Des chaussures pour Noël
C'est dans un endroit particulier que se déroule l'histoire de cette chanson. J'y suis, dans cette file d'attente, en train d'étouffer dans l'ambiance surchauffée de la boutique dans laquelle j'ai traîné mes godasses. C'est Noël dans quelques jours, mais je n'y suis pas, je ne suis pas dans l'esprit, je ne sais pas, un truc étrange me pèse sur les épaules. La grisaille, le boulot pourri, les collègues toxiques, pouah, et qu'est-ce qui m'a pris de venir dans cette boutique. Je me fais marcher sur les pieds, les gamins hurlent soit parce qu'ils ont peur de Santa Claus, celui là braille parce qu'il s'est fait enguirlander par son père. Sympa l'esprit de Noël, quand tout le monde est à cran. Bon, je prends mon mal en patience dans cette file, quand soudain, je prends le temps de regarder devant moi. Un petit bonhomme, maigrichon et débraillé tient quelque chose contre lui. Une paire de chaussure, des escarpins vernis, couleur grenat. Il les tient serrés contre sa poitrine. C'est à son tour. Il pose les chaussures sur le comptoir et le vendeur annonce le prix. Et là, je vois le petit bonhomme se décomposer. Il compte et recompte ses sous, et il s'aperçoit avec effroi qu'il n'en a pas assez. Je vois ses yeux poussiéreux se remplir de larmes. Il se tourne vers moi, puis vers le vendeur, puis se retourne vers moi encore une fois. Il se met à expliquer pourquoi il veut ses chaussures. Il me parle de sa maman, me dit que ces chaussures sont pour elle, qu'il va lui offrir, qu'elle a toujours fait tout pour organiser des Noëls tout beaux. Et il veut lui offrir des chaussures, ce soir, papa a dit qu'il n'y avait plus beaucoup de temps. Et il ne reste pas beaucoup de chaussures, celles-ci ont la bonne taille, elles seront parfaites pour sa maman. Il dit enfin que sa maman doit porter ces jolies chaussures quand elle rencontrera le petit Jésus. Le toit de la boutique me tombe dessus au moment où je comprends le désarroi de ce petit bonhomme, la tragédie qui est en train de se jouer dans son coeur. Il dit que sa maman est très malade et qu'il reste plus beaucoup de temps. Je mets la main dans ma poche, je sors ma carte de crédit et je dis au vendeur de prendre la somme correspondante sur ma carte. C'est moi qui vais payer pour les chaussures. Le petit garçon me regarde avec des lumières irréelles dans les yeux. Il me remercie dix fois et quitte la boutique en tenant les chaussures contre lui. Et moi je le regarde partir. Je sens un poids immense quitter mes épaules, en même temps que mes yeux deviennent humides. Et je pose autour de moi un regard nouveau sur ceux qui m'entourent. Ce petit bonhomme vient de réinjecter en moi le sérum de Noël, me faisant ressentir la vraie émotion de cette fête de famille. Ce petit bonhomme poussiéreux venu acheter des chaussures pour sa maman; des chaussures qui avaient juste sa taille. La taille de l'amour. Des chaussures pour une maman gravement malade qui devait rejoindre le Ciel ce soir. Une maman qui serait une étoile dans le ciel. Puisqu'il devait en être ainsi. Je n'oublierai jamais le regard de ce petit garçon. Ce petit garçon qui avait si peu de temps et un si grand désir, au moment où son monde allait basculer pour lui. Ce petit garçon m'a fait me rappeler quelle était la réelle signification de cette fête, au delà des souffrances qui n'évitent personne. La force d'un sourire, la joie d'offrir.
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Cette chanson "christmas shoes" est une des premières que j'écoute au début du mois de décembre. Elle me vrille le cœur à chaque fois, elle me fait monter les larmes aux yeux, mais elle me fait ressentir la vraie puissance et la vraie authenticité de Noël.
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J'aime Noël quand il est en décembre. Ça y est, vous vous dîtes, la fille débloque... Je m'explique. J'aime Noël à partir du 1er décembre, pas en octobre ou en novembre. J'aime Noël quand c'est le moment d'y penser. A partir du premier décembre, Maria Carey a le droit de passer la porte de chez moi, ou plus exactement, elle a le droit de sortir des enceintes et de la play liste. Elle et les autres, Tino Rossi, Céline Dion, John Lennon et tous les autres qui se permettent de poser leur voix sur une jolie mélodie.
