu es bien maigrichon ! Va falloir te remplumer mon grand ! (Tiens comme un air de déjà vu…) Tu as déjà fait du sport en salle ?
  • Désolé Rika… mais Trist réserve sa jolie voix uniquement pour moi.

La dernière phrase de Rey est accompagnée d’un clin d'œil. Je lui souris et hoche la tête à la dénommée Érika. Je ne sais pas pourquoi mais elle m’est finalement sympathique.

  • Bon. Je finis mon coaching et je suis toute à vous !

Je suis Rey à travers la salle : tapis, pompes… Tout y passe. Je ne pourrais jamais faire la même chose ! Je n’ose même pas essayer.

Je le regarde faire et m’avoue silencieusement que je suis un peu jaloux. Il est tellement… sexy. Ses muscles sont saillants et le voir transpirer ainsi…

  • Tu as fini de faire le toutou ? me demande Érika, sarcastique. Viens, suis-moi. Voyons un peu ce que tu vaux…

Elle m’entraîne vers différentes machines : je suis un peu perplexe mais une fois qu’elle m'a montré comment faire, j’exécute le mouvement. Au bout d’une vingtaine de minutes, je n’en peux plus… Je sue énormément, j’ai mal partout… et je me sens bien.

  • Lorsque tes mains seront guéries… on pourra se mettre à ça. Tu verras c’est… Gé-nial.

Elle me montre le coin boxe au moment où elle me dit ça : pas grand chose, quatre sacs de frappe, deux punching ball et un ring. Erika me laisse sur un banc et repart vers d’autres clients. Rey se laisse tomber à côté de moi.

  • Alors ?
  • J’ai mal… je lui chuchote en aparté.

Il part dans un grand éclat de rire.

  • C’est un peu le but… Avoir une douleur ailleurs pour oublier celle qui est là, me répond-il en posant sa large main sur ma poitrine.

Mon cœur cogne et je pose ma main sur la sienne en hochant la tête. Rey me sourit et je vois des étincelles. Des étoiles…

  • Allez viens ! On va aller squatter !

Il me prend la main et m’entraîne vers la cage à squat. Je le regarde faire : il prend une barre, y installe des poids et la place sur les cales prévus à cet effet.

  • Érika t’a montré comment faire non ?

Je hoche la tête.

  • Bon. Tu le feras après moi. Ne fais pas cette tête ! Je la déchargerai avant ! C’est sûr qu’avec ton gabarit tu ne soulèveras pas la moitié de ma charge ! Tu commenceras la barre à vide et je t’assurerai, t’inquiète.

Je le regarde faire. Lors du mouvement, je peux percevoir les muscles de son dos et de ses jambes se contracter sous la charge de la barre… Je déglutis malgré moi…

  • À toi.

Il enlève les poids et je me retrouve avec une barre de dix kilos. Rey me place dans la cage. La barre sur mes épaules, je fais un pas en arrière et entame mon squat.

  • Attention… Tu serres les genoux. Écarte-les sinon tu risques une blessure. Voilà. Recommence. C’est beaucoup mieux.

J’ai du mal à me concentrer. Rey est proche de moi. Trop proche. Au bout de la sixième répétition…

  • Rey… Rey… Je… Je n’y arrive plus… Je… ne…
  • Ne bouge pas mon petit lion… Je vais t’aider… me susurre-t-il à l’oreille. Fais attention… Tes paroles… prononcées à l’instant… peuvent signifier tout autre chose… dans un contexte plus…

J’ai comme l’impression que le temps s’est arrêté. Je n’ai effectivement pas envie de bouger. J’ose à peine respirer… Le corps de Rey s’est collé au mien. Son odeur envahit mes narines et une sorte d’euphorie me gagne.

Pire qu’une drogue…

Ses mains enserrent les miennes et je sens son souffle tout près de mon oreille.

Je rêve ou sa respiration s’est accélérée ?

Il m’aide à me relever et à poser la barre. Mais ne me lâche pas. Mon cœur cogne dans ma poitrine et une sueur froide coule le long de ma joue et je la sens glisser dans mon cou… Je frissonne. La main de Rey s’est posée sur mon ventre et le caresse de haut en bas.

