Fugue

3 minutes de lecture

Un chapitre / Une musique

Reach None - Mount Shrine

https://cryochamber.bandcamp.com/album/shortwave-ruins

*

Samedi 15 août 1981.

À peine sommes-nous arrivés à la maison, que mes parents commencent à se hurler dessus. Je monte dans ma chambre, m’empresse d’ouvrir ma grosse valise remplis de vêtements que j’ai pris au hasard mais destinée à rassurer ma mère pour notre départ de demain matin. Sous mon lit, mon sac à dos. J’entends toquer à ma porte.

— Entrez !

Je vois la tête de ma mère dépasser de la porte.

— Ah, je vois que ta valise est prête. Parfait. N’oublie pas de mettre ton réveil à 7h.

— Oui, maman.

Elle finit par entrer.

— Écoute, Alexandre, je suis contente que tu le prennes bien finalement. Comme je t’ai dis ce matin, si nous repartons à Paris, c’est pour notre bien. Tu as bien vu hier soir comment ton père a réagi quand tu lui as dit que tu voulais rester ici avec lui.

— Oui, je sais, maman. Papa et moi, ça ne marchera jamais, je sais bien. Autant venir avec toi. Et puis, finalement, Arnaud et Marjolaine vont être contents de me retrouver au lycée l’année prochaine !

Ma mère me sourit. Elle vient me donner un baiser sur la joue avant de refermer la porte. Mais celle-ci se rouvre aussitôt.

— Tu as quand même passé une bonne soirée avec Lucas ?

Je lui promets que nous avons passé une superbe dernière journée ensemble et que nous nous sommes promis de rester en contact.

Je la vois vraiment rassurée avant de refermer définitivement la porte. Je tourne la clef dans la serrure et souffle un bon coup. Première étape de réussie. Je me change, et enfile mon pantalon et mon pull préféré. Il me tiendra bien chaud. Je récupère mon sac à dos de sous le lit et vérifie d'avoir tout bien emporté ce qu'il me fallait. Mon k-way sur moi, me voilà prêt pour fuir cette maison.

Je récupère mon vélo au garage. Je sors de la propriété en pédalant rapidement, sans me retourner une seule fois. La pluie tombe tellement fort que je vois à peine à deux mètres devant moi. Je réduis considérablement ma vitesse. Au bout de cinq minutes, je sens déjà l’eau s’infiltrer à travers mon pantalon. Je traverse la rue des cascades, puis je prends les deux grands virages. Je manque de glisser sur la route. Je commence à avoir froid, mon sac à dos se révèle beaucoup plus lourd que je ne me l’imaginais. Mais peu importe. Je suis heureux d’être sous la pluie, car je sais que dans quelques minutes, je vais retrouver les bras de Lucas, et rester avec lui vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Ça va être le bonheur absolu ! Je n’ai jamais aimé aussi fort une personne de ma vie.

J’arrive à l’entrée du chemin de la rivière, mais avec la pluie, je suis un peu déboussolé. Je ne retrouve plus l’accès qui mène à l’endroit où nous avons l'habitude de cacher nos vélos. Je descends du mien, regarde aux alentours. Le passage a déjà disparu sous les flaques d’eau qui ont tout inondé . Je ne veux pas perdre de temps, aussi, je décide de cacher mon vélo à un autre endroit. Un grand arbre me sert de repère, à ne pas oublier quand nous reviendrons demain.

Je ne passe pas par le raccourci, car c’est l'assurance de me perdre dans les bois. Le chemin balisé est déjà lui aussi recouvert de plusieurs centimètres d’eau. Mes chaussures sont trempées par les gerbes d’eau que je fais en marchant. La rivière déborde et inonde la berge. Les courants sont incroyablement rapides. Je commence à avoir peur. Ma visibilité est réduite par la pluie battante qui tombe des arbres en cascade, frappe le sol, fait jaillir des éclaboussures. Seule ma lampe torche me guide dans la nuit. Je réalise trop tard que c’est de la folie d’être venu ici.

Un coup de tonnerre retentit. J’imagine le pire, à savoir un éclair venant frapper un arbre qui vient s'abattre sur moi. Mon cœur s’emballe. Je ne suis pas très fier de moi à cet instant. Tout à coup, je crois apercevoir le pont. Oui, c’est bien lui ! Au-delà, la silhouette d’un homme qui porte un sac à dos. Je m’essuie les yeux comme je peux, car je ne vois vraiment rien. Je me mets à hurler.

— Lucas, j’arriiiive !

Je ne sais pas s’il m’a entendu, car je le vois qu’il s’éloigne. Je crie de nouveau son prénom. Quand soudain, j’entends un bruit que je crois être celui d’un coup de feu. Je crie de stupeur. Je suis pétrifié. J’entends hurler au loin. Je sors de ma torpeur, mais à peine je reprends ma marche que je trébuche contre je ne sais quoi. Je glisse et chute lourdement dans l’eau. Une douleur inouïe vient me percuter le genou.

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