J'aime les musiques et les chants de Noël, les pétillants et les joyeux, mais aussi les plus profonds et les plus tristes. J'ai connu les deux, les Noëls enneigés de mon enfance, les Noëls magiques de mes fiançailles et des premiers mois de mariage, les Noëls quand j'étais enceinte et celui avec les enfants, le Noël que j'ai failli passer à la maternité, ma demoiselle ayant décidé de pointer son nez le 18 décembre. Mais j'ai connu aussi le premier Noël du veuvage, douloureux, tellement douloureux, et j'ai connu aussi le premier Noël sans mon papa, celui-ci aussi, il a fait mal.
Mais Noël a une magie que je n'explique pas, juste je la vis et je la savoure. Je ne pense pas à la Nativité, la date historique fut posée là, mais c'est autre chose qui me fait vibrer. Les odeurs de la cannelle et des oranges, la saveur enfumée du vin chaud, sous la neige qui tombe, tandis que les nounours de la Parade viennent tour à tour nous serrer sur leur cœur et nous donnent un câlin qui fait tellement de bien. Oui, dans ma ville, chaque week-end end de l'Avant, les rues s'animent sous la chaleur des marrons chauds et des chants de Noël, et ces peluches à taille adulte distribuent des accolades qui sont tellement réconfortantes. Ce qui est drôle, c'est qu'eux savent qui on est (ce sont les animateurs de la ville) mais que nous ne les reconnaissons pas et c'est très amusant de partager ces moments tendres.
J'aime les décorations, les illuminations qui sèment l'espoir dans les nuits froides de ces fins de saisons si dures à négocier, si dures à traverser. J'aime les lumières chaudes qui semblent nous dire : "ne craignez rien, ayez confiance, prenez patience, les beaux jours reviendront. " Car c'est cela, la magie au coeur de l'hiver, au cœur du frimas, au coeur de la nuit, la promesse païenne du solstice d'hiver. Un gage d'espoir dans le ciel qui parle à tous, au-delà des mythes et des croyances, au delà des religions. J'aime l'idée de ce jour qui cesse de décroître, j'aime l'idée de cette Nature qui s'endort, pour se reposer et retrouver l'énergie au printemps. Même si mon Prince ne s'est pas sorti de cet hiver glacé qui a déchiré ses poumons et emprisonné son énergie de vie, même si mon Papa ne s'est pas sorti de cet hiver glacé qui a figé ses yeux bleus après une chute dans les escaliers. Je continue d'aimer Noël et sa magie, car je sais que sur notre sapin orné de bleu, de blanc et d'argent, deux belles étoiles illuminent notre intérieur et nous font nous sentir un peu bien, un peu moins tristes. Ils manquent à nos vies, mais Noël n'y est pour rien, et Noël reste beau à mes yeux; Noël sent la cannelle et l'orange, le sapin et les épices, Noël danse comme la flamme d'une bougie.
Noël, c'est le cri de joie de ma petite puce qui ouvrit le carton, découvrant le "doudou Poney" qu'elle voulait, j'entends encore l'intonation de sa voix, qui a dû monter jusqu'au ciel, jusqu'à son Papa, qui a dû bien rigoler de la voir aussi enthousiaste. Noël, c'est nos larmes dans le cimetière, quand nous montons allumer une bougie devant la photo de leur papa. Ce sont des larmes que nous déposons sur les branches de sapin devant sa tombe. Ce sont des larmes que nous versons ensemble, serrés si fort dans notre peine. Et c'est suivi d'un fou rire pour une quelconque bêtise racontée. C'est çà notre vie. Et Noël en fait partie.
Noël, c'est des chants que j'aime, au delà du message religieux qu'ils portent, c'est la puissance des notes portées par des voix sublimes.
Noël se diffuse dans les rues enneigées.
Noël n'est pas toujours beau, mais moi je me nourris de sa chaleur et je lui donne la saveur et la signification qui me semble opportune pour moi. Joyeux Noël.
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