  • D’ici quelques mois… Tu auras ici des abdos en béton…
  • Hey ! Trouvez-vous une chambre ! se moque un des clients.
  • Tsss…

Rey s’éloigne de moi brutalement et se dirige vers les vestiaires. J’hésite. Dois-je le suivre ou pas ? Comme je n’ai pas envie de rester seul, surtout suite à cette remarque vraiment désobligeante, je lui emboite le pas. Arrivé dans la pièce, je me fais tout petit : Rey a une énorme aura de colère qui émane de lui.

  • Rey ?
  • Mais quel crétin ! Je lui en collerai bien une !
  • Je crois bien que c’est toi qui a besoin de déstresser là…

Il s’arrête, complètement interloqué et me regarde. Son œil doré passe d’une colère froide à quelque chose de plus chaud, de plus intense mais c’est l’azuré qui me fait le plus d’effet. Il repousse une mèche de cheveux trempés de son front avant de cacher ce regard si troublant de la même main qu’il a posé sur moi…

Il éclate de rire.

  • Merci mon petit lion. Mon petit lion rien qu’à moi…

Je tends l’oreille. Il vient bien de dire… ?!

  • Étape deux. Suis-moi.

Étape deux ?

Nous sortons de la salle de sport à la fin de la matinée, après un bref salut à Érika et une douche bien méritée.

  • N’hésite pas à revenir Tristan ! Je te ferai progresser !

Je n’avais pas réalisé que nous y avons passé autant de temps. Reviendrai-je ? Certainement. J’ai beaucoup aimé la libération d’endorphine… Je pourrais y devenir accro qui sait ? Je souris.

  • C’est quoi ce sourire ? me demande Rey, en me tendant le casque.
  • Mmmh… Je me disais que je risque de revenir à l’Akuma… Peut-être même que j’y deviendrai accro comme une certaine personne de mon entourage… lui répondis-je avec un clin d'œil.

Il sursaute et me regarde d’un air si doux que j’en oublie de respirer. Il enfourche la moto et m’y invite. Avant de décoller, il me murmure :

  • Évite de me faire des clins d'œil comme ça… ou je réfléchirai vraiment à l’idée de prendre une chambre…

De quoi ?!

Nous roulons assez longtemps. Après être sorti de la petite bourgade bourgeoise, nous arrivons à un croisement : à gauche, direction l’océan, à droite la colline où se situe le cimetière et tout droit, le centre commercial. Il prend à gauche. Nous arrivons dans un endroit assez isolé.

Rey finit par s’arrêter à l’orée d’un petit bois épineux, en piteux état, devant une barrière tout aussi piteuse, avec le logo interdiction d’entrer. Je peux entendre le ressac de l’océan, pas très loin. Il regarde à droite et à gauche, comme s’il craignait d'être vu par quelqu’un. Je fais comme lui mais ne distingue personne. Et hop, il soulève la barrière et entre. Je sens le petit goût de l’interdit couler dans ma bouche. Et j’aime ça.

Nous arrivons aux abords d’une falaise assez abrupte. En contrebas se trouve l’océan. Je descends de la moto et suis subjugué par le spectacle qui s’offre à moi. D’un bleu profond, l'étendue maritime s’ouvre devant moi telle une porte sur un autre monde. J’ai presque envie d’ouvrir mes bras et de saisir à bras le corps cette immensité…

  • Doucement mon petit lion ! Un pas de plus et c’est le vide qui t'attend…

Rey a posé son avant-bras sur mon bas ventre et m’a attiré contre lui. Mon dos est appuyé sur son torse et j’adore cette sensation. Je m’enivre de ce bien-être

  • Viens, je vais te montrer quelque chose. C’est mon petit secret.

Il se dirige vers la falaise : un sentier descend pratiquement jusqu’en bas. Un sentier vraiment, vraiment dangereux. Rey semble percevoir mon hésitation et me prend la main…

  • Ne t’en fais pas. Plutôt mourir que de te laisser tomber.

Ses paroles ont un étrange pouvoir sur moi. Je n’ai plus peur et suis Rey dans une confiance absolue.

  • Seigneur… murmurai-je lorsque je pénètre dans son secret.
  • Tu peux le dire !

L’endroit est magnifique… Creusée dans la roche volcanique par le ressac incessant, une grotte s’ouvre devant moi sur l’immensité de l’océan. Une plage de sable noir donne sur un petit lac salé aux douces ondulations, sans cesse alimenté par les vagues. Sur le plafond haut, des milliers de toiles d’araignées, imprégnées de gouttelettes d'eau, donnent un effet lumineux à l’endroit. Quelques arbustes tentent ici et là de s’implanter et apporte une petite touche de verdure au noir et bleu profond qui dominent.

Il y règne une sorte de mysticisme, comme si la nature elle-même se vantait de son savoir-faire exceptionnel.

  • Et attends de voir lorsque le soleil se couche ! se pavane Rey, en se dirigeant d’emblée vers l’eau. Tu viens ?
  • Peut-être plus tard.

Je ne veux pas me déshabiller.

Il ne doit pas voir ça.

Je me laisse tomber sur le sable : il est chaud, doux et tellement fin ! Je soupire d’aise… avant de crier de surprise. Rey m’a empoigné et jeté sur son épaule mouillée comme un vulgaire sac de pommes de terre. Je me débats mais impossible de le faire lâcher prise. Là, il me balance dans l’eau. Tout habillé.

Elle est fraîche mais me fait un bien fou. Je remonte à la surface pour entendre son rire.

  • Bah voilà t’es dans l’eau !
  • Tu vas me le payer !

Nous passons une bonne partie de l'après-midi dans cette eau salée, une complicité nouvelle se renforçant à chaque minute. Le soleil se couche. Rey avait parfaitement raison… le spectacle est magnifique.

Assis sur une roche surplombant l’océan, la tête posée sur mon genou relevé, j’observe l’astre du jour s’enfoncer lentement dans les eaux profondes dans diverses teintes orangées, jaunes et rouges. Alors que le soleil n’a pas complètement disparu, la pleine lune fait une entrée majestueuse bien que quelque peu ternie par son amant lumineux.

Je rejoins la plage et m’allonge dans la semi obscurité de la grotte.

Quelle journée !

Je réalise que je n’ai pas eu recours à mes médicaments depuis presque vingt-quatre heures.

Nouveau record…

Je souris à moi-même et pose mon avant bras sur mes yeux. Je sens Rey s’approcher de moi. Il se laisse tomber dans le sable, tout près. Dans mon obscurité, mes ténèbres, une douce lumière s’est immiscée. Mon corps ressent sa chaleur qui le réanime peu à peu. Je me sens bien auprès de lui. Il agit comme un puissant médicament guérissant mes blessures les plus profondes.

Je pousse un long soupir.

  • C’était pourquoi ça ? me questionne Rey.
  • Pour rien… j’ai passé un super moment. Merci Rey.
  • Pas autant que moi… Mon petit lion…

Le ton employé déclenche comme une sonnette d’alarme dans ma tête. Je lève mon bras et je le regarde… Mon souffle se coupe. Il est assis, dans la même position que moi, il y a cinq minutes, la tête posée sur son genou. Ses cheveux mouillés glissent devant ses yeux et le vent s’amuse à mélanger les mèches brunes aux mèches rouges. A cause de l’eau salée, ses boucles sont plus serrées.

Il se mord la lèvre inférieure, comme s’il voulait s’empêcher de faire quelque chose. Quelque chose… d’interdit. Son œil bleu, bien que mort, semble vouloir me dévorer et je ne peux détourner le regard de cet azur si beau. Son œil doré est à demi fermé mais je sens sa brûlure sur ma peau.

C’est une sensation… inexplicable.

Tout à coup, le voilà à califourchon sur moi, comme cette fois-là, dans mon lit. Sauf qu’en ce moment… Ses mains sont sur les miennes, me bloquant toutes velléités de défense.

Ai-je vraiment envie de me défendre ?

Non. Nos yeux se sont accrochés. Nos respirations sont toutes deux saccadées. Exactement au même rythme. Son visage se rapproche. Lentement. Doucement. Je n’entends plus rien. Ni le ressac, ni le vent, ni les oiseaux… Juste mon coeur. Mon cœur qui tambourine. Qui accélère.

Rey pose son nez sur le mien. Ce simple contact nous enflamme. Tous les deux.

  • Rhhha… Mon petit lion…

Sa voix… Sa voix est chargée… De quelque chose… quelque chose de sensuel… Ses mains se referment sur les miennes. Fort. Tellement fort que je pousse un petit cri de douleur. Petit cri qui ramène Rey à la réalité. Son œil doré se voile. Il lâche doucement son emprise sur moi et éloigne son corps du mien.

J’ai froid.


Nous avons repris le chemin du retour sans un mot. Sans un regard échangé. Arrivé chez Stéphanie, Rey est monté directement dans sa chambre, sans plus de considération pour moi. Cela me fait mal. Comme s’il m’abandonnait. Comme s'il… me rejetait.

Qu’est ce que j’ai fait pour mériter ça ?

Je ne sais pas. Et ça me rend fou. Des voix se sont allumées dans ma tête.

Tu es inutile.

Immature.

Regarde-le et regarde-toi. Pas étonnant.

Pauvre petit con.

À nouveau, mon monde, si empli de couleurs durant cette journée, se reteinte de noir et de gris. Je m’enfonce encore et toujours dans mes ténèbres. Mon tourbillon ne se forme pas car j’ai encore la chaleur de Rey sur mes mains, mon corps, ma peau… mon coeur.

Mais il n’est pas loin. Je le sais. Il me nargue. Je veux lui résister mais…

Quelqu’un me tape sur l’épaule. Je sursaute et me reconnecte partiellement à la réalité. C’est Stéphanie. Devant son air enjoué, je fournis un effort.

  • Tu sais… Pour l’école…

Non.. Pas ça… pas maintenant…

  • Ne fais pas cette tête voyons ! J’en ai parlé à l’assistante sociale et j’ai réussi à décaler ta rentrée d’une semaine. C’est tout ce que j’ai pu faire mais c’est mieux que rien non ?

J’essaie de sourire. Apparemment, c’est réussi car Stéphanie me le rend. Je monte dans la salle de bain. Sous la douche, je ferme les yeux et me remémore cette journée. Surtout les moments où Rey et moi étions proches physiquement. Ces pensées ne m’aident pas beaucoup. Surtout après le rejet de ce soir.

J’entre dans ma chambre, le cœur gros, les larmes aux bords des yeux.

Rey sera peut-être sur le toit ?

Plein d’espoir, je sors mais il n’y est pas. Quelque chose me dit qu’il ne viendra pas ce soir… Je me sens triste, vide, abandonné. Je rentre et me mets au lit. Là, je réalise que je n’ai rien mangé de la journée.

Pour ce que ça change.

Allongé dans l’obscurité, j’essaie de gagner le monde du sommeil. Je prie Morphée pour qu’il m’enlève au plus vite… Au moins quand je dors, je ne ressens rien… Peut-être qu’avec une pilule ? …

Ne pleure pas mon petit lion… Je dois m’éloigner de toi… Parce que je ne sais pas de quoi je serais capable en étant si proche de toi… j’ai… tellement… tellement…

VROUM ! VROUM !

Je me réveille en sursaut. Un rêve ? Mes joues sont encore baignées de larmes et je sens encore la caresse de sa main sur ma peau.

Non. Je n’ai pas rêvé. Il était bien là.

Je descends en trombe dans la cuisine. Stéphanie semble stupéfaite. Comme si c’était une habitude, Rey a laissé sa tasse sur la table de la cuisine. Je la montre à Stéphanie.

  • Ah, Rey ? Il est parti pour quelques jours. Un emploi dans la ville voisine, si j’ai bien compris.

Un emploi ?

Mon cœur se brise. Non. Ce n’est pas un emploi. C’est moi. Il s’éloigne de moi.

Tu vois. Lui aussi il t’abandonne. Combien de temps avant que Stéphanie ne le fasse aussi ?

Annotations

Vous aimez lire Angel ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0